En avril dernier, dans le cadre d’un post relatif au 50° anniversaire des indépendances africaines (Cinquante-ans-d-indépendances), il était fait mention du peu d’empressement des médias à s’emparer du sujet. C’est pourquoi il est important de souligner la série diffusée actuellement sur la 5: Afrique(s): une autre histoire du XX° siècle (http://documentaires.france5.fr/series/afriques-une-autre-histoire-du-20e-siecle). Deux volets ont déjà été diffusés, le premier traitant de la période coloniale et le second du vaste mouvement d’indépendance fortement marqué par une solidarité avec les pays marxistes.
Les deux prochains épisodes seront diffusés dimanche 24 et dimanche 31 octobre. Ils traiteront du “règne des partis uniques” jusqu’à la fin de la décennie 90 et des “aventures chaotiques de la démocratie” entre1990 et 2010.
Il est trop tôt pour juger du contenu global de cette série et notamment de la manière dont sera présenté le rôle actuel des anciennes puissances tutélaires (françafrique, et autres …), mais les deux premiers volets de cette série laissent augurer d’une attitude à la fois critique et constructive, même si certains hommes ont été purement passés sous silence. C’est le cas de Modibo Keita, par exemple, dont on peut espérer que l’épisode de dimanche prochain n’en retiendra pas uniquement l’aspect “parti unique” et “erreur économique” …
Selon le site de France 5, cette série sera rediffusée nuitamment à partir du 1er novembre et elle sera distribuée (DVD) par l’INA à dater du 2 novembre.
« Tant que les lions n’auront pas leurs propres historiens, les histoires de chasse continueront de glorifier le chasseur » (proverbe africain mis en exergue de cette série).
L’information est pour le moins “curieuse” et assez “choquante” ! La Chine vient d’offrir au Mali un cadeau d’anniversaire (Cinquante-ans-d-indépendances) constitué de 50 limousines de haut luxe Hong Qi 3, ce qui se traduit par “Drapeau Rouge”.
Un premier lot, estimé à 822 millions de francs CFA, constitué de 20 voitures, a été réceptionné ce 17 septembre. Soit 41 millions de FCFA par voiture, soit 62500 € !
Ces voitures, qui participeront dans cinq jours aux cérémonies d’anniversaire, ont fait, selon l’ambassadeur de Chine au Mali, « l’objet d’une commande spéciale destinée à répondre aux besoins du Mali ».
Qui a passé cette “commande spéciale” ? Le Mali ? ou la Chine ? S’il s’agit de la Chine, est-ce vraiment une « commande », est-ce vraiment un « cadeau » quand on sait que le pays a vendu … ONZE véhicules (http://www.leblogauto.com/2007/12/hong-qi-3.html) de ce type depuis janvier 2010. Il faut dire qu’il les vend 1280000 yuan soit 145000 € l’un ! Quoi qu’il en soit, si la Chine a de l’argent à offrir, elle pourrait choisir ses cadeaux avec un peu plus d’à-propos et évaluer de façon plus précise les « besoins » du Mali.
S’il s’agit du Mali, il n’est pas dans mes projets de lui reprocher de choisir des voitures de parade comme cadeau (mais 50 ??!!). On peut se demander cependant s’il n’eut pas été préférable que le Mali sollicite la Chine pour se voir offrir des véhicules plus modestes, plus utilitaires, et moins gourmands. Des véhicules électriques, par exemple, ou hybrides …
Tout le monde y aurait gagné: le Mali en simplicité, la Chine en savoir-faire et l’environnement en CO2 non rejeté et en pétrole non consommé.
A la fin d’un été pourri, au cours duquel la France, mais aussi les USA, mais aussi Israël, et tant d’autres pays “occidentaux” encore, se singularisent dans leurs luttes contre les immigrants, pourquoi ne pas faire part de deux dépêches, peu publiées et donc peu commentées, qui témoignent que rien ne change ?
« Douze ressortissants africains, candidats à l’émigration clandestine en Europe, sont morts de soif dans le désert algérien. D’après les deux survivants, dont le chauffeur, qui sont parvenus à revenir au Nord-Mali, leur camion est tombé en panne entre la frontière algérienne et la ville de Tamanrasset, et ils se sont vite retrouvés à court d’eau et de nourriture. »
»Les personnes décédées étaient trois Camerounais, trois Maliens, deux Ivoiriens, deux Sénégalais, un Gambien et un Guinéen. »
»Selon les deux survivants, le groupe a quitté la ville malienne de Kidal à destination de l’Algérie où ils sont entrés illégalement. Entre la frontière algéro-malienne et la ville de Tamanrasset, le camion est tombé en panne en plein désert. »
« Privées d’eau et de nourriture, à bout de force, douze personnes n’ont pas survécu à ce périple dans le désert a raconté Ahmed, un chauffeur-transporteur de clandestins, très connu dans le milieu entre le Mali et l’Algérie. »
»Malgré les risques permanents de faim, de soif et d’agression, le trajet entre le nord du Mali et l’Algérie reste l’une des routes les plus prisées par les candidats à l’émigration clandestine vers l’Europe. »
»Mamadou Diakité, président de l’Association des initiatives de développement au Mali, une association qui vient en aide aux migrants africains à Bamako, et les sensibilise aux difficultés du voyage vers l’Europe estime qu’il y a eu « un relâchement dans les activités de prévention et qu’il faut offrir une alternative crédible à ceux qui prennent le risque de partir ».
« Six migrants érythréens ont été tués le 13 août à la frontière israélo-égyptienne alors qu’ils tentaient de rallier Israël. Quatre d’entre eux sont tombés sous les balles des passeurs et deux autres ont été tués par la police égyptienne. Ces décès portent à 28 le nombre de migrants tués depuis le début de l’année dans cette zone, théâtre de violences. La plupart des victimes viennent du Soudan, d’Ethiopie, d’Erythrée, et 24 d’entre elles ont été abattues par la police égyptienne. »
»Depuis un peu plus d’un an les Erythréens constituent le principal flux de l’exode vers la Terre promise. Leur odyssée commence dans la très instable Corne de l’Afrique. Après un passage relativement facile vers l’est du Soudan, les migrants recourent aux services de la tribu des Alrachayda, qui les casent dans des camps au nord du Soudan avant de leur faire traverser la frontière égyptienne. »
»C’est ensuite sept cents kilomètres de sentiers montagneux pour parvenir aux abords du canal de Suez. A partir de là, ce sont les bédouins du Sinaï, notamment des membres de la tribu des Altarabin, qui prennent la relève. »
»Les migrants sont cachés au milieu de campements nomades en attendant l’instant propice pour traverser la frontière israélienne. Souvent, alors que l’on est en vue de la frontière, les passeurs réclament un bonus à rajouter aux 1500 dollars que les migrants ont déjà déboursés. Ceux qui ne réussissent pas à régler sont gardés en otage en attendant que leur famille ou leurs proches payent. »
»Enfin c’est la traversée risquée des barbelés, une traversée qui depuis le début de l’année, a coûté la vie à 28 migrants. »
Sous le titre général de « Bamako World Wide », Carine Fouteau a publié récemment sur Médiapart une série d’articles consacrée aux migrations maliennes et surtout au dramatique devenir de ces migrants.
En quelques mots, le cadre est tracé: la faiblesse des revenus (36% des habitants vivent avec moins de 1 dollar par jour), ajoutée aux aléas du climat et à l’explosion démographique (13,7 M d’habitants aujourd’hui, 40 millions en 2050 ??) fait que les maliens, déjà traditionnellement enclins à la migration, partent encore plus nombreux.
C’est ainsi que les commerçants préfèrent le voyage sud-sud, notamment avec Dubaï ou l’Arabie Saoudite. Un bilan de la BCEAO indiquerait que la part des exportations vers l’Europe serait tombée de 83,5% en 2002 à 5,6% en 2006. Que valent ces chiffres stupéfiants qui n’ont de valeur que s’ils sont rapportés au volume d’affaires. Le dernier rapport connu des comptes extérieurs du Mali (09/04/2010) précise que les exportations ont atteint 935 milliards de Francs CFA en 2008, dont 70% pour l’or, 10% pour le coton et 5,5% pour les animaux vivants. Les zones destinataires de ces exportations étaient l’Afrique pour 86,7%, l’Asie pour 7% et l’Europe pour 5%. D’où il ressort que des chiffres incomplets ne peuvent rien signifier ! Quant au reste du commerce dont parle l’article, il relève avant tout des importations. D’une part sous la forme d’une activité qui échappe à tout contrôle et à toute réglementation, aussi bien à la sortie d’Arabie Saoudite qu’à l’entrée au Mali. D’autre part, dans le cadre d’un commerce unilatéral consistant en l’importation de matériels ou de pièces détachées d’origine chinoise via Dubaï ou Charjah. Cette “mondialisation par le bas” comme l’appelle l’auteure n’est en fait qu’un aspect de la mondialisation tout court.
L’article suivant aborde le choix des étudiants qui préfèrent poursuivre leurs études aux USA plutôt qu’en France. A n’en pas douter, il s’agit là de la conséquence de deux mouvements. Le premier est la volonté des élites africaines issues des classes supérieures de s’exprimer en anglais et de s’orienter vers des professions dites d’avenir: informatique, économie, … Le second est à chercher dans les très mauvaises conditions d’attribution des visas par la France, conditions qui ne peuvent que jouer un rôle d’épouvantail. « L’état des lieux des relations diplomatiques entre le Mali et la France est désastreux ». Et la dernière incursion de l’armée française au Nord Mali, sans en avoir prévenu ATT et sans son accord, ne va pas arranger les choses.
De tels faits sont bien plus graves qu’un discours encore une fois cité dans ces articles, celui de Dakar. Il a pu certes heurter quelques intellectuels, sans doute avec raison. Mais il est impensable d’accuser ce discours d’être raciste. Il n’est en fait qu’une imagerie datée, traditionnelle et paternaliste de l’Afrique. C’est un discours vieux de plusieurs dizaines d’années. C’est en fait une manière de dire que l’Afrique n’a pas pris le train de la mondialisation. Pourtant, d’autres tiennent, sans s’en rendre compte, le même discours. A commencer par les écolos radicaux, tenant de le décroissance, qui veulent vouer l’Afrique à un développement agricole auto-centré. A continuer par les milliers d’associations charitables qui consacrent leur quelques sous, en toute bonne foi, à l’apprentissage de la langue française, à la récupération et au recyclage de matières diverses, bref à l’acceptation d’une vie faite de misère et de soumission …
La série des articles s’oriente alors vers le descriptif apocalyptique des conditions d’expulsion des maliens, des ghanéens, des tchadiens ou nigériens depuis la Libye. Le postulat de départ est qu’ainsi la Libye répond favorablement aux attentes des pays européens avec lesquels elle a normalisé ses relations.Elle se comporte comme un “chien de garde” de l’Europe.Tout comme l’Algérie, le Maroc, la Tunisie ou la Mauritanie.
Outre que cette affirmation très “politique” fait peu de cas de l’identité de chacun de ces pays, elle s’appuie sur une affirmation “erronée”. Tous les maliens expulsés de Libye déclarent s’y être rendus pour y travailler ! Ont-ils le choix de dire autre chose lorsqu’ils sont emprisonnés et battus ? La vérité est qu’ils sont en Libye (ou en Algérie, ou au Maroc, …) pour rejoindre l’Eldorado européen. Et qu’ils sont des centaines chaque jour à grossir le flux. Ils ne viennent pas pour travailler en Libye, car cela relève d’une insupportable soumission envers les arabes. La migration africaine des maliens se fait avant tout vers le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Nigeria, le Burkina Faso, … elle ne se fait pas vers le Maghreb.
En lieu et place de développer une thèse fausse, il serait sans doute plus constructif de comprendre l’émigration des Africains, de comprendre la difficulté à les recevoir de la part de pays comme le Niger ou le Maghreb, de favoriser une meilleure circulation des gens, des richesses et des talents là-bas comme ici chez nous.
Très curieusement, et comme en écho avec la volonté des étudiants maliens d’aller poursuivre leurs études aux Etats-Unis, la série d’articles s’achève par l’expulsion d’une malienne depuis l’état de l’Ohio. Les titres de la presse d’aujourd’hui nous apprennent que les républicains veulent faire de la lutte contre l’émigration leur prochain cheval de bataille. Les hispaniques sont visés en priorité, certes, mais un jour viendra où les noirs non américains seront inquiétés à leur tour.
En conclusion, la série est intéressante, très intéressante, mais trop souvent construites sur des idées préconçues, alimentant la désormais traditionnelle opposition entre tenants d’un contrôle dur de l’immigration et partisans d’un humanisme qui ne solutionne rien.
Ce sont 200 nouveaux émigrants qui arrivent chaque jour à Agadès, au Niger. Certains restent, certains repartent, certains reviennent, certains disparaissent, … Les passeurs font leurs affaires et les bandits de tous ordres ont organisé le “marché”.
Le Niger, c’est aussi le pays où Michel Germaneau a été capturé et où il est probablement mort de maladie et de grand âge. L’équipée franco-mauritanienne, à visée de reconnaissance, a donné l’occasion aux ravisseurs d’annoncer une exécution pour venger cette expédition. Il est sans doute plus facile d’annoncer une “vengeance” que de reconnaître que l’otage est décédé de mauvais soins ou d’absence de soins dans les mains de ses ravisseurs. A l’appui de cette thèse, l’absence de revendication publique et officielle et l’ignorance complète dans laquelle se trouvaient les “intermédiaires négociateurs” maliens.
Alors, faire la guerre à AQMI ne résoudra rien. Et Nicolas Sarkozy serait mieux inspiré de faire la guerre à la pauvreté en Afrique, de faire la guerre pour le développement de l’Afrique. C’est facile (ou presque). Il lui suffit de réduire la dette de ces pays, de donner sa part du PIB promises dans le cadre du Millénaire pour le Développement, d’appeler l’Europe à ses cotés, de favoriser des initiatives locales d’associations ou d’entrepreneurs locaux et de confier le contrôle de ces actions à des organismes internationaux comme l’UNESCO, l’UNICEF, la FAO, le BIT, l’OMS, l’ONU, et d’autres encore, en fonction de la nature du projet.
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