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Ecologie

Trafics de déchets

Dans son édition du 26 août, Le Monde a publié (page 2) un curieux entrefilet, classé sous une rubrique “environnement”, qui faisait était du renvoi par le Brésil et vers l’Allemagne de 22 tonnes d’ordures ménagères allemandes entrées illégalement sur son territoire. Cette information a été rendue publique par l’Institut Brésilien de l’Environnement qui a précisé qu’une amende de 668000 € avait été infligée au transporteur et une amende de 177000 € à l’importateur.

Aucune autre information n’étant donnée dans le reste du journal, on reste un peu sur notre faim. Il en a été trop dit, ou pas assez. Et cela est bien regrettable puisqu’il faut trouver d’autres explications dans le Journal de l’Environnement par exemple (http://www.journaldelenvironnement.net/article/le-bresil-ne-veut-pas-etre-la-poubelle-des-europeens,18722). Et l’on y apprend que cette affaire n’est pas la première.

Centre d’enfouissement au Venezuela

22 tonnes, c’est en fait dérisoire. Cela ne représente pas plus que le contenu d’un conteneur maritime de 40′, UNE semi-remorque de poids lourd de 40 tonnes ! Et s’il s’agit véritablement de déchets ménagers, cela tient dans un conteneur de 20′ !!. Lorsque l’on sait que l’exportateur, une entreprise de Hong-Kong, avait qualifié ces déchets de “plastique recyclable” dont la provenance était la République Tchèque, on est en droit de se demander combien de conteneurs faussement identifiés et dont l’origine est mensongère ont pu passer les mailles du filet douanier du Brésil. En 2009, lorsque les anglais s’étaient fait pincer pour un même trafic, ce sont … 1400 tonnes qui leur ont été retournées. C’est un peu plus conséquent et probablement plus proche de la vérité pour l’affaire qui nous concerne aujourd’hui. Il est en effet difficile d’imaginer un exportateur prendre des risques sur un seul conteneur.

Le Monde nous parle de déchets ménagers, le Journal de l’Environnement nous parle de déchets ménagers dont certains classés dangereux. Il y a là beaucoup de confusions: les déchets ménagers ne sont pas dangereux, et les déchets dangereux des ménages ne sont pas des déchets ménagers !! Et tout ceci n’a rien à voir avec de prétendus déchets plastiques. En première observation, on peut noter que l’Allemagne est l’un des pays européens où le tri des déchets des ménages est le plus développé, et donc s’interroger sur ces mélanges qui n’ont pas de raison d’être. Qui et comment peut encore trouver un intérêt à stocker des ordures ménagères brutes pour les envoyer au bout du monde ? Personne, à vrai dire et ce ne sont probablement pas des ordures ménagères ! En seconde observation, d’aucuns se souviendront d’une filière identique qui a concerné la France au détour des années 90 et qui consistait pour l’Allemagne à se défaire de ses déchets plastiques auprès d’entreprises (peu regardantes) qui avaient trouvé juteux le filon du recyclage subventionné. Malheureusement, il est vite apparu qu’au nom de déchets plastiques, ce sont souvent des déchets d’hôpitaux (poches de sang, seringues et tubulures) qui entraient en France. Est-ce que cette filière est maintenant orientée vers le Brésil ?

Enfin, dernière constatation; le Brésil a beau faire partie des BRIC, ces pays en rapide développement, les industriels véreux du vieux continent ne le considèrent pas moins comme un pays “pauvre”, un pays où la main d’œuvre sous-payée est tout juste bonne pour trier, enterrer ou incinérer nos ordures.

Quant à l’Allemagne, qu’en dit-elle ? Silence radio jusqu’à ce jour …

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Développement solidaire

Les ouvriers d’Asie se révoltent ?

Dans son édition du 10 août 2010, Le Monde a publié un éditorial d’une rare indigence. Sous le titre « Bonne nouvelle: les ouvriers d’Asie se révoltent », il y est question des luttes sociales en Chine et au Bangladesh, prenant pour exemple les salariés de Foxconn et de Honda ou les ouvriers du textile.

Faisant appel à un marxisme de collégien (ou tel un tract du Nouveau Parti Anticapitaliste), la rédaction veut nous persuader que la capacité de la classe ouvrière à se révolter n’est pas morte et qu’elle met fin à l’illusion des économistes et des chefs d’entreprises occidentaux qui voyaient en Asie un réservoir inépuisable de main d’œuvre.

Dans les faits, tout d’abord, la révolte justifiée de quelques milliers d’ouvriers n’est pas la révolte d’une classe ouvrière. Et ils sont encore plusieurs centaines de milliers de paysans à quitter leurs terres pour se vendre sur les chantiers des grandes villes. Ils sont encore plusieurs milliers à être rejetés, sans dire un mot, lorsque les chantiers sont achevés (JO ou Expo Universelle) ou lorsque la crise frappe la construction.

Mais admettons que ces révoltes soient l’hirondelle qui fait le printemps et qui annonce un temps nouveau pour la classe ouvrière. Marx n’y sera pour rien, qui n’a fait qu’écrire une explication des luttes économiques et sociales en contrepoint de celle d’Adam Smith, l’un voyant en blanc ce que l’autre voit en noir ! Il est d’une évidence absolue que la montée de la richesse dans les pays d’Asie entraîne déjà et entraînera davantage encore une évolution du niveau de vie de la population. Et seules des caricatures d’économistes ou de capitalistes, comme savent en produire les marxistes naïfs, ont pu s’imaginer que les masses asiatiques seraient soumises à perpétuité !

Le niveau de vie s’élève et s’élèvera, la qualité des produits s’améliore et s’améliorera, la sécurité des installations et des process grandit et grandira, l’environnement gagne déjà à être respecté et le sera davantage encore, et cela nous amène à la seconde partie de cet éditorial.

Où il est dit que la résultante de ces conflits (l’augmentation des salaires) est une bonne nouvelle économique et morale. Parce que la mondialisation ne peut être durable que si elle est équitable et parce que l’augmentation du coût salarial va rendre la délocalisation des emplois occidentaux de plus en plus coûteuse. Ce qui protègera nos emplois et permettra à nos industries de vendre “des sacs à mains et des automobiles”.

Que faut-il admirer le plus ? l’optimisme béat de cet éditorial ou sa naïveté ?

Les travailleurs chinois, indiens ou bengalis ne travaillent pas pour sauver nos emplois, mais pour capter l’essentiel de l’activité industrielle mondiale. Qu’ont-ils à faire de nos sacs à main, nécessairement de luxe, et qui ne satisferont que l’extrême-bourgeoisie de leurs pays ? De même, qu’ont-ils à faire de nos voitures que, dans un ou deux couples d’années, ils auront remplacées par les leurs ?

La mondialisation, ça ne se résume pas à la délocalisation ! La mondialisation de l’économie, en marche depuis les routes de la soie, de l’encens, du sel, (ce n’est donc pas d’aujourd’hui), c’est une rationalisation des circuits commerciaux: matières premières, fabrication, distribution, ventes. La délocalisation des entreprises occidentales vers l’Asie est sans doute le chant du cygne de ces entreprises.

Demain, nous aurons en tête de pont les entreprises capitalistes indiennes, chinoises. Avec elles, elles auront la force de travail par le nombre et par la jeunesse (nous, nous serons vieux et lutterons encore contre l’immigration clandestine), elles auront la capacité d’inventer et de TOUT remettre en cause (regardez donc cette histoire de bus géant (http://www.umiwi.com/video/detail1541) en 3D), elles auront les matières premières qu’elles exploiteront sur place ou bien en Afrique ou bien en Amérique Latine, elles auront l’eau, elles auront les terres agricoles, elles auront les énergies alternatives. Et nous n’aurons que nos paysages et nos monuments que des tour-operators asiatiques feront visiter comme vestiges de l’Ancien Monde, après en avoir âprement discuté les conditions financières.

Qui est l’auteur de cet éditorial simpliste ? Pas le service économique, espérons-le ? Alors, le Service Politique abandonné aux mains de quelques stagiaires d’été ? Le service minimal d’été n’excuse pas tout et la pauvreté de ce texte fait honte au lecteur fidèle.

Ouvriers chinois en Côte d’Ivoire (DR)
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Ecologie

Environmental Performance Index: aller un peu plus loin …

Dans son édition des 30-31 mai, Le Monde a rapporté une brève de presse publiée conjointement par les Universités de Yale et Columbia, à propos d’une statistique particulièrement féconde qu’elles publient tous les deux ans: l’Index de Performance Environnementale (acronyme EPI en anglais). La dépêche publiée ne concerne que les résultats de l’année 2010 qui ont été rappelés de façon rapide et succincte.

Précisons avant tout que le classement est établi à partir de notes attribuées à chaque pays dans deux domaines égaux (50% de la note globale pour chacun): celui de la vitalité des écosystèmes et celui de la santé environnementale.

La vitalité des écosystèmes regroupe les notes affectées aux thèmes suivants: changement climatique pour 25 %, agriculture, pêches, forêts, biodiversité et habitat, eau et pollution de l’air chacun pour un peu plus de 4%.

La santé environnementale s’appuie pour moitié sur les luttes contre les maladies environnementales et pour moitié sur les luttes contre les effets des pollutions de l’air et contre les pollutions de l’eau à parts égales.

Au cours des années, la grille a peu changé, certains ratios ont été légèrement réévalués ou dévalués, mais la comparaison reste possible au cours des années. Et là est tout l’intérêt du travail de ces universités.

EPI Map (C)http://epi.yale.edu

Prenons les résultats de 2010 (http://epi.yale.edu/Countries).Les cinq premiers sont l’Islande, la Suisse, le Costa-Rica, la Suède et la Norvège. Les notes attribuées à ces pays vont de 93.5 à 81.1.Examinons un par un leur parcours depuis 2006.

L’Islande était classée au 13° rang en 2006 (http://www.yale.edu/epi/files/2006EPI_AppendixC.pdf), au 11° rang en 2008 (http://epi.yale.edu:2008/CountryScores) et première en 2010.

La Suisse était 16° en 2006, 1ère en 2008 et seconde en 2010.

Le Costa-Rica était 15° en 2006, 5° en 2008 et 3° en 2010.

La Suède était seconde en 2006, 3° en 2008 et 4° en 2010, ce qui a priori témoigne d’une grande stabilité dans la prise en compte des enjeux.

Enfin la Norvège était 18° en 2006, seconde en 2008 et 5° en 2010.

A part donc la Suède qui s’est maintenue dans le quintette de tête depuis trois palmarès, les autres pays ont progressé et parfois largement progressé. Il en est donc d’autres qui ont du reculer ! C’est le cas de la Finlande qui, du 3° rang en 2006, 4° rang en 2008 se retrouve au 12° rang en 2010. Mais c’est surtout la Nouvelle Zélande qui surprend avec un recul important: de la 1ère place en 2008, elle passe à la 7° place en 2008 et à la 15° place en 2010.

En Europe, la République Tchèque, 4° en 2006, se retrouve 22° en 2010. Le Royaume Uni, 5° en 2006, recule à la 14° place en 2008 et s’y maintient en 2010. Le Danemark fait pire: de la 7° place en 2006, il se retrouve à la 26° place en 2008 et à la 32° place en 2010. Il est des réputations qui semblent avoir la vie dure, mais qui ne correspondent plus à des réalités.

Et la France ? Bien placée parmi les pays européens, elle devance régulièrement l’Allemagne, l’Italie, … Jugez-en.

2006: France 12°, Italie 21°, Allemagne 22°.

2008: France 10°, Allemagne 13°, Italie 24°.

2010: France 7°, Allemagne 17°, Italie 18°.

Quel est le lien qui peut exister entre engagement dans la lutte environnementale et crise économique ? Certains résultats ci-dessus permettraient d’avancer l’idée qu’un tel engagement minimise l’impact de la crise (à défaut d’en être un vrai remède). Mais alors quelle est la signification du cas de la Grèce ? Placée au 19° rang en 2006, elle se retrouve au .. 44° en 2008 et au … 71° en 2010 !! Ces chiffres traduisent un abandon total de toute politique environnementale (sans doute au bénéfice de l’armée). Qui ne s’est déjà rendu compte de ce recul il y a deux ans ?

Aux dires d’une majorité d’observateurs, Copenhague a été un échec (Copenhague-ne-peut-pas-être-un-échec) . Il est encore un peu tôt pour en juger. Quoi qu’il en soit, la volonté des Etats-Unis d’encadrer fermement l’évolution environnementale a été déterminante dans les conclusions de cette rencontre. Il n’est donc pas inutile d’examiner le classement des Etats-Unis. Classés à la 28° place en 2006, ils sont en 39° place en 2008 et en 61° place en 2010: un fameux recul qui n’autorise guère à donner des leçons au reste du Monde ! Son petit frère géopolitique et géo-économique, le Canada, n’est pas plus brillant: au 8° rang en 2006, il se retrouve au 12° rang en 2008 et au 46° rang en 2010.

A l’inverse, peut-on dégager une tendance lourde en ce qui concerne les pays en développement et tout particulièrement les BRIC ?

Brésil: 34° en 2006, 34° en 2008 et 62° en 2010.

Russie: 32° en 2006, 28° en 2008 et 69° en 2010.

Inde: 118° en 2006, 120° en 2008 et 123° en 2010, soit une plus grande stabilité que les deux précédents.

Enfin, la Chine: 94° en 2006, 105° en 2008 et 121° en 2010.

La seule tendance est celle d’un recul général. Dans le cas de ces pays, est-ce le prix à payer pour un développement intensif ? Les résultats du classement 2012 seront particulièrement intéressants à examiner.

Quelques cas particuliers: l’Egypte, 85° en 2006, passe au 71° rang en 2008 et au 68° rang en 2010. La Turquie, qui aspire à l’Europe, était 49° en 2006, 72° en 2008 et elle pointe au 77° rang en 2010. Israël qui était au 45° rang en 2006, au 49° rang en 2008, recule au 66° rang en 2010.

Enfin, et malheureusement cela ne surprendra personne, l’Afrique sub-saharienne clôt la marche. Il n’est aucun pays qui ne soit classé avant la 100° place dans les résultats de 2010, et cela était déjà le cas en 2008 et en 2006.

Côte d’Ivoire 102°, Congo 105°, République Démocratique du Congo 106°, Kenya 108°, Ghana 109°, Ouganda 119°, Burkina Faso 128°, Soudan 129°, Zambie 130°, Cameroun 133°, Rwanda 135°, Sénégal 143°, Tchad 151°, Mali 156°, Niger 158°, Togo 159°, Angola 160°, …………… la liste ne comprend que 163 pays. A l’exception de la Libye (117°), l’Afrique méditerranéenne s’en sort mieux, avec l’Algérie (42°), le Maroc (52°) et la Tunisie (74°).

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Engager une profonde réflexion écologique: seconde résolution pour 2010

Ce n’est qu’une préface, un préambule.

Parce que je suis convaincu que la Conférence sur le Climat de Copenhague n’est pas un échec, parce que je crois fermement que des méthodes nouvelles doivent être inventées pour discuter à 192 sans rejeter l’ONU qui peut préfigurer un gouvernement mondial, parce que l’on ne peut pas laisser la place aux seuls écologistes de la “Deep Ecology”, trop absolus, trop autoritaires, en résumé trop dangereux et parce que l’on ne peut pas, non plus, laisser le champ libre à tous ceux qui nient le réchauffement climatique, l’empoisonnement de notre terre par les déchets et pollutions et la fin des matières premières, alors oui il faut engager une profonde réflexion écologique au niveau de chaque individu.

Deux philosophes nous y ont récemment invité dans “Le Monde”.

Michel Serres, le 22 décembre 2009: « On a oublié d’inviter la terre à la conférence sur le climat ».

Edgar Morin, le 10 janvier 2010: « Ainsi il faut à la fois mondialiser et démondialiser, croître et décroître, développer et envelopper ».

Duel au bâton (C)Goya

On en reparle bientôt.