Vingt ans, trente ans, un peu plus, un peu moins, en 1940 et dans les années qui suivent … De quelles informations disposez-vous ? Comment étayer votre jugement, votre prise de position, votre comportement ? Cette question, vous l’êtes-vous déjà posée ? Si j’avais eu vingt ans en 39, qu’est-ce que j’aurai fait ?
Le travail qui vous est proposé par le biais de cet article est original car il consiste à livrer un recueil, au jour le jour, de tous les faits auxquels n’importe quel citoyen de Saint-Marcellin (Isère), ou des environs proches, pouvait théoriquement avoir accès entre 1939 et 1946.
Sont ainsi rassemblés
les évènements internationaux, nationaux ou locaux ayant joué un rôle dans l’actualité,
les informations fournies par les organes de presse: « Le Journal de Saint-Marcellin« , « Le Cri de la Vallée« , « Le Petit Dauphinois« ,
les informations collectées par le « Groupe Rempart« , dont une sélection a été publiée dans le magazine municipal de Saint-Marcellin, « Trait d’Union« , entre décembre 2011 et décembre 2015,
les faits et évènements relatés par les ouvrages de référence ayant abordé la période de la Résistance en Isère,
les Archives Départementales de l’Isère,
les compte-rendus des séances du Conseil Municipal des villes de Saint-Marcellin et de Vinay.
Il manque à ce travail les documents, journaux ou affiches clandestins qui ont pu être diffusés au cours de cette période. De même que sont absents les tracts, consignes, affiches distribués ou affichés par les organes collaborant ouvertement avec les forces d’occupation.
Parmi les spécificités de ce travail, se trouve une série de notes explicatives permettant de mieux comprendre la signification de certains évènements. Cela se traduit par la découverte de quelques précisions concernant des personnages parfois un peu oubliés dans notre histoire locale, entre autres:
Wilhelm Münzenberg, militant communiste radicalement opposé à Staline, probablement assassiné dans un bois de la commune de Montagne,
Le docteur Léon Dupré, organisateur de la Résistance dans notre région, aux cotés de Victor Carrier et Gaston Valois. Maire de Vinay, il subit une tentative d’assassinat en novembre 1943.
Julien Sagot, antonin d’adoption, qui déclare avoir éliminé le dénonciateur du maire de Saint-Antoine: Ferdinand Gilibert. Interné à Buchenwald, il devient le bras droit de Pierre Sudreau, organisateur de la Résistance au sein de ce camp et futur ministre en 1962.
Serge Felix-Griat, originaire de Presles, responsable du Groupe Franc de Saint-Marcellin, notamment après l’assassinat de Victor Carrier.
Charles Monnard, assureur à Saint-Marcellin, présenté comme ayant trahi la Résistance et étant à l’origine de l’arrestation, suivie de son décès, de Jean Rony. Jugé à la Libération, il est acquitté et s’engage dans l’Armée d’Orient. Il meurt sur la navire le ramenant en France et est reconnu comme Mort pour la France.
Ce texte de plus de 100 pages ne peut, évidemment, pas être publié dans le cadre de ce blog. Cependant, vous pouvez le télécharger ici. Les très nombreuses références et les contributeurs ayant participé à sa rédaction sont cités en fin de document.
Le travail de rédaction de cet éphéméride a débuté voici deux années pleines, en 2022. Plusieurs versions se sont suivies, chacune visant à compléter la précédente. Il est donc inutile de conserver les versions antérieures, ce blog étant régulièrement mis à jour. La copie, voire la diffusion de ce document, totale ou partielle, est autorisée. Cependant, l’auteur désire que les références en soient précisées systématiquement, à savoir:
Titre: Les années de guerre 1939-1946 à Saint-Marcellin et environs (Isère) – Ephéméride
Auteur: Jean BRISELET
Adresse du fichier: https://thermopyles.info/wp-content/uploads/2024/09/Les-annees-de-guerre-1939-1946-a-Saint-Marcellin-et-environs-Ephemeride.pdf
Toujours est-il que le maire de Saint-Marcellin, Louis Ferrouillat, annonce à son Conseil Municipal, le 21 novembre 1991, que les exploitants du cinéma, propriétaires du fonds, M. et Mme Marguin, cesseront leur activité à dater de début 1992. La Ville de Saint-Marcellin décide d’acquérir le fonds. (7)
A la vérité, les choses étaient déjà bien engagées puisque les Domaines avaient formulé leur avis quant à la valeur du fonds le 18 novembre 1991, à savoir 745 000 francs.
Afin de couvrir au mieux cette somme, la municipalité recherche des subventions auprès du CNC et du Département. Par décision du 9 janvier 1992, le CNC accorde 200 000 francs.
Le 15 janvier 1992, l’acte d’acquisition de ce fonds est signé devant Me Guiliani, notaire, entre la Société d’Exploitation Cinématographique Léone Marguin et la Commune de Saint-Marcellin, pour un montant de 826 000 francs. L’acte stipule que la commune en a la jouissance à dater du 29 janvier 1992.
Le 23 septembre 1992, l’Agence pour le Développement Régional du Cinéma accorde 200 000 francs pour l’acquisition du fonds de commerce. Et le 15 décembre 1992, c’est au tour du Conseil Général de l’Isère d’accorder 186 250 francs pour le même motif.
Sans attendre confirmation des capacités de financement, le Conseil Municipal de Saint-Marcellin, réuni le 27 janvier 1992, décide de placer l’exploitation de ce cinéma sous le statut de la location-gérance. L’exploitation du cinéma « Les Méliès » est ainsi transférée vers M. Jean-Michel Nabert, SIREN 323 258 640, par acte en date du 31 janvier 1992. (8) (JB). Le loyer convenu avec la commune est de 39 849 francs TTC par an. Jean-Michel Nabert paye par ailleurs le loyer des locaux à Jean-Yves Crouzet pour un montant mensuel de 4658 francs, montant précisé dans le bail de location entre Jean-Yves Crouzet et la commune de Saint-Marcellin, bail renouvelé le 5 février 1992. Tout cela est annoncé par un communiqué publié le 8 février 1992 dans « Le Mémorial » N° 2306.
Le 16 novembre 1993, le Conseil Municipal décide de solliciter le CNC pour une subvention destinée à doter le cinéma d’un matériel de sonorisation Dolby Stéréo. Cette demande n’est effectuée que le 19 mai 1994. Elle ne semble pas avoir été mise à exécution.
D’autant plus que, dans le même temps, « Les Méliès » traversent une zone de grande turbulence. (9) Jean-Michel Nabert ne règle pas ses loyers à Jean-Yves Crouzet. Le percepteur fait savoir qu’il en est de même pour ses obligations fiscales.
Jean-Yves Crouzet s’élève contre la pose d’immenses panneaux publicitaires sur la façade du cinéma sans son accord, ce qui conduit à des échanges musclés entre lui-même et Louis Ferrouillat, maire, de juin 1993 à janvier 1994. Le 18 mars 1994, le Chef de Service du Département de l’Architecture (Jean-Louis Boubert) demande le retrait immédiat de ces panneaux. Devant l’absence d’exécution, il dépose plainte le 10 janvier 1995 pour dégradation de la façade.
En 1995, lors du changement de municipalité et l’élection de Jean-Michel Revol en tant que maire, les choses s’accélèrent. Au 1er septembre 1995, les dettes de Jean-Michel Nabert auprès de Jean-Yves Crouzet s’élèvent à 28 949,65 francs. La liquidation judiciaire est prononcée le 1er décembre 1995. Le contrat de location-gérance est résilié.
Dans le « Mémorial » N° 2504, en date du 8 décembre 1995, aucune publicité ne figure quant à la programmation du cinéma. Le N° 2506, en date du 22 décembre 1995, comporte le message suivant : « Depuis plusieurs semaines, la municipalité s’efforce de trouver une solution durable pour maintenir ouvert le cinéma « Les Méliès ». Après les difficultés financières et la liquidation judiciaire (à titre personnel) du gérant, puis les travaux de révision du matériel annoncés la semaine dernière dans nos colonnes, la commune (qui est propriétaire du fonds) se trouve face à l’impossibilité administrative de pouvoir tenir le rôle de gérant d’une activité commerciale, même à titre provisoire. La programmation est reportée au mois de janvier, après le choix du nouveau gérant parmi de nombreuses candidatures déjà à l’étude. »
Par ailleurs, il est demandé à Jean-Michel Nabert de libérer les locaux du patrimoine communal sis au 2 boulevard Riondel, locaux qu’il occupe sans autorisation.
VI – La renaissance des Méliès
Laissons la parole à Nina Crouzet qui recueille les propos de Lydie Ratajczyk, actuelle exploitante du cinéma « Les Méliès ».
« À la fermeture du cinéma, le maire de Saint-Marcellin, Jean-Michel Revol, s’adressa à l’Agence Nationale pour le Développement du Cinéma en Régions (ADRC) de Grenoble, qui a pour mission de permettre un plus grand accès aux films et de subventionner les rénovations des cinémas de la région Auvergne Rhône-Alpes, ceci afin de trouver des solutions pour sauver de l’oubli l’unique salle de cinéma de la ville.
« C’est Lydie Ratajczyk, qui travaille encore aujourd’hui pour l’ADRC, qui étudie le dossier des Méliès. Touchée par l’histoire sans suite de ce cinéma, elle prit une décision inopinée qui marquera et assurera par la suite la renaissance de la salle et sa pérennité actuelle : devenir, avec son mari, les nouveaux exploitants de la salle. Pour cela, ils prennent de grandes initiatives : M. Ratajczyk, alors néophyte du domaine cinématographique, se forme comme projectionniste et le couple déménage sur Saint-Marcellin. “Il s’agissait de vivre avec le cinéma, de vivre avec les habitants de Saint-Marcellin…. Je n’imaginais pas autrement pour reprendre ce cinéma : il fallait créer un vrai lien social. » (NC)
L’exploitation du cinéma « Les Méliès », qui se fait sous la forme de location-gérance à partir du 1er février 1996, est effective le 13 février 1996. C’est M. Frédéric RATAJCZYK, immatriculé le 10 juillet 1997, sous le SIREN 407 687 615, qui en est le titulaire. Le cinéma est donc resté inactif pendant deux bons mois.
En fin d’année 1994, ont été tournées à Saint-Antoine de nombreuses scènes d’un film qui sortira en 1996, initialement baptisé « Le Sagard », mais finalement produit sous le nom de « Le Montreur de Boxe », et dont le réalisateur est Dominique Ladoge et les principaux comédiens Richard Bohringer, Karl Makinen, Riccardo Cucciolla, Andréa Ferréol et Cécile Bois. Les Méliès assurent une sortie en avant-première le 8 juillet 1996, en présence du réalisateur et de Cécile Bois, deux semaines avant la sortie nationale.
En 2002, de lourds travaux sont décidés, qui ne seront engagés qu’en 2003. Une étude « amiante » est réalisée qui s’avère négative en ce qui concerne le gros-oeuvre, mais les peintures elles-mêmes sont amiantées. Il convient de tout gratter, ce qui entraîne un décalage des travaux et une augmentation des coûts. C’est alors au tour du matériel de projection, de la reconfiguration de la salle du bas dont l’allée centrale disparaît au profit de deux allées latérales, du changement des fauteuils, des travaux d’insonorisation et d’acoustique, du chauffage par pompe à chaleur, le tout réalisé sous la conduite du cabinet d’architecte Delaye-Pineau de Saint Marcellin… travaux qui aboutissent à une « inauguration » du cinéma le 27 novembre 2003, en présence du comédien-réalisateur Gérard Krawczyk, et après 6 à 8 mois de fermeture.
En 2012, par décision du Conseil Municipal en date du 11 décembre, l’exploitation est désormais assurée sous la forme d’une Délégation de Service Public (DSP) d’une durée de cinq ans, dont le délégataire désigné par une commission ad’hoc en date du 1er février 2013 sera M. Ratajczyk. Au cours de cette délégation, la salle de cinéma fera le passage au numérique. Prolongée d’un an, la DSP sera renouvelée pour cinq ans le 15 janvier 2019 et le couple Lydie et Frédéric Ratajczyk à nouveau désigné comme délégataire. Cette dernière DSP a pour échéance le 31 décembre 2024.
Dans le « Dauphiné Libéré », daté du lundi 26 décembre 2022, Bernard Lespinard développe, après l’épisode Covid, un bilan d’activité des « Méliès ». Si le cinéma a fait 49900 entrées en 2019, ce chiffre est tombé à 14000 en 2020, année du confinement, pour remonter à 21600 en 2021 et 33500 en 2022. Un beau score !
« Les Méliès » se distinguent par leur capacité à proposer au public les films qui répondent à ses goûts, tout en assurant une programmation nationale dans les délais les plus courts. S’y ajoutent une programmation « Art et Essai », la réalisation de séances-débats proposées par les associations locales (écologie, santé, …) et des projections gratuites en plein air au cours des mois d’été.
Ici s’achève le travail de mémoire au sujet de l’histoire de ce cinéma. Il est, bien entendu, hors de question d’y inscrire le mot « fin » !
7 – Archives Municipales ; cote 12 W 227
8 – La société Jean-Michel Nabert est inactive depuis le 31 décembre 2017 et radiée du greffe de Grenoble depuis le 10 janvier 2019.
9 – Archives Municipales – cote 41 W 570
Pour celles et ceux que cela peut intéresser, l’auteur de ce texte tient à disposition un relevé exhaustif des films programmés à Saint-Marcellin entre 1939 et 1946.
Contributeurs
– Archives Municipales
– Pierre Ballouhey (PB)
– Marina Bertrand (MB)
– Michel Bompard (MB2)
– Jean Briselet (JB)
– Pierre Chambard (PC)
– Daniel Coindre (DC)
– Nina Crouzet (NC)
– Nadia et Jean-Pascal Crouzet (NJPC)
– Marc Ellenberger (ME)
– Denise Hebert (DH)
– Dominique Mitéran (DM)
– Philippe Pineau (PP)
– Benoit Thierry (BT)
Synthèse, mise en forme et rédaction : Jean Briselet, membre de « Groupe Rempart ». Tout reproduction interdite, sauf après accord avec l’auteur.
Tous les articles relatifs au cinéma « Les Méliès » de Saint-Marcellin sont regroupés dans un texte .pdf qu’il est possible de télécharger ici.
Sans perdre plus de temps, la Municipalité active la relance d’une activité cinéma « absente depuis déjà quelques années », par la mise à disposition de la Salle des Fêtes (Salle de Théâtre de la Mairie) qui sera équipée d’un projecteur. Le Conseil Municipal du 3 septembre 1980 acte ces choix. (JB, ME)
L’acquisition d’un projecteur 35 mm est engagée. L’appareil de marque russe sera livré et installé en octobre 1980, pour un coût de 138 969 francs. (5)
Assez souvent, les engrenages de ce projecteur bloquaient la pellicule, alors la lampe commençait à brûler les films en celluloïd sur quelques dizaines de centimètres, voire mètres. Le projectionniste devait alors très rapidement arrêter la projection pour minimiser les dégâts, couper le film brûlé, recoller les deux extrémités de la coupe et relancer la projection. Et gare à la déception des spectateurs s’il manquait quelques secondes du film dans un moment crucial ! (BT)
Une association « Les Amis du Cinéma » est déclarée en préfecture de l’Isère le 5 janvier 1981. Elle se réunit régulièrement en salle du Conseil de la Mairie, pour déterminer la programmation hebdomadaire de manière participative, entre cinéma d’essai et grand public. Des semaines à thème sont aussi organisées (films policiers, grands auteurs, etc…)(BT, DM).
Voici quelques extraits de la programmation:
– en 1982 : « Manhattan », « Coup de Torchon », « Les Frères Taviani », …
– mercredi 3 octobre 1984 ; « Taxi Driver »
– mercredi 10 octobre 1984 ; « Don Giovanni »
– mercredi 17 octobre 1984 ; « La Strada »
– mercredi 24 octobre 1984 ; « Les Chiens de Paille »
– mercredi 5 décembre 1984 ; « Au-dessous du Volcan »
– mercredi 12 décembre 1984 ; « Annie »
– mercredi 19 décembre 1984 ; « Hair »
Pour la simplicité du tableau, ne sont cités que les mercredi, mais les films sont projetés les mercredi, jeudi et vendredi, ce dernier jour parfois sur deux séances. Le tarif pour les séances citées précédemment est de 17 francs pour les adultes et 12 francs pour les enfants, familles nombreuses et handicapés (l’époque ne parlait pas de PMR). L’affichage en petit et grand format est réalisé sur les panneaux publicitaires de la ville la semaine précédente par le projectionniste de l’association et les deux gardes municipaux (BT).
Le 1er avril 1983, Roland Marguin, représentant la Société d’Exploitation Cinématographique, Cinéma « Le Cristal », 74170 SAINT-GERVAIS, dépose une demande de permis de construire, à Saint-Marcellin, pour rénovation du cinéma « Eden». Son projet porte le nouveau nom de « Les Méliès ».
Fort logiquement, lorsqu’ouvrira ce nouveau cinéma la fréquentation baissera de façon importante du coté des « Amis du cinéma », lesquels se retrouveront en difficulté financière et décideront, sous la présidence de Dominique Mitéran, de mettre un terme à leur activité
Les 4 mars et 14 mars 1985, deux réunions de l’association des « Amis du cinéma » sont consacrées à débattre de la proposition de collaboration faite par Roland Marguin. Le 15 octobre 1985, la nouvelle présidente, Lucile Dillier, convoque une Assemblée Générale, par suite de la démission du CA, avec pour thème unique la liquidation de l’association.
Le 7 décembre 1985, l’Assemblée Générale refuse la dissolution et décide de maintenir l’association, même si « l’activité de celle-ci est en sommeil ». Il semble qu’un nouveau Bureau soit désigné puisqu’un courrier du 25 février 1986 cite Joël Praz, président ; Alberte Durdux, trésorière et Catherine Serradura ; secrétaire.
IV – Entretemps, « Les Méliès » prennent vie
Roland Marguin est né le 4 août 1929, à Feillens, dans l’Ain. Il est décédé le 10 juin 2021 à Eybens (Isère). Passionné de cinéma et d’exploitation cinématographique, il a déjà acquis, avec son épouse Léone, le cinéma « Le Chardon » au Fayet, en 1965, tout en assumant la direction des cinémas de Rumilly et des Contamines-Montjoie, puis assuré le relais de son père Serge pour reprendre le cinéma « Le Cristal » à Saint-Gervais en 1977. (6)(JB)
Roland Marguin se propose de réaménager les locaux de l’ancien cinéma en créant :
– en rez-de-chaussée, un hall d’entrée avec caisse et local de stockage (confiserie, …)
– en demi-niveau, des sanitaires sous l’écran de projection,
– en 1er étage, la cabine de projection et une petite salle de 98 places,
– deux sorties totalisant trois unités de passage,
– un chauffage électrique par pompe à chaleur (probablement pas réalisé).
Jean-Yves Crouzet, propriétaire des locaux, donne autorisation à Roland Marguin d’entreprendre les travaux. Le Maire de Saint-Marcellin donne un avis favorable le 7 avril 1983. L’architecte des Bâtiments de France donne un avis favorable le 11 juillet 1983. Par arrêté préfectoral du 13 octobre 1983, les travaux sont autorisés. Le permis de construire porte le N° 83 R 097. L’architecte est Gérard Albert. Les travaux sont effectués, au moins en partie.
A dater du 19 octobre 1983, l’exploitation du cinéma « Les Méliès » est assurée par la SCI « Le Cristal » inscrite à l’INSEE depuis le 1er janvier 1957.
Le maire de Saint-Marcellin signe l’autorisation d’ouverture le 14 novembre 1983. Les projections reprennent.
Sur le rythme de trois à quatre films par semaine. Pour le souvenir, nous pouvons noter que le programme publié dans le Mémorial N° 2004, en date du 4 janvier 1986, annonce « L’Année du Dragon », « Porté Disparu II » et « Comment Claquer Un Million de Dollars en Un Jour ».
La semaine suivante, les films projetés sont « La Cage aux Folles 3 », « Lune de Miel », « Taram et le Chaudron Magique » et « Trois Hommes et Un Couffin ».
Passons quelques années, en 1990-1991, le rythme de projection est de deux à trois films hebdomadaires. Le cinéma ferme pour congés annuels pendant deux semaines en juillet. Le 4 mai 1991, c’est une nuit du cinéma fantastique qui est programmée. Les vacances annuelles ont lieu pendant trois semaines de juillet.
Que se passe-t-il à dater de 1991 ? Le cinéma rencontre-t-il des difficultés économiques ?
5 – Archives Municipales ; cote 12 W 135
6 – Note nécrologique et biographique diffusée par « BoxOffice Pro » le 11/06/2021
Contributeurs
– Archives Municipales
– Pierre Ballouhey (PB)
– Marina Bertrand (MB)
– Michel Bompard (MB2)
– Jean Briselet (JB)
– Pierre Chambard (PC)
– Daniel Coindre (DC)
– Nina Crouzet (NC)
– Nadia et Jean-Pascal Crouzet (NJPC)
– Marc Ellenberger (ME)
– Denise Hebert (DH)
– Dominique Mitéran (DM)
– Philippe Pineau (PP)
– Benoit Thierry (BT)
Synthèse, mise en forme et rédaction : Jean Briselet, membre de « Groupe Rempart ». Reproduction interdite, sauf accord avec l’auteur.
Les archives de Saint-Marcellin (3) nous renseignent en partie sur la naissance du cinéma qui se trouve en bordure nord du Champ de Mars. En 1925, Georges Argentier y possède un terrain d’une superficie de 1400 m², limité par le Cours du Mollard (devenu ultérieurement le Boulevard Riondel) et un chemin privé. Le 22 mai, il a déjà vendu 499 m², en façade du cours du Mollard, à Jean-Baptiste Bertinotti, marchand de meubles.
En 1930, il cherche à vendre les 900 m² restant afin qu’il y soit édifiée une maison d’habitation. Il rencontre cependant quelques difficultés administratives puisqu’ayant déjà vendu une partie de son terrain, il doit se soumettre, selon la préfecture, à la loi du 19 juillet 1924 relative aux lotissements. Maître Emile Martinet, notaire, rédige un cahier des charges pour le dit lotissement le 24 juin 1930, mais le dossier traîne. Après un premier refus préfectoral, puis un avis favorable par délibération municipale le 7 mars 1941, puis une enquête commodo-incommodo faite entre le 20 avril et le 4 mai 1941, ce lotissement est finalement approuvé en préfecture le …18 novembre 1941.
Mais dès avant cette approbation, le 26 février 1941, un certain Jean-Baptiste Bouthéon sollicite l’autorisation de construire une maison d’habitation et d’exploitation cinématographique. Nos recherches n’ont pas permis de retrouver l’acte de vente conclu entre Georges Argentier et Jean-Baptiste Bouthéon. Quand au permis de construire cette maison d’habitation, il n’y en a pas davantage, mais il faut se souvenir que la délivrance d’un permis de construire n’a été rendue obligatoire dans toutes les communes qu’à partir du 15 juin 1943.
Qui est Jean-Baptiste Bouthéon ? Il est né à Chenereilles (Loire) le 4 mars 1902. Il contracte un premier mariage avec Jeanne Henriette Commandeur, le 5 septembre 1925, à Lyon 3ème. Puis, par suite de veuvage, il épouse en secondes noces Marguerite Jeanne Victorine Beyssac, le 7 septembre 1940, à Lyon 6ème. Il est donc domicilié à Lyon et son épouse est exploitante de cinéma. Jean-Baptiste Bouthéon abandonne alors son métier de mécanicien automobile chez Berliet et se lance dans l’exploitation cinématographique (ME).
Lors de sa demande d’autorisation d’ouvrir un cinéma à Saint-Marcellin, il se présente comme exploitant-propriétaire de l’Eden-Cinéma de Bourg-de-Thizy (Rhône). Son épouse exploite également le cinéma de Moirans, où Jean-Baptiste Bouthéon est inscrit sur les listes électorales.
L’hebdomadaire saint-marcellinois d’avant-guerre et de la période de la guerre est « Le Journal de Saint-Marcellin ». Le N° 2579 de cet hebdo, daté du 7 février 1942, publie un petit pavé annonçant « EDEN-CINEMA – Ouverture dans quelques jours – Salle confortable ». La première mention d’une programmation de ce cinéma « Eden » se trouve dans le numéro suivant du « Journal de Saint-Marcellin », le N° 2580, daté du 14 février 1942. Le film annoncé est « Les Gangsters du Chateau d’If », un film de René Pujol sorti en 1939. Cette date de mi-février 1942 correspond strictement au démarrage du cinéma (JB). En 2009, la « Jeanne d’Arc de Saint-Marcellin » a publié un livre consacré à l’histoire de cette association. Ecrit par Bernard Giroud et édité par Ballouhey imprimeurs-éditeurs, il y est précisé en page 189 que l’Eden est « ouvert en février 1942 par Mr Bouthéon » (ME).
L’intervalle de dates entre l’autorisation de construction des lieux et l’ouverture de la salle à l’exploitation permet de situer la période de construction du cinéma entre février 1941 et tout début 1942 (JB). Très curieusement, cette innovation dans la ville ne retient absolument pas l’attention des éditeurs de cartes postales. A partir de 1942 et pratiquement jusqu’à aujourd’hui, jamais le cinéma de Saint-Marcellin ne fera l’objet de photographies commercialisées.
Ce cinéma ne comprend qu’une salle de projection, mais il dispose d’un balcon. L’entrée se faisait par l’actuel local commercial adjacent sur la gauche, tandis que sur la droite se trouvait un garage privé à l’usage des Bouthéon. Les sièges étaient hiérarchiquement disposés : en première classe, des sièges rembourrés, en seconde classe, des sièges en bois et en classe populaire, des chaises et des bancs. L’allée desservant les sièges était centrale, ce qui fait que les meilleures places, dans l’axe de l’écran, étaient inexistantes !(PC)
Qui en est l’architecte ? La question est ouverte, aucun document dans les Archives Municipales ne permet de le préciser, a fortiori parce que l’on ne dispose pas d’un permis de construire. Il existe, à Choisy-le-Roi, une ancienne salle d’un même style Art Déco, dénommée « Le Royal », qui présente une grande similitude avec la salle de l’« Eden ». C’est peut-être une piste …
L’« Eden » rencontre un succès immédiat, et pas seulement pour le cinéma. C’est ainsi que le 8 mai 1942, il sert d’écrin pour un concert de Fredo Garzoni.
Après le bombardement du 22 août 1944, M. Bouthéon fera publier dans « Le Journal de Saint-Marcellin » N° 2711, daté du 26 août 1944 : « Eden- Cinéma. En raison du deuil qui frappe Saint-Marcellin et la Direction de l’Eden en particulier, en la personne de plusieurs de leurs clients et amis, pas de cinéma cette semaine. Le beau film « L’Ange de la Nuit » vous sera présenté la semaine prochaine à partir de jeudi ».
En 1945, Jean-Baptiste Bouthéon, domicilié rue Saint-Laurent, est inscrit sur les listes électorales de Saint-Marcellin. C’est également en 1945, à l’Eden, que Françoise Quoirez, pas encore Sagan, découvre dans les « Actualités » ce qu’il en était des camps d’extermination nazis. Elle avait tout juste dix ans et s’en est souvenu toute sa vie. (JB)
L’exploitation du cinéma par Jean-Baptiste Bouthéon a laissé de multiples souvenirs concernant le fonctionnement ou encore les salariés et bénévoles travaillant dans cet établissement. Les ouvreurs étaient Ernest Girard, typographe à l’imprimerie Cluze, Francis coiffeur chez Féline, Claudette Robin, Anne-Marie Menon, Paulette, … Quant au projectionniste, l’un est resté connu sous le nom de Jo Bicais.(DH, DC, PB)
Jean-Baptiste Bouthéon était considéré comme un « ours mal léché », très attentif à ce que l’ordre règne dans son cinéma ainsi qu’alentour. (PB, PC)
Pierre raconte la sonnerie qui « alertait » le public une bonne heure avant la séance, l’affichage des programmes à l’entrée, fixés par des punaises et protégés par un grillage, le chahut dans le public lors des « Actualités », … (PC)
Au cours des années 1955-1960, l’Eden est loin d’être isolé dans la région de Saint-Marcellin. Outre le cinéma du « Foyer », il existe deux circuits de « distribution cinématographique ». L’un se nomme « Cinéma Familial » et organise ses séances de projection le vendredi en soirée à Saint-Hilaire du Rosier, le samedi en soirée à Saint-Vérand, le dimanche en matinée (14 h 30) à Chasselay et le dimanche en soirée à Varacieux. L’autre se nomme « Cinéma Le Foyer Rural » et projette, toujours en soirée, le mercredi à Saint-Lattier, le jeudi à Montagne, le vendredi à La Sône, le samedi à Chatte et le dimanche à Saint-Antoine.
Maurice raconte comment le cinéma a joué un rôle capital dans sa rencontre avec son épouse. Dans les années 1957-60, Paulette y travaillait comme ouvreuse. Comme elle se tenait toujours au même endroit dans l’allée de la salle, la caissière, Marie-Louise (la compagne de Jean-Baptiste Bouthéon), jouant les marieuses, vendait toujours à Maurice le ticket voisin de la place de Paulette. Maurice part à la guerre d’Algérie en 1957 et lors d’une permission en 1958, il est à nouveau placé au cinéma à coté de Paulette. Reparti en Algérie, Maurice a la surprise de recevoir une lettre de Paulette lui proposant de devenir sa marraine de guerre. Paulette et Maurice se marièrent en 1960, après la fin de cette guerre . Et Paulette a encore travaillé à l’Eden de 1962 à 1964. (MH)
Le 1er octobre 1972, les Bouthéon transfèrent l’exploitation du cinéma « Eden » à Gérard Hernicot (selon le BODACC). Ceci implique qu’ils sont restés pendant trente ans les exploitants de l’« Eden ». Gérard Hernicot est déjà l’exploitant d’un cinéma à Tullins, ainsi que d’un magasin d’articles de sport. (ME, MB2)
Mais six ans plus tard, le 24 février 1978, Paul Picard, maire de Saint-Marcellin, annonce à son Conseil Municipal que Gérard Hernicot cesse l’exploitation du cinéma, invoquant « les exigences du propriétaire ».
De ce jour, il n’y a plus de cinéma à Saint-Marcellin, la salle du « Vox », place de la Gare, ouverte par Fernand Fournier le 1er décembre 1963, ayant fermé début 1970, et la salle du « Foyer », successeur de l’exploitation du Presbytère de 1931, étant close depuis 1975.
Jean-Yves Crouzet achète les locaux, acte reçu par Me Martinet, notaire à Saint-Marcellin, le 29 mars 1980.(4) Il y installe son bureau d’agent immobilier à l’emplacement de la billetterie et loue la grande salle à une société revendant les produits acquis lors de ventes aux enchères ou issus de faillites d’entreprises.(NJPC)
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