Catégories
Ecologie

Des suisses, du coton bio et du compost

Si ce n’était le coté xénophobe, démagogique, égoïste et islamophobe de la votation suisse contre les minarets, on serait tenté de rappeler que, de 1536 à 1810, les protestants ont interdit la construction de lieux de culte catholiques dans le canton de Vaud. Et que ce n’est qu’en 1832 que les catholiques de Lausanne ont eu le droit d’édifier un clocher. Il y a donc des précédents !!

Parlons donc d’un aspect plus intéressant des suisses, et de gens qui ne sont probablement pas ceux qui ont voté OUI ce dimanche. Il existe dans ce pays une ONG nommée Helvetas (http://www.helvetas.org/wFrancais/index.asp), dont la devise est « Agir pour un monde meilleur ». Elle a été créée en 1955 et compte plusieurs dizaines de milliers d’adhérents. Son objectif principal est “la réalisation de projets de développement à l’étranger”.

L’étranger, c’est l’Afrique, l’Asie, l’Amérique Latine. Les projets se regroupent en quatre catégories: les infrastructures en milieu rural, la gestion durable des ressources naturelles, la formation et la culture, la société civile et l’état.

Les pays dans lesquels intervient Helvetas sont le Guatemala, le Honduras, Haïti, le Sénégal, le Mali, le Burkina Faso, le Bénin, l’Ethiopie, la Tanzanie, le Mozambique, l’Afghanistan, le Bhoutan, le Kirghizistan, le Laos, le Népal, le Sri Lanka, le Vietnam.

Parlons un peu du Mali. Helvetas s’y engage dans le domaine de la distribution de l’eau, de la formation (enseignement primaire en particulier pour les filles), de la production agricole et de la sensibilisation à l’éradication des mutilations génitales féminines. Par ailleurs, Helvetas a créé à Bamako une école de formation en photographie.

Dans le domaine agricole, le coton biologique est une priorité. En 2007, les producteurs maliens organisés sous l’égide d’Helvetas, ont produit 1300 tonnes d’un coton graines acheté par les firmes Migros et Switcher afin d’en faire des vêtements ou de la ouate labellisés Max Havelaar. En 2008, ce sont 5500 producteurs qui se sont engagés dans cette culture avec une production de 2000 tonnes de coton graines. La région Bretagne a signé un accord d’achat de 3000 tonnes jusqu’en 2010. L’égrenage du coton se fera en Afrique, le filage à Fès au Maroc et le tissage à Laval, en France. Quatre entreprises bretonnes en font des vêtements.

Boules de coton

L’intérêt pour la fabrication de coton bio est évident, puisque le prix d’achat est supérieur de 50% à celui du coton traditionnel. Pour être bio, le coton doit être cultivé sans pesticides et engrais de synthèse, ces derniers étant remplacés par du fumier ou du compost. Le repos et la fertilité des sols sont assurés par une rotation des cultures, en particulier avec des légumineuses.

Malheureusement le coton bio, c’est bien beau, mais ça reste et ça restera probablement longtemps encore très marginal.

Production de coton bio de l’Afrique de l’Ouest (Mali, Burkina, …) en 2008: 2 900 tonnes, soit le double de la production de 2007.

Production mondiale de coton bio en 2008: 145 000 tonnes.

Production mondiale de coton en 2008: 26 500 000 tonnes.

La production de coton bio de l’Afrique de l’Ouest représente 0,01% de la production mondiale de coton !

C’est pourquoi Helvetas, sans abandonner la filière coton, s’oriente désormais vers l’agriculture biologique, le maraîchage biologique, en reprenant les mêmes concepts que ceux de la culture du coton, c’est à dire la production de matière organique (compost), le conseil agricole, le soutien à la production de tomates, oignons, aubergines, …, la mise en place d’une labellisation ou certification des produits. Il s’agit, ni plus ni moins, de poursuivre l’action pour améliorer les conditions de vie en milieu rural, en satisfaisant les besoins maraîchers des marchés nationaux, régionaux, voire internationaux.

Un détail intéressant dans cette démarche: celui de la fabrication du compost. Dans les zones rurales, les déchets végétaux (plants arrachés, feuilles, branches, …) sont nombreux et peuvent satisfaire en grande partie la fabrication d’un compost de qualité. Dans la zone périphérique de Bamako où nombreux sont les maraîchers, il devrait être possible de fabriquer un compost avec la partie fermentescible des ordures ménagères. Les critères de tri des déchets et de maturation du compost sont fondamentaux, mais la filière déjà pratiquée de façon artisanale (Nyama-nyama) mériterait d’être développée.

Catégories
Egypte

Les cochons et les déchets en Egypte

En avril, l’Egypte a fait abattre tous les cochons (Tuez-les-tous-…-les-cochons) du pays. 300000: c’est le nombre d’animaux qui ont été tués, alors que se déclenchait l’épidémie mondiale de grippe A (H1N1). Et pas toujours de façon “humaine”, comme l’ont montré certaines vidéos. L’objectif absurde de cette décision était d’empêcher le développement de la maladie, alors que le cochon n’est pour rien dans sa transmission.

Les effets de cette décision sont inattendus et amènent l’Egypte à s’interroger et à se demander si elle a eu raison.

Ce n’est pas la douleur de la minorité copte agressée dans ses pratiques alimentaires et ses traditions culturelles qui est à l’origine de cette interrogation.

Ce n’est pas non plus la forte réprobation internationale, qui en est restée à des déclarations de principe sur l’inutilité d’une telle décision.

C’est un peu le fait que malgré toutes ces “précautions”, la grippe A est bel et bien entrée en Egypte et qu’elle y a déjà fait des victimes. C’était pourtant prévisible.

C’est surtout le fait d’une incroyable situation sanitaire caractérisée par des amoncellements d’ordures en plein centre ville du Caire et de nombre de grandes villes. Les déchets s’entassent, pourrissent, dégagent d’insupportables odeurs. Dans la quasi totalité des zones urbaines égyptiennes (sauf Alexandrie), les services de collecte et de traitement des ordures sont presque inexistants. Mais, au Caire, les cochons élevés par les chrétiens égyptiens (coptes) avaient pour mission de se nourrir et d’engraisser en mangeant la partie fermentescible des ordures ménagères: déchets verts, déchets de cuisine, reliefs des restaurants, déchets des marchés publics, … Cette partie fermentescible représente 50 à 60 % des déchets en volume.

Les cochons ne mangent plus rien et dans le quartier de Muqqatam, les  »zabbaleen » (récupérateurs et trieurs de déchets), pratiquement tous coptes, ne parviennent plus à trier les déchets. La partie fermentescible pourrit dans leur quartier et les empêche de récupérer de façon efficace les autres parties recyclables: plastique, papier, carton, métal, …

Les cochons n’engraissent plus et les familles des  »zabbaleen » n’ont plus ni ce bénéfice alimentaire, ni cette source de revenus. Cela n’est plus.

Bien sûr, d’aucuns disent que puisque l’état les a mis dans cette « merde », au sens propre (!) du terme, c’est à lui de les en sortir. Mais c’est mal connaître l’homogénéité, la réactivité et la volonté de cette communauté qui, d’ores et déjà, se tourne vers les producteurs de déchets, les familles, les citadins, les ménages, pour les inciter à faire le tri de leurs déchets à la source. Cela permettra aux  »zabbaleen » d’orienter plus rapidement les diverses catégories de déchets vers les circuits de recyclage adéquat, notamment les fermentescibles vers la fabrication de compost.

La partie n’est pas gagnée, loin de là, mais d’une énorme faute politique naîtra peut-être une évolution originale en matière d’assainissement des villes des pays en voie de développement, une alternative viable à la mise en place de prestataires étrangers.

Pour en savoir davantage sur les  »zabbaleen », voici les références de deux films, ni l’un ni l’autre diffusés en Europe (sauf erreur) et de leurs sites respectifs: “Garbage Dreams (http://www.garbagedreams.com/) ” (photos sur Flickr (http://www.flickr.com/photos/garbagedreams/), remarqué par Al Gore et “Marina of the Zabbaleen (http://www.marinathemovie.com/)“.

(C)Garbage Dreams
Rue de Muqqatam (C)Garbage Dreams
Catégories
Déchets

Déchets: le parler vrai

A quel titre parle t’il de ceci ?, va t’on demander très rapidement ! Pour répondre brièvement: parce que vingt ans de notre carrière professionnelle se sont déroulés dans le métier des déchets et pour être encore plus précis: 12 ans en tant que Directeur d’une agence chargée de la collecte, du transport et du traitement de déchets d’activités de soins (déchets hospitaliers et similaires), 2 ans en Alexandrie dans le cadre de la mise en œuvre d’un marché de balayage, collecte des déchets, compostage et mise en décharge, 5 ans comme responsable régional prévention et sécurité. Tout cela ne fait certes pas un expert…

Deux nouvelles m’ont fait réagir cette semaine. La première concerne le projet de Centre d’Enfouissement des Chambarands (38) destiné à des ordures ménagères et des gravats inertes. Les responsables politiques du Département de l’Isère avaient initialement donné un accord sur ce projet. Face à une levée de boucliers locale, ils ont tous reculé et fait adopter des vœux par leurs conseils municipaux s’opposant à la création de cette décharge. Or, les arguments invoqués par les opposants n’avaient pas plus de bien-fondé qu’à l’ordinaire dans ce genre de dossier: suspicion de rupture de membrane entraînant une contamination des eaux souterraines, passage fréquent des véhicules poids lourd assurant le transport des déchets, risque d’incendie par dissémination des étincelles de combustion du biogaz (!), … Or, voici que nous apprenons que le Groupe Pierre et Vacances retiendrai cette région, après longue négociation, pour y édifier son prochain Center Park !

Ceci explique cela ! Mais l’honnêteté intellectuelle aurait dû faire privilégier une explication franche en disant que la région faisait le pari économique du tourisme et qu’un centre d’enfouissement serait le malvenu. Car, à l’issue d’un tel scénario, il reste toujours une décharge à caser quelque part et des gens qui, pour s’y opposer dans leur canton, raconteront des … bêtises.

La seconde information concerne la conséquence des feux domestiques (c.a.d la combustion du bois, des feuilles et des branchages dans les cheminées des particuliers, les jardins et les champs) sur la pollution hivernale en Europe. Trois études (Le Monde du 13/12/2007) concluent que ces feux sont responsables de 50% à 70% des émissions d’aérosols carbonés en Europe, et que ces particules représentent 60% des polluants en suspension dans l’atmosphère. En calculant bien, cela signifie que 30% à 42% des polluants de l’atmosphère européenne proviennent des feux domestiques !!

Voilà une affirmation nouvelle, quand bien même les premières études datent de 2001. Jusqu’à présent, le chauffage au bois reste entouré d’un halo prestigieux de procédé “naturel”, “propre”, “sans déchet” et “renouvelable” !

Il reste encore un effort à fournir: celui de dire haut et fort que la combustion du bois produit des dioxines (feu de cheminé, barbecue, incendie de forêt ou chaufferie au bois) et qu’il sera sans doute nécessaire de renforcer la prévention si la filière bois doit encore se développer.

Pour terminer, je place sur mon site web ([http://briselet.jean.perso.neuf.fr/index.html|http://briselet.jean.perso.neuf.fr/index.html] ) une contribution intitulée “La sécurité dans les déchèteries”. En effet, alors qu’il existe plus de 3000 déchèteries en France, celles-ci sont trop souvent le théâtre d’accidents du travail graves (voire mortels) ainsi que d’accidents concernant les usagers. Ces espaces sont également des zones de non-droit caractérisées par les visites nocturnes, les exactions, les destructions de bâtiments, … De tout ceci, on n’entend jamais parler.

NB: Ce site perso est fermé depuis 2016 …