« Chante comme si tu devais mourir demain, comme si plus rien n’avait d’importance, comme si c’était ta dernière chance, … » (citation libre)
(interprétée par Michel Fugain, avec des paroles de Pierre Delanoé et Shuji Katou)
« Si on devait mourir demain, toi, qu’est-ce que tu ferais ? Prendre l’avion, t’enfermer chez toi les yeux fermés, faire l’amour une dernière fois, boire et faire la fête, t’en fiche et te donner du plaisir, prier ou partir avant, … » (citation libre) (interprétée par Pascal Obispo, avec des paroles de Lionel Florence et Pascal Obispo)
Ils sont deux cents à avoir rédigé un texte intitulé « Le plus grand défi de l’histoire de l’humanité », près de 180 artistes, chanteurs, cinéastes, acteurs, metteurs en scène, écrivains, chorégraphes, musiciens, accompagnés de 22 scientifiques leur servant de caution, le tout au masculin comme au féminin.
Il fut un temps où les gardiens de la morale, les conseilleurs en matière de bonne conduite et de choix afin de diriger sa vie étaient les prêtres et hommes d’église qui faisaient le prêche dans le but de l’édification des fidèles. Avec la séparation de l’Eglise et de l’État, ces donneurs de sermons ont été progressivement et successivement remplacés par les maîtres d’école, les enseignants, les philosophes, les sociologues, parfois les journalistes, enfin tous ceux et toutes celles (mais surtout tous ceux) qui sont à l’aise avec l’écrit, le discours et le commentaire.
Avec la fin du XX° siècle et avec la prise de conscience des questions environnementales, il a pu sembler un moment que les scientifiques seuls allaient prendre la relève. En 1992, ils étaient près de 1700 à lancer un premier appel alarmiste. 25 ans plus tard, en 2017, ils l’ont renouvelé en étant plus de 15300 à signer un même texte prédisant la fin de l’humanité et l’effondrement de notre civilisation industrielle.
Aujourd’hui, ce sont les femmes et les hommes de la Société du Spectacle qui se mobilisent ! Au nom de quelle expérience, au nom de quel vécu ? Rien, dans leurs métiers, qu’ils soient du domaine du divertissement ou de celui de la culture, ne leur donne mandat pour interpeller collectivement, en tant que réunion des artistes, le gouvernement et « le » politique. Certes, comme toute femme, tout homme, ils ont leur mot à dire. L’expérience Meetoo leur est certainement montée en tête et les voici qui se prennent pour les prédicateurs du XXI° siècle !
Espérons tout de même que leurs jugements soient plus clairvoyants que ceux de Marion Cotillard ou de Juliette Binoche à propos du 11 Septembre !
Le texte des scientifiques de 2017 allait jusqu’à réclamer une régulation de la population mondiale afin de circonvenir l’apocalypse annoncée.
Le texte des « 200 » publié ce 4 septembre 2018, comprend 241 mots, dont deux fois le mot cataclysme et deux fois le mot effondrement, tout en affirmant que les humains et autres espèces vivantes sont en situation critique. D’aucuns nomment cela la pédagogie de la catastrophe !
Or, il est de plus en plus évident que la catastrophe annoncée à grands cris ne mobilise pas grand monde. Soit parce que sa présentation est beaucoup trop caricaturale pour que l’on y croit ou pour que l’on estime pouvoir jouer un rôle pour la retarder. Soit parce que l’on en est convaincu, tellement convaincu qu’il ne reste plus qu’à suivre les conseils de Pascal Obispo et de Michel Fugain : penser à autre chose et chanter … ou prier. Les films catastrophe nous ont longuement représenté ce que sont les réactions des humains lorsqu’on leur apprend leur mort certaine pour dans un moment, pour demain ou dans les semaines ou mois à venir. Ils deviennent des lâches prêts à tout pour sauver leur peau, leurs biens ou alors, ils deviennent des héros ordinaires dévoués à tenter de sauver leur famille, puis leurs voisins, puis …
Plus fondamentalement, comment imaginer que des hommes et des femmes bercés par des siècles de culture leur inculquant le droit à se servir de la planète et de ses ressources, leur répétant « croissez et multipliez-vous, dominez, asservissez le monde, sa nature, ses espèces », comment imaginer que demain ils puissent croire à leur propre brutale disparition et se mobiliser collectivement pour empêcher qu’elle advienne ?
La thèse est tout à la fois irréaliste, absurde et totalitaire.
Dans leur position de prédicateur un tant soit peu orgueilleux, les « 200 » s’adressent « au gouvernement qui ne saurait être pris au sérieux s’il ne fait pas du sauvetage de ce qui peut encore l’être son objectif premier et revendiqué »
Quel gouvernement ? Un gouvernement mondial qui n’existe pas ? Le gouvernement de la France auquel on peut penser par le biais de la référence très actualisée aux lobbies ? Et où sont les artistes qui vont exiger la même chose du gouvernement allemand, du gouvernement italien, du gouvernement de Donald Trump, du gouvernement de la Chine, du gouvernement des pays dits en développement qui emplissent le continent africain ?
Car, quel gouvernement peut se permettre de prendre des positions radicales et « potentiellement impopulaires » s’il est le seul au monde ? Oui, je sais, la mondialisation vous fait horreur. Et pourtant, le monde est mondialisé !
La démission de Nicolas Hulot ne peut même pas vous être utile, en ce sens qu’il a été désigné comme ministre de la transition écologique. Heureux de quelques petits succès, il a été massacré sur l’autel des porteurs de choix radicaux parce qu’il a concédé que le glyphosate ne pouvait pas être interdit du jour au lendemain, ou parce que la réduction de l’empreinte du parc nucléaire ne se ferait pas, non plus, du jour au lendemain. Quant à la pédagogie de la transition, du passage vers autre chose, il est resté bien silencieux. Tout comme la révolution rouge (celle des marxistes de tous poils), la révolution verte ne se fera pas en passant par un GRAND SOIR !
Lorsque le temps leur est libre, entre deux films ou entre deux chansons, entre deux communiqués de presse, entre deux festivals ou deux émissions TV, pourquoi ces bons donneurs de conseils ne s’engageraient-ils pas dans des associations, ou dans leurs communes respectives, afin de travailler (oui, travailler!) à la réduction des déchets de leur quartier ou de leur ville, à la rénovation de leur centre-ville pour en améliorer les performances énergétiques, à réviser leurs déplacements au quotidien (par exemple, en ne prenant l’avion que si nécessaire et les transports en commun un peu plus souvent !), à diminuer la puissance de leurs véhicules, la surface et le nombre de leurs résidences, la dimension de leurs piscines, à mettre à leur table uniquement des produits de saison produits dans un périmètre le plus réduit possible et non de l’autre coté de la planète, à équiper leur logement et à se vêtir avec des articles durables, fabriqués par de vrais salariés et non des enfants,… ? La liste est longue, trop longue, de tout ce qu’ils pourraient faire. Certes, on ne parlerait pas d’eux, car cela n’aurait intérêt médiatique, … sauf celui de l’exemple.
Nous regrettons fortement que ce texte insignifiant ait bénéficié d’une page entière du Monde, page dans laquelle les deux cents signatures occupent davantage d’espace que les 241 mots de la déclaration : c’est là sans doute une nouvelle concession à la Société du Spectacle.
Car si la révolution verte doit se faire, elle ne se fera que par des petits pas quotidiens, résolus et déterminés, nous engageant toutes et tous, dirigeants comme salariés, élus comme citoyens, ici et là-bas à l’autre bout du monde, par la pédagogie de l’exemple, de la persuasion et de la conviction.
Étiquette : Environnement
Où va-t-on atterrir ?
La décision de mettre un terme au projet d’aéroport à Notre Dame des Landes a été accueillie par les français comme une bonne décision, et ceci pour quasiment trois sur quatre d’entre eux . Il est évident que cette décision a le grand mérite de solder une « affaire » s’éternisant depuis trop longtemps. Le risque d’un affrontement lourd et durable est ainsi écarté. Et Nicolas Hulot peut se maintenir à l’environnement, ce qui n’est pas un mince bénéfice pour le gouvernement.
L’approbation des français s’assimile bien davantage à un « ouf » de soulagement, empreint d’un peu de lâcheté, qu’à un réel assentiment politique. Ce dossier n’a que trop duré, tel est leitmotiv de tous. Et le report au printemps d’éventuelles opérations d’évacuation des lieux contribue à cette satisfaction générale.
Nous sommes cependant en droit de nous interroger sur l’aspect politique de cette décision, et de la considérer comme un échec de la démocratie. D’aucuns sont allés jusqu’à parler de déni de démocratie. Sans aller aussi loin, il est nécessaire de rappeler que ce dossier de l’aéroport de Notre Dame des Landes est vieux de plus de cinquante ans puisqu’il date de … 1967 ! La ZAD (Zone d’Aménagement Différé) est créée en 1974 et les choses s’endorment jusqu’en 2000. En 2009, puis en 2012, les opposants s’organisent et une opération d’expulsion des contestataires cristallise les mécontentements: les zadistes tiennent les lieux !
Sous une forme ou sous une autre, des dizaines et des dizaines de recours en justice sont rejetés par les tribunaux. En 2012, une Commission du Dialogue conclut à l’utilité du projet. En 2016, un référendum imaginé par François Hollande se traduit par plus de 55% d’avis favorables pour l’aéroport. Dans sa campagne électorale, Emmanuel Macron s’engage à réaliser ce projet. Rien n’y fait, l’occupation des lieux empêche toute évolution du dossier.
Les zadistes ont-ils gagné quelque chose pour autant ? Malgré leurs proclamations de victoire, rien n’est moins certain. Certes, l’aéroport ne se fera pas. Certes, les terres retourneront à leur usage agricole. Mais l’aéroport historique de Nantes sera agrandi, multipliant les nuisances au plus proche de la ville. Et la dénonciation idéologique des « projets inutiles », qui fait leur fond de commerce, s’éteint avec le renoncement à poursuivre ce dossier. Cela est tellement vrai que les revendications qui s’élèvent actuellement ne portent que sur la possibilité de certains à pouvoir rester sur place et poursuivre une expérience de retour à la terre.
L’expérience du Larzac est mise à contribution, alors qu’une différence manifeste existe avec la situation de Notre Dame des Landes. Au Larzac, au cours des années 1970-1980, ce sont plusieurs dizaines d’agriculteurs qui ont été menacés d’expulsion afin de permettre la création d’un espace d’entraînement de l’armée. Ces agriculteurs sont d’authentiques « anciens » du pays ainsi que des néo-ruraux qui, dans la suite de l’esprit de mai 68, se sont implantés et ont réhabilités des exploitations en ruines. Une réelle économie pastorale existe en 1970 sur le Larzac : élevage de brebis (plus de 100000 !), production de lait (pour le roquefort) et de fromages. Le ministère des Armées s’était lourdement trompé en déclarant ce pays quasiment vide ! 43 ans plus tard, en 2013, il y a 54 baux signés avec la Société Civile d’Exploitation des Terres du Larzac et plus d’une vingtaine d’exploitation ont leur siège social sur les terres du Larzac.
Il n’y a rien de tel à Notre Dame des Landes ! Si l’on excepte les exploitants agricoles qui n’ont jamais cessé d’utiliser des terres dont ils ont été expropriés et qu’ils vont recouvrir, rares sont les « zadistes » présents sur le site a avoir développé une activité économique, aussi modeste soit-elle, on trouve deux, voire trois, boulangeries, quelques serres potagères, une salle de concert et une bibliothèque, deux structures liées à l’occupation des lieux …. La revendication de pouvoir rester sur place vise à permettre à certains de poursuivre leur rêve d’autarcie, de refus de la société, de décroissance et de rejet d’un fonctionnement démocratique. Ils ne disposent pas de baux, ne payent aucun loyer, ni aucun impôt, ne sont raccordés à aucun réseau d’eau, d’hygiène …
Autant ce choix de vie est peut-être respectable, autant il ne saurait servir de modèle à notre société. Dans leur grande majorité, les « zadistes » sont des jeunes exclus de la société, qui se sont exclus ou qui se sentent exclus de celle-ci. Il est important de comprendre pourquoi est ressentie si vivement cette exclusion qui n’est pas toujours économique, mais qui est parfois largement politique et idéologique, puisqu’il s’agit de l’un des concepts de base de l’écologie radicale. Vivre en autosuffisance est considéré comme une forme de résistance au gouvernement ou à tous les pouvoirs, en mettant en œuvre un fonctionnement collectif limité à de petits groupes, et en nommant ceci « démocratie » !
Dans « Le Monde » daté du 20 janvier est décrite la situation d’une « famille de trois personnes, les parents et une petite fille, vivant dans un village de 1000 habitants. Ils vivent dans une yourte de 30 m², sans électricité, sans eau courante, avec 1400 € par mois, soit sous le seuil officiel de pauvreté. Insérés dans un groupe d’une cinquantaine d’alternatifs, ils font leur potager et vivent de peu. Ils estiment « vivre bien ». La vie communautaire leur permet d’accéder gratuitement aux ressources communes et d’autofabriquer l’alimentation, l’habitat, l’énergie. Leur modèle est celui d’une polyactivité vivrière (boulangers-paysans), avec vente du surplus ». Ils ne sont donc pas totalement en dehors de la société marchande, mais ne participent que marginalement à l’économie.
Est-ce la société de décroissance que nous désirons ? Est-ce ainsi que les hommes doivent vivre ?
Est-ce une orientation que l’Etat peut (et doit) accepter, voire prendre en considération ?
Dans ce comportement de repli sur soi, de rejet de la société dite de consommation, il y a une radicalisation qui n’a rien de commun avec ce qui s’est passé voici cinquante ans sur le Larzac, ni rien de commun avec ce que vivent aujourd’hui les exploitants du Larzac.
Alors, que faire si l’on désire mettre un terme à ce genre de situations ou, à défaut, éviter qu’elles se reproduisent ?
- La première des urgences consiste à réviser les procédures qui accompagnent la mise en route de projets d’équipement et de développement des territoires. Notamment en favorisant le débat systématique, en déployant des process de publicité et de communication. Les décisions municipales, départementales, régionales, de l’Etat, ne sont pas suffisamment commentées et débattues.
Est-il normal que des projets s’étirent pendant cinquante ans, ou même quinze ou vingt ans. Le dossier d’un projet d’équipement devrait être limité dans le temps. Si rien n’est engagé au bout de x années, le dossier devrait être caduc et totalement reconsidéré. Cela permettrait de prendre en compte les évolutions technologiques, environnementales, démographiques, économiques, d’emploi, … Il ne s’agit pas d’engager un dossier par la mise en place de barrières de chantier ou la pose d’une première pierre. Non, il s’agit que la réalisation du projet soit fermement initiée. - Est-il normal que les projets de fermes éoliennes ne se réalisent (quand ils se réalisent!) que plus de cinq ans après la dépose du dossier ? Est-il normal que les types d’éoliennes envisagés voici cinq ans doivent impérativement être mis en œuvre, alors que la technologie a fait pendant ces cinq années de considérables progrès en matière de rendement et de silence ?
- De la même manière, les recours devraient être contraints dans le temps et dans leur nombre. Sitôt la publication d’un projet, une période de recours devrait s’ouvrir, période limitée dans le temps. L’invitation faite à la justice de traiter les recours dans un délai raisonnable semble indispensable. Il n’est pas possible de considérer un dossier caduc après une latence de x années si, par ailleurs, les recours peuvent être déposés les uns après les autres, sans limite de délai : recours concernant l’eau, concernant l’halieutique, les tritons à pattes palmées, les petites fleurs, etc, etc … dans le seul but de retarder indéfiniment la réalisation du projet.
Les choses ne sont certes pas blanches ou noires. Chaque citoyen doit pouvoir trouver son cadre de vie et son équilibre. Au-delà de la question de Notre Dame des Landes et des diverses ZAD que comprend notre pays, se pose une réelle question sociétale. Peux-t-on vivre durablement sur les marges de notre économie ? Peux-t-on vivre avec le RSA pour seul revenu assuré ? Au-delà de cette dernière question, c’est la théorie du revenu universel qui est interrogée.
Il est le Président du Groupe Sphère, titulaire de la marque Alfapac (sacs poubelle, film plastique). Vêtu d’une marinière à la Montebourg et sur fond tricolore (tout comme son modèle), il prétend produire en France et préserver les emplois. Lorsqu’on lit plus avant sa profession de foi, on apprend que s’il a six usines en France, il a en a sept autres situées en union Européenne. De plus, parmi les six usines situées en France, trois d’entre elles sont des « usines relocalisées en France après avoir été achetées en Allemagne de l’Est, en République Tchèque et en Italie du Sud ». Outre le fait que nous ne savions pas que l’Allemagne de l’Est, comme l’Italie du Sud, étaient des pays à part entière, nous sommes heureux d’apprendre que des emplois existants dans des pays ou des régions qui en ont bien besoin ont été détruits pour le bénéfice de l’emploi en France !
Ce qui permet de considérer que la démarche de cette entreprise ne relève pas tant du « patriotisme économique », mais bien du « nationalisme économique ». La photographie décrite en préambule de ce post devrait être complétée par le béret et la baguette de pain, voire la « gauloise » au coin des lèvres. Il n’y a d’ailleurs pas que les chefs d’entreprise à pratiquer cette sorte de « nationalisme économique ». Lorsqu’un ministre déclare que les centres d’appel que les entreprises ont installés au Maroc ou dans d’autres pays du Maghreb doivent être rapatriés en France, il ne fait pas autre chose. Tout comme les usines rachetées par Sphère, ces centres d’appels n’ont pas à être « re-localisés » en France, puisqu’ils n’y ont jamais été localisés et qu’ils n’ont jamais été délocalisés. Ces centres d’appel, pour la plupart, ont été créés d’office dans les pays qui les abritent actuellement, en profitant de l’expansion rapide de la demande et de l’offre en matière de main d’œuvre.
Prendre argument sur le niveau peu élevé de compétence, les conditions de travail souvent difficiles et les salaires insuffisants ne doit pas justifier une « relocalisation » en France dont la première conséquence sera la suppression de centaines d’emplois dans des pays qui en ont besoin.
L’emploi ne peut être une « denrée », une « matière » ou une « variable d’ajustement » avec laquelle on peut faire tous les ajustements possibles dans le seul but de satisfaire les besoins du plus riche ou de l’occidental.
Avec les mêmes prétendues inquiétudes occidentales, ce genre de raisonnement parvient aux confins du « colonialisme ». C’est le cas dans l’affaire de l’huile de palme. Résumons la thématique de façon rapide. Voilà une huile « parfaite » en ce sens que ses coûts de production sont peu élevés et que ses propriétés organoleptiques sont très intéressantes: goût, tenue à la chaleur, aspect craquant, … toutes raisons qui en ont fait la favorite des industriels de l’alimentation, mais aussi des cosmétiques et (pour d’autres raisons) des « pétroliers » puisqu’elle sert de carburant végétal.
A contrario, cette huile est accusée d’être à l’origine d’une vaste déforestation des zones où elle est cultivée intensément, déforestation accompagnée d’une destruction des lieux d’accueil de la faune sauvage.
Tenant compte de ces reproches exprimés par des associations de défense de l’environnement qui ont pignon sur rue (WWF, Greenpeace, …), mais qui n’ont jamais sollicité de boycottage, des industriels malins ont imaginé qu’une campagne de boycott de cette huile de palme serait « porteuse » pour leurs propres produits et, ce faisant, ils ont accusé l’huile de palme de tous les méfaits sanitaires.
Or, l’huile de palme contient moins d’acides gras saturés que le beurre ou les graisses animales et la consommation annuelle d’huile de palme dans la nourriture du français moyen est très nettement inférieure à la consommation de beurre.
Par contre, l’exploitation des palmeraies représente une vraie richesse pour les pays qui s’y consacrent et les emplois créés (plusieurs centaines de milliers !) représentent un formidable gage de développement pour les populations concernées.
Pour résumer, l’huile de palme est un produit dont l’occidental doit apprendre à se servir. Les plantations de palmiers sont une opportunité dont les industriels, les élus des pays producteurs et les consommateurs de la planète doivent se saisir en réfléchissant à une culture gérée raisonnablement. Et cela est possible, comme Erik Orsenna se plait à le démontrer en ce qui concerne la culture de l’eucalyptus à des fins papetières (« Sur la route du papier »-2012).
Mais l’Occident, l’Europe, la France en particulier puisque cette campagne est typiquement française, n’ont pas à s’ériger en censeur des pays en voie de développement et à boycotter leurs productions. Ce n’est pas pour rien que la Malaisie, le Nigéria, la Cote d’Ivoire, se sont élevés contre cette campagne qu’ils ont accusée de relents « colonialistes » …
Pour en savoir davantage, une étude du WWF (http://awsassets.panda.org/downloads/developpmentpalmierhuilecameroun.pdf) et un article du « Monde » (http://www.lemonde.fr/planete/article/2012/11/19/l-huile-de-palme-une-mefiance-tres-francaise_1792612_3244.html).
Les Suisses et le retour au pays d’Heidi
La Suisse est un pays dont la démocratie se vit sans complexes ! On se souvient de l' »initiative » contre les mosquées et leurs minarets lancée par l’UDC où celle portant sur l’expulsion des étrangers condamnés. D’aucuns avaient pu juger que le succès de ces initiative était prémonitoire d’un climat et d’une ambiance qui ne manqueraient pas de se développer en Europe, Europe occidentale à minima. La même UDC a lancé une nouvelle « initiative » voici quelques mois, contre « l’immigration en masse ». Et voici qu’une nouvelle « initiative » est proposée par ECOPOP (http://www.ecopop.ch/joomla15/index.php?option=com_content&view=article&id=337&Itemid=17&lang=fr). Une « initiative » est l’aboutissement d’une démarche pétitionnaire de demande de référendum. Cette dernière porte sur la limitation de la population de la Suisse dans le but de préserver de façon durable les ressources naturelles. Ecopop revendique que la « croissance dramatique de la population mondiale soit réduite par un soutien au planning familial et que l’immigration nette en Suisse soit limitée ».
Sur le premier point, 10% des moyens que la Suisse consacre à la coopération internationale devront être consacrés à la planification familiale, ceci dans les pays jugés les plus surpeuplés, en Afrique ou en Asie.
Sur le second point, la part de l’accroissement de la population résidente en Suisse de façon permanente, et attribuable au solde migratoire ne devra pas excéder 0,2% par an, chiffre moyen calculé sur une période de trois ans.
Cette initiative référendaire fait déjà l’objet d’un vaste débat en Suisse, quand bien même elle est restée largement inaperçue depuis plusieurs mois. Le dépôt des signatures a réveillé les commentaires. Tout d’abord, cette démarche est lancée par une vieille association écolo (1970), certes globalement de droite mais rassemblant quelques personnalités de l’ultra-gauche. Elle surprend par sa radicalité, pourtant inscrite dans les gènes de l’association. Les Verts authentiques de Suisse se divisent et se déchirent à son propos, les uns la soutenant, les autres l’exécrant. L’objectif déclaré est celui de la conservation des ressources naturelles et du maintien de la qualité de la vie pour les Suisses d’aujourd’hui et ceux de demain. Aux facteurs classiques de consommation individuelle et de choix technologiques (énergies fossiles, nucléaires ou alternatives), Ecopop ajoute le nombre d’individus qu’elle estime trop élevé en Suisse.
Le but poursuivi n’est donc pas tant la protection de la nature, comme certains l’affirment trop vite, mais de préserver les ressources pour l’avenir. Les militants d’Ecopop veulent lutter contre la « bétonisation », soulager les services de transport, protéger le paysage culturel …
L’autre sujet de discussion porte, comme on peut s’y attendre, sur l’immigration puisque le taux de renouvellement de la population suisse d’origine endogène n’est que de 1,5, très loin du taux de 2,1 nécessaire au maintien des populations à niveau constant. L’augmentation de la population provient de l’immigration et des enfants des immigrants.
Mais qui sont les immigrants ? D’où viennent-ils ? Combien sont-ils ?
La Suisse comporte près de 8 millions d’habitants (7954700 au dernier chiffrage à fin 2011!), avec un accroissement de 84500 personnes par rapport à 2010,soit une croissance de 1,1 % comparable à celle de 2007 ou 2009.
A fin août 2012, la population d’origine étrangère et résidant en Suisse était de 1804551 personnes (admirez la précision des chiffres !), soit 22,7 % de la population totale.
Parmi eux, 1176587 personnes (soit 65 %) étaient en provenance de l’Union Européenne (27 Etats membres) et de l’Association Européenne de Libre Echange (AELE; Islande, Norvège, Liechtenstein). Ces immigrés en provenance de l’UE/AELE ont augmenté de 4,2 % par rapport à l’année précédente, soit + 46949 personnes.
Les autres immigrés, donc en provenance de pays autres que ceux de l’UE/AELE, et qui représentaient 35 % du total des immigrés, étaient au nombre de 627964 personnes, en augmentation de 1 %, soit + 6301 personnes.
Les immigrants résidents se ventilent ainsi: italiens (16,2 %), allemands (15,6 %), portugais (13 %), français (5,6 %), kosovars, macédoniens, turcs (quelques 3,9 % pour chacun).
Il est à noter que les asiatiques au sens large de toute l’Asie, ne représentent que 5 % des migrants, les africains, Maghreb compris, 3,5 % et l’Amérique du Sud + Centrale 2,7 %.
Les immigrés de la Suisse ne sont donc pas les immigrés d’autres pays d’Europe et le débat Nord-Sud ne saurait y avoir une prégnance aussi importante qu’en France, par exemple. Notons cependant au passage que la Suisse naturalise de 37000 à 47000 personnes d’origine étrangère par an, depuis dix ans !
Alors si une telle « initiative » se traduit par un référendum, et que celui-ci est approuvé par une majorité, que se passera-t-il ?
La population suisse s’accroît de +80000 personnes par an. Réduire ce nombre à 15000 par an entraverait de façon dramatique la capacité de développement économique du pays, ainsi que les moyens des services tels les hôpitaux ou le système scolaire. En effet, les migrants essentiellement européens sont des migrants hautement qualifiés, en bonne santé, qui assurent la viabilité de tout le système social suisse marqué par un vieillissement de la population autochtone. Sans parler des impôts !
Vouloir réduire la population, à des fins écologiques, en agissant sur les migrations est absurde. Les migrants rejetés iront ailleurs et consommeront ailleurs. Qu’on le dise franchement; il ne s’agit ici que de défendre égoïstement SON environnement. Les militants de la limitation de l’immigration invoquent l’exemple français où la « grande banlieue est synonyme d’acculturation, de pauvreté et de violence ». Qu’ils se rassurent: la majorité de leurs migrants ne vivent pas en grande banlieue !
Mais là où l’initiative Ecopop devient franchement xénophobe, c’est là où elle prétend imposer à la Suisse de consacrer ses fonds à la limitation des naissances dans les pays pauvres.
On rejoint les tendances de fond de l’écologie radicale, celles de la décroissance, de la relocalisation, du refus des échanges (avion, tourisme, migrations …). A n’en pas douter, les deux « initiatives » (UDC contre l’immigration de masse et Ecopop Halte à la surpopulation), quand elles seront soumises à votation, seront des pièces maîtresses du débat sur la croissance et la démographie. La Suisse va t-elle rehausser ses montagnes de quelques rangs de moellons et se replier encore davantage sur elle-même pour revenir au pays d’Heidi ?
La Suisse va t-elle encore nous donner un signal précurseur de ce qui va se passer en Europe ?
Toutes les statistiques suisses en matière d’immigration sont ici (http://www.bfm.admin.ch/bfm/fr/home.html).
Un site pour une réflexion approfondie ici (http://www.alliancesud.ch/fr/documentation/projets/la-jeunesse-debat/ecopop).