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Ecologie

Publicités « vertes »

En de nombreuses occasions, sur ces pages, il a été souligné le fait que les idées de décroissance s’accompagnaient souvent d’une notion de “relocalisation”, notamment alimentaire. Le but étant de ne consommer que (ou presque ..) des produits originaires de la proche région, d’aucuns citant des cercles de 100 ou 180 km.

L’une des critiques est celle qui concerne l’avenir des productions fruitières et légumières de notre propre pays, mais hors métropole. C’est le cas de la banane, entre autres, produite en Martinique, en Guadeloupe, … Il n’est pas acceptable qu’au motif de “décroissance” des régions entières soient stigmatisées ou simplement ignorées.

Banane durable (DR)

Les organisations agricoles et territoriales chargées de la production et de l’exploitation de la banane lancent donc une vaste campagne sur le thème de la “banane durable”. Il ne s’agit pas à proprement parler d’une nouveauté puisque cette campagne est l’une des étapes d’un plan signé en décembre 2008, sous l’égide de Michel Barnier, Ministre de l’Agriculture. Ce plan avait, et a toujours, pour objectifs de produire des fruits avec moins de pesticides et un plus grand respect de l’environnement.

On le sait, la culture de la banane est accusée d’une hyper-utilisation de pesticides depuis de nombreuses années, en particulier de chlordécone (http://www.observatoire-pesticides.gouv.fr/index.php?pageid=579), (un voisin du DDT) interdit depuis 1998. Or, ce produit n’est en rien biodégradable et les sols ou les cours d’eau en sont dangereusement contaminés. Les risques sont avérés (Inserm) et s’appellent cancer de la prostate ou malformations congénitales.

Moins de deux ans après la signature du plan “Banane durable”, et face à l’engagement des producteurs à produire “conformément à la législation sociale et environnementale de la métropole”, on aimerait savoir ce qui a été fait pour décontaminer les sols et qui assure en toute indépendance le contrôle de l’application de cette charte pleine de bonne volonté.

Autre publicité “verte”: celle du Groupe californien Tesla, grand spécialiste de l’automobile électrique. On comprend certes bien que si l’on veut vendre des véhicules électriques, il faut “toucher” le client là où l’automobile le fait rêver: le sport, la vitesse, le luxe, … mais, justement, ne serait-il pas temps de changer de logique et de parler davantage d’efficacité dans la simplicité, la sécurité, la légèreté, la durabilité, la possibilité de recyclage après usage, etc… etc …?

Tesla présente ainsi un roadster de 288 ch. qui peut atteindre la vitesse de 240 km/h, une vitesse que, même en Californie, on ne peut atteindre que sur circuit spécialisé. Electrique, ce véhicule a une autonomie de … 340 kilomètres. A petite vitesse et pour frimer sur les boulevards de Venice, il est possible d’imaginer que la recharge de la voiture ne s’imposera que … une fois par semaine, disons.

Mais, sur circuit, après avoir roulé MOINS D’UNE HEURE TRENTE, il vous faudra aller à la borne !! Et comme l’électricité américaine n’est pas très propre en CO2 émis, ce n’est certainement pas un bon choix écologique que vous aurez fait en achetant ce véhicule.

Bref, une publicité qui a le goût et la couleur de l’écologie et de l’économie d’énergie, mais qui n’en a aucune consistance. Des idées au goût du jour, pour une idéologie de la voiture qui date d’hier.

Il convient quand même de reconnaître à Tesla la volonté de créer des véhicules électriques plus “généralistes” telle cette berline prévue pour 2011.

Berline Tesla Model S (DR)
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Ecologie

Trafics de déchets

Dans son édition du 26 août, Le Monde a publié (page 2) un curieux entrefilet, classé sous une rubrique “environnement”, qui faisait était du renvoi par le Brésil et vers l’Allemagne de 22 tonnes d’ordures ménagères allemandes entrées illégalement sur son territoire. Cette information a été rendue publique par l’Institut Brésilien de l’Environnement qui a précisé qu’une amende de 668000 € avait été infligée au transporteur et une amende de 177000 € à l’importateur.

Aucune autre information n’étant donnée dans le reste du journal, on reste un peu sur notre faim. Il en a été trop dit, ou pas assez. Et cela est bien regrettable puisqu’il faut trouver d’autres explications dans le Journal de l’Environnement par exemple (http://www.journaldelenvironnement.net/article/le-bresil-ne-veut-pas-etre-la-poubelle-des-europeens,18722). Et l’on y apprend que cette affaire n’est pas la première.

Centre d’enfouissement au Venezuela

22 tonnes, c’est en fait dérisoire. Cela ne représente pas plus que le contenu d’un conteneur maritime de 40′, UNE semi-remorque de poids lourd de 40 tonnes ! Et s’il s’agit véritablement de déchets ménagers, cela tient dans un conteneur de 20′ !!. Lorsque l’on sait que l’exportateur, une entreprise de Hong-Kong, avait qualifié ces déchets de “plastique recyclable” dont la provenance était la République Tchèque, on est en droit de se demander combien de conteneurs faussement identifiés et dont l’origine est mensongère ont pu passer les mailles du filet douanier du Brésil. En 2009, lorsque les anglais s’étaient fait pincer pour un même trafic, ce sont … 1400 tonnes qui leur ont été retournées. C’est un peu plus conséquent et probablement plus proche de la vérité pour l’affaire qui nous concerne aujourd’hui. Il est en effet difficile d’imaginer un exportateur prendre des risques sur un seul conteneur.

Le Monde nous parle de déchets ménagers, le Journal de l’Environnement nous parle de déchets ménagers dont certains classés dangereux. Il y a là beaucoup de confusions: les déchets ménagers ne sont pas dangereux, et les déchets dangereux des ménages ne sont pas des déchets ménagers !! Et tout ceci n’a rien à voir avec de prétendus déchets plastiques. En première observation, on peut noter que l’Allemagne est l’un des pays européens où le tri des déchets des ménages est le plus développé, et donc s’interroger sur ces mélanges qui n’ont pas de raison d’être. Qui et comment peut encore trouver un intérêt à stocker des ordures ménagères brutes pour les envoyer au bout du monde ? Personne, à vrai dire et ce ne sont probablement pas des ordures ménagères ! En seconde observation, d’aucuns se souviendront d’une filière identique qui a concerné la France au détour des années 90 et qui consistait pour l’Allemagne à se défaire de ses déchets plastiques auprès d’entreprises (peu regardantes) qui avaient trouvé juteux le filon du recyclage subventionné. Malheureusement, il est vite apparu qu’au nom de déchets plastiques, ce sont souvent des déchets d’hôpitaux (poches de sang, seringues et tubulures) qui entraient en France. Est-ce que cette filière est maintenant orientée vers le Brésil ?

Enfin, dernière constatation; le Brésil a beau faire partie des BRIC, ces pays en rapide développement, les industriels véreux du vieux continent ne le considèrent pas moins comme un pays “pauvre”, un pays où la main d’œuvre sous-payée est tout juste bonne pour trier, enterrer ou incinérer nos ordures.

Quant à l’Allemagne, qu’en dit-elle ? Silence radio jusqu’à ce jour …

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Ecologie

Des suisses, du coton bio et du compost

Si ce n’était le coté xénophobe, démagogique, égoïste et islamophobe de la votation suisse contre les minarets, on serait tenté de rappeler que, de 1536 à 1810, les protestants ont interdit la construction de lieux de culte catholiques dans le canton de Vaud. Et que ce n’est qu’en 1832 que les catholiques de Lausanne ont eu le droit d’édifier un clocher. Il y a donc des précédents !!

Parlons donc d’un aspect plus intéressant des suisses, et de gens qui ne sont probablement pas ceux qui ont voté OUI ce dimanche. Il existe dans ce pays une ONG nommée Helvetas (http://www.helvetas.org/wFrancais/index.asp), dont la devise est « Agir pour un monde meilleur ». Elle a été créée en 1955 et compte plusieurs dizaines de milliers d’adhérents. Son objectif principal est “la réalisation de projets de développement à l’étranger”.

L’étranger, c’est l’Afrique, l’Asie, l’Amérique Latine. Les projets se regroupent en quatre catégories: les infrastructures en milieu rural, la gestion durable des ressources naturelles, la formation et la culture, la société civile et l’état.

Les pays dans lesquels intervient Helvetas sont le Guatemala, le Honduras, Haïti, le Sénégal, le Mali, le Burkina Faso, le Bénin, l’Ethiopie, la Tanzanie, le Mozambique, l’Afghanistan, le Bhoutan, le Kirghizistan, le Laos, le Népal, le Sri Lanka, le Vietnam.

Parlons un peu du Mali. Helvetas s’y engage dans le domaine de la distribution de l’eau, de la formation (enseignement primaire en particulier pour les filles), de la production agricole et de la sensibilisation à l’éradication des mutilations génitales féminines. Par ailleurs, Helvetas a créé à Bamako une école de formation en photographie.

Dans le domaine agricole, le coton biologique est une priorité. En 2007, les producteurs maliens organisés sous l’égide d’Helvetas, ont produit 1300 tonnes d’un coton graines acheté par les firmes Migros et Switcher afin d’en faire des vêtements ou de la ouate labellisés Max Havelaar. En 2008, ce sont 5500 producteurs qui se sont engagés dans cette culture avec une production de 2000 tonnes de coton graines. La région Bretagne a signé un accord d’achat de 3000 tonnes jusqu’en 2010. L’égrenage du coton se fera en Afrique, le filage à Fès au Maroc et le tissage à Laval, en France. Quatre entreprises bretonnes en font des vêtements.

Boules de coton

L’intérêt pour la fabrication de coton bio est évident, puisque le prix d’achat est supérieur de 50% à celui du coton traditionnel. Pour être bio, le coton doit être cultivé sans pesticides et engrais de synthèse, ces derniers étant remplacés par du fumier ou du compost. Le repos et la fertilité des sols sont assurés par une rotation des cultures, en particulier avec des légumineuses.

Malheureusement le coton bio, c’est bien beau, mais ça reste et ça restera probablement longtemps encore très marginal.

Production de coton bio de l’Afrique de l’Ouest (Mali, Burkina, …) en 2008: 2 900 tonnes, soit le double de la production de 2007.

Production mondiale de coton bio en 2008: 145 000 tonnes.

Production mondiale de coton en 2008: 26 500 000 tonnes.

La production de coton bio de l’Afrique de l’Ouest représente 0,01% de la production mondiale de coton !

C’est pourquoi Helvetas, sans abandonner la filière coton, s’oriente désormais vers l’agriculture biologique, le maraîchage biologique, en reprenant les mêmes concepts que ceux de la culture du coton, c’est à dire la production de matière organique (compost), le conseil agricole, le soutien à la production de tomates, oignons, aubergines, …, la mise en place d’une labellisation ou certification des produits. Il s’agit, ni plus ni moins, de poursuivre l’action pour améliorer les conditions de vie en milieu rural, en satisfaisant les besoins maraîchers des marchés nationaux, régionaux, voire internationaux.

Un détail intéressant dans cette démarche: celui de la fabrication du compost. Dans les zones rurales, les déchets végétaux (plants arrachés, feuilles, branches, …) sont nombreux et peuvent satisfaire en grande partie la fabrication d’un compost de qualité. Dans la zone périphérique de Bamako où nombreux sont les maraîchers, il devrait être possible de fabriquer un compost avec la partie fermentescible des ordures ménagères. Les critères de tri des déchets et de maturation du compost sont fondamentaux, mais la filière déjà pratiquée de façon artisanale (Nyama-nyama) mériterait d’être développée.

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Egypte

Les cochons et les déchets en Egypte

En avril, l’Egypte a fait abattre tous les cochons (Tuez-les-tous-…-les-cochons) du pays. 300000: c’est le nombre d’animaux qui ont été tués, alors que se déclenchait l’épidémie mondiale de grippe A (H1N1). Et pas toujours de façon “humaine”, comme l’ont montré certaines vidéos. L’objectif absurde de cette décision était d’empêcher le développement de la maladie, alors que le cochon n’est pour rien dans sa transmission.

Les effets de cette décision sont inattendus et amènent l’Egypte à s’interroger et à se demander si elle a eu raison.

Ce n’est pas la douleur de la minorité copte agressée dans ses pratiques alimentaires et ses traditions culturelles qui est à l’origine de cette interrogation.

Ce n’est pas non plus la forte réprobation internationale, qui en est restée à des déclarations de principe sur l’inutilité d’une telle décision.

C’est un peu le fait que malgré toutes ces “précautions”, la grippe A est bel et bien entrée en Egypte et qu’elle y a déjà fait des victimes. C’était pourtant prévisible.

C’est surtout le fait d’une incroyable situation sanitaire caractérisée par des amoncellements d’ordures en plein centre ville du Caire et de nombre de grandes villes. Les déchets s’entassent, pourrissent, dégagent d’insupportables odeurs. Dans la quasi totalité des zones urbaines égyptiennes (sauf Alexandrie), les services de collecte et de traitement des ordures sont presque inexistants. Mais, au Caire, les cochons élevés par les chrétiens égyptiens (coptes) avaient pour mission de se nourrir et d’engraisser en mangeant la partie fermentescible des ordures ménagères: déchets verts, déchets de cuisine, reliefs des restaurants, déchets des marchés publics, … Cette partie fermentescible représente 50 à 60 % des déchets en volume.

Les cochons ne mangent plus rien et dans le quartier de Muqqatam, les  »zabbaleen » (récupérateurs et trieurs de déchets), pratiquement tous coptes, ne parviennent plus à trier les déchets. La partie fermentescible pourrit dans leur quartier et les empêche de récupérer de façon efficace les autres parties recyclables: plastique, papier, carton, métal, …

Les cochons n’engraissent plus et les familles des  »zabbaleen » n’ont plus ni ce bénéfice alimentaire, ni cette source de revenus. Cela n’est plus.

Bien sûr, d’aucuns disent que puisque l’état les a mis dans cette « merde », au sens propre (!) du terme, c’est à lui de les en sortir. Mais c’est mal connaître l’homogénéité, la réactivité et la volonté de cette communauté qui, d’ores et déjà, se tourne vers les producteurs de déchets, les familles, les citadins, les ménages, pour les inciter à faire le tri de leurs déchets à la source. Cela permettra aux  »zabbaleen » d’orienter plus rapidement les diverses catégories de déchets vers les circuits de recyclage adéquat, notamment les fermentescibles vers la fabrication de compost.

La partie n’est pas gagnée, loin de là, mais d’une énorme faute politique naîtra peut-être une évolution originale en matière d’assainissement des villes des pays en voie de développement, une alternative viable à la mise en place de prestataires étrangers.

Pour en savoir davantage sur les  »zabbaleen », voici les références de deux films, ni l’un ni l’autre diffusés en Europe (sauf erreur) et de leurs sites respectifs: “Garbage Dreams (http://www.garbagedreams.com/) ” (photos sur Flickr (http://www.flickr.com/photos/garbagedreams/), remarqué par Al Gore et “Marina of the Zabbaleen (http://www.marinathemovie.com/)“.

(C)Garbage Dreams
Rue de Muqqatam (C)Garbage Dreams