Catégories
Immigration

Les migrants du Mali

Sous le titre général de « Bamako World Wide », Carine Fouteau a publié récemment sur Médiapart une série d’articles consacrée aux migrations maliennes et surtout au dramatique devenir de ces migrants.

En quelques mots, le cadre est tracé: la faiblesse des revenus (36% des habitants vivent avec moins de 1 dollar par jour), ajoutée aux aléas du climat et à l’explosion démographique (13,7 M d’habitants aujourd’hui, 40 millions en 2050 ??) fait que les maliens, déjà traditionnellement enclins à la migration, partent encore plus nombreux.

C’est ainsi que les commerçants préfèrent le voyage sud-sud, notamment avec Dubaï ou l’Arabie Saoudite. Un bilan de la BCEAO indiquerait que la part des exportations vers l’Europe serait tombée de 83,5% en 2002 à 5,6% en 2006. Que valent ces chiffres stupéfiants qui n’ont de valeur que s’ils sont rapportés au volume d’affaires. Le dernier rapport connu des comptes extérieurs du Mali (09/04/2010) précise que les exportations ont atteint 935 milliards de Francs CFA en 2008, dont 70% pour l’or, 10% pour le coton et 5,5% pour les animaux vivants. Les zones destinataires de ces exportations étaient l’Afrique pour 86,7%, l’Asie pour 7% et l’Europe pour 5%. D’où il ressort que des chiffres incomplets ne peuvent rien signifier ! Quant au reste du commerce dont parle l’article, il relève avant tout des importations. D’une part sous la forme d’une activité qui échappe à tout contrôle et à toute réglementation, aussi bien à la sortie d’Arabie Saoudite qu’à l’entrée au Mali. D’autre part, dans le cadre d’un commerce unilatéral consistant en l’importation de matériels ou de pièces détachées d’origine chinoise via Dubaï ou Charjah. Cette “mondialisation par le bas” comme l’appelle l’auteure n’est en fait qu’un aspect de la mondialisation tout court.

L’article suivant aborde le choix des étudiants qui préfèrent poursuivre leurs études aux USA plutôt qu’en France. A n’en pas douter, il s’agit là de la conséquence de deux mouvements. Le premier est la volonté des élites africaines issues des classes supérieures de s’exprimer en anglais et de s’orienter vers des professions dites d’avenir: informatique, économie, … Le second est à chercher dans les très mauvaises conditions d’attribution des visas par la France, conditions qui ne peuvent que jouer un rôle d’épouvantail. « L’état des lieux des relations diplomatiques entre le Mali et la France est désastreux ». Et la dernière incursion de l’armée française au Nord Mali, sans en avoir prévenu ATT et sans son accord, ne va pas arranger les choses.

De tels faits sont bien plus graves qu’un discours encore une fois cité dans ces articles, celui de Dakar. Il a pu certes heurter quelques intellectuels, sans doute avec raison. Mais il est impensable d’accuser ce discours d’être raciste. Il n’est en fait qu’une imagerie datée, traditionnelle et paternaliste de l’Afrique. C’est un discours vieux de plusieurs dizaines d’années. C’est en fait une manière de dire que l’Afrique n’a pas pris le train de la mondialisation. Pourtant, d’autres tiennent, sans s’en rendre compte, le même discours. A commencer par les écolos radicaux, tenant de le décroissance, qui veulent vouer l’Afrique à un développement agricole auto-centré. A continuer par les milliers d’associations charitables qui consacrent leur quelques sous, en toute bonne foi, à l’apprentissage de la langue française, à la récupération et au recyclage de matières diverses, bref à l’acceptation d’une vie faite de misère et de soumission …

La série des articles s’oriente alors vers le descriptif apocalyptique des conditions d’expulsion des maliens, des ghanéens, des tchadiens ou nigériens depuis la Libye. Le postulat de départ est qu’ainsi la Libye répond favorablement aux attentes des pays européens avec lesquels elle a normalisé ses relations.Elle se comporte comme un “chien de garde” de l’Europe.Tout comme l’Algérie, le Maroc, la Tunisie ou la Mauritanie.

Outre que cette affirmation très “politique” fait peu de cas de l’identité de chacun de ces pays, elle s’appuie sur une affirmation “erronée”. Tous les maliens expulsés de Libye déclarent s’y être rendus pour y travailler ! Ont-ils le choix de dire autre chose lorsqu’ils sont emprisonnés et battus ? La vérité est qu’ils sont en Libye (ou en Algérie, ou au Maroc, …) pour rejoindre l’Eldorado européen. Et qu’ils sont des centaines chaque jour à grossir le flux. Ils ne viennent pas pour travailler en Libye, car cela relève d’une insupportable soumission envers les arabes. La migration africaine des maliens se fait avant tout vers le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Nigeria, le Burkina Faso, … elle ne se fait pas vers le Maghreb.

Migrants maliens de retour de Libye (C)France24

En lieu et place de développer une thèse fausse, il serait sans doute plus constructif de comprendre l’émigration des Africains, de comprendre la difficulté à les recevoir de la part de pays comme le Niger ou le Maghreb, de favoriser une meilleure circulation des gens, des richesses et des talents là-bas comme ici chez nous.

Très curieusement, et comme en écho avec la volonté des étudiants maliens d’aller poursuivre leurs études aux Etats-Unis, la série d’articles s’achève par l’expulsion d’une malienne depuis l’état de l’Ohio. Les titres de la presse d’aujourd’hui nous apprennent que les républicains veulent faire de la lutte contre l’émigration leur prochain cheval de bataille. Les hispaniques sont visés en priorité, certes, mais un jour viendra où les noirs non américains seront inquiétés à leur tour.

En conclusion, la série est intéressante, très intéressante, mais trop souvent construites sur des idées préconçues, alimentant la désormais traditionnelle opposition entre tenants d’un contrôle dur de l’immigration et partisans d’un humanisme qui ne solutionne rien.

Ce sont 200 nouveaux émigrants qui arrivent chaque jour à Agadès, au Niger. Certains restent, certains repartent, certains reviennent, certains disparaissent, … Les passeurs font leurs affaires et les bandits de tous ordres ont organisé le “marché”.

Le Niger, c’est aussi le pays où Michel Germaneau a été capturé et où il est probablement mort de maladie et de grand âge. L’équipée franco-mauritanienne, à visée de reconnaissance, a donné l’occasion aux ravisseurs d’annoncer une exécution pour venger cette expédition. Il est sans doute plus facile d’annoncer une “vengeance” que de reconnaître que l’otage est décédé de mauvais soins ou d’absence de soins dans les mains de ses ravisseurs. A l’appui de cette thèse, l’absence de revendication publique et officielle et l’ignorance complète dans laquelle se trouvaient les “intermédiaires négociateurs” maliens.

Alors, faire la guerre à AQMI ne résoudra rien. Et Nicolas Sarkozy serait mieux inspiré de faire la guerre à la pauvreté en Afrique, de faire la guerre pour le développement de l’Afrique. C’est facile (ou presque). Il lui suffit de réduire la dette de ces pays, de donner sa part du PIB promises dans le cadre du Millénaire pour le Développement, d’appeler l’Europe à ses cotés, de favoriser des initiatives locales d’associations ou d’entrepreneurs locaux et de confier le contrôle de ces actions à des organismes internationaux comme l’UNESCO, l’UNICEF, la FAO, le BIT, l’OMS, l’ONU, et d’autres encore, en fonction de la nature du projet.

Additif du 10 janvier 2011,
Compte tenu des commentaires exprimés sur ce post et relatifs à la disparition de Michel Germaneau, je ne peux manquer de signaler cette info de “Marianne » (http://www.marianne2.fr/blogsecretdefense/AQMI-l-otage-Michel-Germaneau-est-mort-de-maladie-faute-de-medicaments_a93.html) publiée ce jour.

Catégories
Développement solidaire

L’Afrique et les Objectifs du Millénaire

La publication d’un rapport ou de statistiques permet de faire le point sur des données globales et d’aider à trier parmi les opinions. Ainsi de l’Afrique. Est-elle “mal partie” (René Dumont en 1962), “maudite” (Cinquante-ans-d-indépendances) ou “bien partie ” (http://www.leaders.com.tn/article/pour-son-second-cinquantenaire-l-afrique-noire-est-bien-partie) ? Le rapport d’étape des OMD (http://www.un.org/fr/millenniumgoals/pdf/report2010.pdf), Objectifs du Millénaire pour le Développement (ONU), publié le 16 juin, autorise quelque analyse.

(C)OMD

Huit objectifs (http://www.ecoloinfo.com/2010/02/05/le-temps-presse-8-grands-realisateurs-tournent-le-film-8/), s’était donné la communauté internationale, afin de favoriser le développement des pays laissés pour compte. L’objectif N° 1, “Eradiquer l’extrême pauvreté et la faim” est, paraît-il, globalement atteignable. La crise a,certes, entraîné un ralentissement des progrès, mais la monde reste capable d’atteindre la cible qui est de réduire de moitié la proportion de population dont le revenu est inférieur à 1 $ par jour.

1 $ ou 1,25 $ ??. Car les tableaux qui suivent parlent de 1,25 $. Est-ce pour tenir compte de l’inflation ? Toujours est-il que l’Afrique Subsaharienne, celle qui nous intéresse aujourd’hui, avait 58 % de sa population qui vivait avec moins de 1,25 $/j en 1990. Il n’y en a que 51 % en 2005.

De plus, parmi tous ces gens qui vivent avec moins de 1,25 $/jour, il faut savoir que le revenu moyen était de 0,92 $ (- 26 %) en 1990. Ce revenu moyen est de 0,99 $ en 2005.

En matière d’emploi, en 1998, 82 % des travailleurs ne disposaient que d’un emploi précaire, c’est à dire qu’ils étaient soit à leur propre compte, soit au service de familles, mais non rémunérés. En 2008, cette proportion est encore de 75 %.

Certes, ce ne sont pas de pareils revenus qui peuvent bien contribuer à une nourriture suffisante. En 1990-92, 31 % de la population était dénutrie. En 2005-07, la proportion n’est plus que de 26 %. Malheureusement, les indicateurs actuels montrent que la crise alimentaire de 2009-10 fait très probablement remonter ces chiffres. Un enfant sur quatre de moins de 5 ans souffre d’insuffisance pondérale, ceux des zones rurales ayant deux fois plus de “chance” de souffrir d’insuffisance pondérale. Cette inégalité est également ventilée selon la richesse du groupe ou de la famille. Parmi la fraction des 20 % de la population la plus riche, il y a moins de 20 % d’enfant de moins de 5 ans qui soient dénutris. Mais parmi les 20 % de la population la plus pauvre, ce sont plus de 35 % des enfants de moins de 5 ans qui sont dénutris.

L’objectif N° 2 des OMD vise à “Assurer l’éducation primaire pour tous les enfants” et, au niveau mondial, l’espoir d’atteindre cet objectif diminue. En Afrique Subsaharienne, en 1999, le taux de scolarisation en primaire était de 58 %. Il est de 76 % en 2008, ce qui signifie qu’en moyenne, un enfant sur quatre n’est nullement scolarisé. Si cet enfant est une fille, que son entourage est pauvre et qu’elle vit en milieu rural, elle accumule les mauvais points et a peu de chance de pouvoir aller à l’école.

L’objectif N° 3 consiste à “Promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes“. Qu’en est-il en matière de scolarité pour l’Afrique Subsaharienne ? En 2008, pour 100 garçons scolarisés en primaire, il y a 91 filles. Pour 100 garçons scolarisés en secondaire, il y a 79 filles. Et pour 100 garçons scolarisés en enseignement supérieur, il y a 67 filles. Car la pauvreté d’abord est un obstacle à l’éducation des filles les plus âgées.

Les hommes sont plus nombreux à avoir un emploi rémunéré, les femmes sont reléguées dans les emplois subalternes et précaires, elles sont sur-représentées dans le secteur informel où n’existent ni sécurité ni avantages sociaux. Les emplois de haut niveau sont réservés aux hommes. Et si les femmes accèdent parfois au pouvoir politique, ce n’est qu’à la condition que des mesures spéciales les y aident (quota).

L’objectif N° 4 des OMD a pour but de “Réduire la mortalité infantile des enfants de moins de 5 ans de 2/3 entre 1990 et 2015“. Ce taux était de 184 décès pour mille enfants de moins de 5 ans en 1990. Il est de 144 pour mille enfants en 2008. En Afrique Subsaharienne, autant dire que l’objectif est inatteignable !

Améliorer la santé des mères et réduire de 3/4 le taux de mortalité maternelle“, tel est l’objectif N° 5. En 1990, 41 % des accouchements se pratiquaient avec un personnel soignant qualifié. En 2008, ce sont 46 % des accouchements: faible évolution. Là également, la richesse décide de tout. En Afrique Subsaharienne, parmi les 20 % de femmes les plus pauvres, il en est 55 % qui sont examinées au moins une fois pendant leur grossesse. Parmi les 20 % les plus riches, elles sont … 85 % à être examinées au moins une fois.

Autre chiffre: le nombre de naissances pour mille filles de 15 à 19 ans. Il était de 124 en 1990, de 119 en 2000 et de 121 en 2007, autant dire qu’il ne bouge pas et que la contraception reste largement inexistante. Pour comparaison, dans l’ensemble des régions développées du monde, ce chiffre est de 23 pour mille en 2007.

L’objectif 6 vise à “Combattre le VIH, le paludisme et autres maladies” pour d’ici à 2015 enrayer la progression du VIH et inverser la tendance.

Assurer un environnement durable“; tel est l’objectif 7. En Afrique Subsaharienne, toujours, seuls 49 % de la population avaient un accès à une source d’eau améliorée. Ils sont 60 % en 2008. Par contre les installations sanitaires restent aujourd’hui encore un réel problème. Les utilisateurs d’installations sanitaires améliorées représentaient 28 % de la population en 1990, ils sont .. 31 % en 2008 c’est à dire aucun progrès.Les utilisateurs d’installations non améliorées et d’installations collectives totalisaient 36 % en 1990 et 42 % en 2008. Enfin, les pratiquants bien malgré eux de la défécation à l’air libre représentaient 36 % de la population en 1990 et encore 27 % en 2008.

La population urbaine d’Afrique Subsaharienne vit pour 70 % (en 1990) et encore 62 % (en 2010), dans des taudis ou bidonvilles.

Dernier objectif, le N° 8, qui vise à “Mettre en place un partenariat mondial en consacrant 0,7 % du Revenu National Brut à l’aide au Développement (APD)“. Ont atteint ou dépassent ce chiffre, le Danemark (0,83), le Luxembourg (1,0), les Pays-Bas (0,80), la Norvège, la Suède (1,01 %). La France se situe entre 0,44 et 0,48 %, l’Allemagne à 0,40, l’Autriche 0,37, le Portugal 0,34, la Grèce 0,21 (on est rassurés, ce n’est pas là qu’elle a dilapidé ses finances !) et l’Italie, bonne dernière avec 0,20 %.

Tous ces chiffres concernent l’Afrique Subsaharienne, c’est à dire, pour l’ONU, tous les pays africains au sud du Sahara, donc y compris l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique du Sud. En clair, c’est toute l’Afrique sauf la bande qui va de la Mauritanie à l’Egypte.

Donc, dans cette Afrique Subsaharienne, il y a le Mali, classé 178° pays sur 182 par la même ONU en ce qui concerne le développement humain. Compte tenu de cette extrême pauvreté, il est certain que tous les chiffres applicables au Mali se situent dans la partie la plus défavorable de la fourchette. Et pourtant Amadou Toumani Touré, Président du Mali, (Le Figaro, 29/06/2010) attend beaucoup de la découverte de pétrole dans le nord du pays (en plein dans cette zone où s’agitent AQMI et autres trafiquants). Il considère le pétrole comme une bénédiction car les richesses qu’il apportera permettront de pacifier la région (est-ce certain ?), de créer des écoles, des dispensaires, bref d’atteindre les Objectifs du Millénaire au moins en ce qui concerne l’eau, la santé et l’éducation. Mais il voit aussi le pétrole comme une malédiction (gestion non transparente, atteintes à l’environnement, ..) et pour cela veut s’inspirer de la gestion de son fonds pétrolier par la Norvège.

Dans un récent entretien sur France O (http://www.la1ere.fr/infos/actualites/afrique-aminata-traorele-choix-du-modele-economique-ne-nous-a-jamais-ete-laisse_25901.html), Aminata Traoré ne prend pas position au sujet des chiffres des OMD. Elle s’élève juste contre une analyse qui voudrait déduire de la moindre souffrance de l’Afrique dans le contexte de crise que tout va bien et que le continent est en passe d’émerger. Les chiffres précédents le prouvent encore, Aminata Traoré le dit bien: « Tout cela ne signifie pas pour autant davantage de prospérité, de paix et de respect pour les africains ». Aminata Traoré considère que « l’Afrique s’est laissée dicter un agenda qui n’a rien à voir avec les besoins des africains, dans les domaines de l’emploi, de l’environnement, de l’alimentation, de l’éducation, … Il faudrait que l’Afrique fasse le choix de SON modèle économique et mette un terme au modèle prédateur qui met à sac le continent ».

Aminata Traoré (DR)

Enfin, dans une récente interview du Monde (24/06/2010), c’est Pascal Lamy, le Directeur Général de l’OMC, qui apporte un autre point de vue. Lui non plus ne parle pas directement des résultats d’étape des OMD, mais il s’en inspire quand il souligne la diminution de la pauvreté grâce à l’ouverture des marchés et à la mondialisation. Il s’en inspire quand il souhaite la conclusion des négociations de Doha et la conclusion d’accords mondiaux et non plus bilatéraux, car ce ne sont pas ces accords qui pourront résoudre les questions des barrières tarifaires ou des subventions agricoles. « Il faut que les pays en développement puissent mieux valoriser leur potentiel agricole ». Il s’en inspire encore quand il souligne que l’Europe est très pessimiste en matière de mondialisation, et peut-être avec raison. « Pour maintenir son modèle social, sans doute le meilleur, elle a besoin de croissance et de démographie. Elle n’a aucune des deux. Il lui faut donc soit renoncer à ce fameux modèle social, soit accepter l’immigration, soit faire des réformes de structure qui augmentent le potentiel de croissance. Plus facile à dire qu’à faire ! » Il s’en inspire enfin lorsqu’il dit que la réduction de la pauvreté n’est pas suffisante. Si l’on veut que le politique remplace l’économique (voire le financier et le spéculatif) en matière de développement mondial, il faut aussi lutter contre les inégalités et accorder plus d’attention à la redistribution supranationale, c’est à dire … donner au moins les 0,7 % du PIB prévus par les OMD !

Pascal Lamy (C)Weforum+Swiss Image+Rémy Steinneger

En conclusion, l’Afrique noire subsaharienne a encore beaucoup de chemin à faire. L’y aider est indispensable et relève d’une solidarité beaucoup plus internationale, en tout cas beaucoup plus européenne qu’elle ne l’est actuellement. Il est intéressant de constater que des questions comme le pétrole (son coût, son exploitation, le peak oil, ..), la santé (palu, hygiène, salubrité, ..), l’émigration et l’immigration (qualitative et quantitative, pour quelle reconnaissance, ..), sont des questions récurrentes lorsque l’on parle du développement solidaire. Ce n’est pas pour rien que ce blog a choisi ces thèmes.

Aminata Traoré ne croit pas au “marché”. ATT et Pascal Lamy y croient. Mais tous se rejoignent pour dire que la France seule ne peut plus grand chose pour l’Afrique. Au contraire, c’est elle qui a besoin de l’Afrique, c’est elle qui doit jouer la carte de l’amitié et de la solidarité si elle ne veut pas que la Chine n’écrive qu’une nouvelle étape de l’exploitation de l’Afrique.

Catégories
Mali

Sumaya

Sumaya, en bambara, c’est le paludisme (Le-Mali-enregistre-un-taux-d-incidence-de-paludisme-de-191-pour-1000). Le Mali a ceci de bien et de fort honnête, c’est qu’il n’hésite pas à publier les statistiques les plus précises. Encore aujourd’hui, c’est le paludisme qui en est l’objet. Le Ministre malien de la santé nous informe que les cas de paludisme recensés en 2008 ont été au nombre de 1.012.730, représentant quelques 37,5% des motifs de consultation dans les centres de santé et, malheureusement, la première cause de mortalité chez les enfants de moins de 5 ans.

Le paludisme au Mali a tué 227 fois en 2008.

Pour mémoire, en 2005, 962.706 cas avaient été comptabilisés (36% des consultations).

Tanzanie 2006-Contrôle des moustiquaires (C)John Stanmeyer

“Combattre le sida, le paludisme et d’autres maladies”, cela constitue le 6° des Objectifs du Millénaire pour le Développement, plus précisément la Cible 10: « d’ici à 2015, enrayer la progression du paludisme ».

Dans son rapport de mars 2009, le PNUD Mali (Programme des Nations-Unies pour le Développement) estime que la diminution du nombre de cas de paludisme fait partie des “scénarios tendanciels très pessimistes à l’horizon 2015″.

Catégories
Mali

Journée Mondiale de la Santé

Alors que (parce que ?) la moitié de la France s’essaie à théoriser son aversion-répulsion anti-sarkozienne, la Journée Mondiale de la Santé (7 avril) est passée totalement inaperçue. PERSONNE, ni télés, ni journaux, n’en a dit un mot. Il est vrai que se jouait à Londres une étape importante du grand happening financier.

Au sujet de cette journée, j’ai cherché à savoir quels pouvaient être certains des sujets majeurs en matière de santé au Mali. Notamment, en allant au-delà des discours de circonstance.

Logo de l’OMS

Un premier thème: le SIDA.

Les dernières statistiques en la matière ont été publiées fin 2008, mais elles remontent à 2006. Elles font état d’une diminution nette du taux de prévalence du Sida dans la population totale du pays, ce taux passant de 1,7 % en 2001 à 1,3 % en 2006. Bamako reste à l’écart avec un taux de prévalence de 2 %. Le nombre de malades était estimé à 28 000 dont plus de 77 % suivent des traitements spécifiques, en particulier antirétroviraux (ARV). Ce “succès” est attribué au gros et coûteux travail de sensibilisation, information et éducation.Seule ombre au tableau, laquelle jette un doute sur la portée réelle des chiffres annoncés; le taux de dépistage du Sida est extrêmement faible: moins de 100 000 personnes en année pleine (2008) dont 40 % de femmes enceintes. (Chiffres donnés par le Ministère malien de la Santé).

Un second thème: la POLIO.

Les chiffres viennent d’être communiqués par le CDC (Center for Disease Control and Prevention). Le nombre de cas de poliomyélite a augmenté de 26 % en 2008 dans le monde. La plus forte progression est enregistrée au Nigeria où le nombre de personnes atteintes est passé de 285 en 2007 à 801 en 2008. La maladie frappe huit autres pays de l’Afrique de l’Ouest dont certains où elle avait été éradiquée: Bénin, Burkina-Faso, Côte d’Ivoire, Ghana, Togo et … Mali. Or, la poliomyélite est une maladie virale infectieuse et contagieuse qui se transmet par voie digestive à partir d’eaux et d’aliments contaminés (contamination oro-fécale). Comme le paludisme (Le-Mali-enregistre-un-taux-d-incidence-de-paludisme-de-191-pour-1000), seul un assainissement réel des cités maliennes permettra de venir à bout de ce fléau, sans oublier une couverture vaccinale totale.

Enfin, troisième thème: l’EXCISION.

Cette fois-ci, c’est le Ministère malien de le Femme, de l’Enfant et de la Famille qui a publié ces chiffres courant février. 92% des femmes maliennes de 15 à 45 ans ont subi l’excision. Des variations importantes d’amplitude sont notées entre villes (Tombouctou, Gao: 34 %) et entre ethnies (Tamasheq: 16.5 %, Peuls: 98.4 %, Bambaras: 98.9 %, Songhaï: 47.8 %, …). La lutte contre ces pratiques rencontre de très fortes résistances. J’en veux pour preuve une déclaration récente d’Aminata Traoré, ancienne ministre de la Culture et du Tourisme, dynamique présidente du Forum pour un Autre Mali, qui aborde cette question avec un certain “recul”. “Ces pratiques anciennes conféraient un statut à l’homme et à la femme. Aujourd’hui, elles ne sont plus nécessaires. En Afrique, les gens qui ont un certain niveau d’éducation, qui ont conscience que le monde va au-delà de la communauté, du village, comprennent que des pratiques telles que l’excision ne sont plus nécessaires. Ce qui bloque avec l’excision, c’est que la recherche de coupables, la criminalisation, ne sont pas les bons moyens de résoudre le problème. En Afrique, à travers le dialogue, si on explique aux gens que ce n’est plus une nécessité et que la fille qui n’est pas excisée ne sera pas montrée du doigt, des progrès remarquables se font”. (Amphitéa Magazine)

Acceptons-en l’augure ! Il n’en demeure pas moins que si le “dialogue” est réservé aux “gens qui ont un certain niveau d’éducation“, la solution au problème des mutilations génitales féminines n’avancera pas vite. Cela est si vrai que le Ministère malien de la Femme, de l’Enfant et de la Famille a déclaré que 80.3 % des maliens pensent que l’excision (Excision-vaste-campagne-de-sensibilisation-au-Mali) est une pratique qui doit être maintenue.

Ce n’était là que trois sujets qui font débat au Mali, trois sujets plus ou moins en rapport avec la Journée Mondiale de la Santé… dont on n’a pas entendu parler en France.