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Mali

La France n’a rien à foutre militairement au Mali

C’est difficile et c’est triste à dire, mais il existe des intellectuels africains prompts à retourner leurs sentiments. Il n’y a pas un mois que le nouveau président français est élu et qu’il a pris ses fonctions que déjà certains lui lancent des appels à aider le Mali.
Afin de justifier un aussi rapide revirement, ils précisent que la France de Sarkozy ne leur a jamais rien donné et qu’au contraire elle leur a pris et les a maltraités. Comme de bien entendu, ressort comme un tarte à la crème le discours de Dakar, mal lu et mal cité, ou bien les accords d’immigration rejetés par ATT. Ces intellectuels se sont-ils mobilisés pour défendre le bilan d’ATT lorsque celui-ci a été chassé du pouvoir ?

Le Mali vit une situation catastrophique: situation de guerre au nord, situation humanitaire des réfugiés qui quittent le pays pour la Mauritanie ou le Niger, situation idéologique insupportable avec la proclamation d’un Etat islamique de l’Azawad et surtout les exactions quotidiennes de « combattants » livrés à eux-mêmes, situation politique incontrôlable à Bamako.

Un membre d’Ansar Dine (C)Romaric Ollo Hien/AFP

La France tient-elle actuellement un nouveau langage à l’égard de l’Afrique ? Probablement pas.
Laurent Fabius n’a pas autre chose à dire que « nous tiendrons un autre discours que celui de Dakar ». Est-ce bien vrai ? Un fois enlevé (avec justesse) le volet colonialiste et daté du discours de Dakar, le fond reste le même !

Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense, vient de le dire tout clairement.
« Le dispositif français en Afrique fera l’objet d’un nouveau Livre blanc évaluant les menaces et le rôle que la France doit jouer. Nous sommes très préoccupés par la situation au Sahel. Il y a des risques majeurs qu’il devienne un nouveau sanctuaire du terrorisme, avec, en plus, la dislocation du Mali. Il faut retrouver les principes de l’intangibilité des frontières, de l’intégrité du pays. Mais nous n’avons pas l’intention de revenir aux traditions d’ingérence. Il est indispensable que les organisations africaines agissent. C’est une fois qu’un mandat des Nations Unies, sollicité par les organisations africaines, sera décidé, que nous apprécierons la manière dont la France, qui ne doit pas fuir ses responsabilités, s’associera militairement. Il est souhaitable que des initiatives soient prises rapidement. L’idéal serait que l’ensemble soit accompagné par l’Europe, ce serait une forme de responsabilisation vis-à-vis de l’Afrique. C’est à partir du moment où il y aura un mandat que nous pourrons agir et activer nos éléments de soutien sur place. »

Mais de quelle responsabilité française parle t-on ? Et de quelle responsabilisation européenne ? Celle qui est née du colonialisme ? Et jamais nous ne nous posons la question de savoir si les peuples africains (et non quelques intellectuels ludions) ont envie et ont besoin de cette « responsabilité ». Relisez donc ce fameux discours (ou lisez-le une bonne fois pour toutes): vous y trouverez les mêmes références à des liens historiques, des liens de solidarité avec l’Europe.

La France n’avait rien à faire en Libye, elle n’y a pas respecté le mandat qui lui avait été confié, elle a fait d’énormes dégâts que payent au comptant le Mali, la Mauritanie, le Niger …
La France n’a rien à faire en Syrie et la première raison en est justement le non-respect du mandat précédent en Libye.
La France n’a rien à faire militairement au Mali. Cela ne fera qu’ajouter des désastres aux désastres …

Davantage qu’intervenir militairement, l’Europe doit faire connaître ses choix à haute et intelligible voix auprès des organisations africaines.
L’Europe doit aider l’Afrique à se définir un modèle de développement, et à le mettre en œuvre. La solution malienne se trouve dans la prise en charge de l’ensemble de l’avenir du pays par les maliens eux-mêmes, toutes populations et religions confondues.
Là est le rôle de la France et de l’Europe: pas dans les armes …

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Egypte

L’Egypte a t’elle un avenir démocratique proche ?

Les évènements se bousculent actuellement sur le sol égyptien: jugement de Moubarak et relaxe de certains des hommes de l’ancien régime, élections présidentielles dont le premier tour a sélectionné la candidat des Frères Musulmans et un ancien ministre de Moubarak prompt à retourner sa veste. En toute hypothèse, le candidat des Frères Musulmans devrait l’emporter les 16 et 17 juin prochain. Même si cela entraîne la fureur des militants « révolutionnaires » et « libéraux », cela n’est que normal.
Cela a été suffisamment dit et développé ici. La « révolution » égyptienne n’est pas une révolution populaire.

Hosni Moubarak lors de son procès (DR)


« Pourrions-nous considérer ces révolutions comme des mouvements populaires spontanés réunissant toutes les couches sociales de la nation. Au lieu de permettre l’arrivée au pouvoir d’une nouvelle classe facilitant la domination d’un nouveau mode de production, ces mouvements viseraient à normaliser le système capitaliste. Sur le plan économique, cette normalisation consisterait à éliminer la figure du rentier, parasite et exploiteur. Sur le plan politique, elle tendrait à détruire les vestiges des partis uniques ou hégémoniques ». (Renaissances arabes-M. Béchir Ayari, V. Geisser (p.20).

La démocratie réelle n’est pas le souci premier des jeunes. Celui-ci est d’obtenir un emploi et de pouvoir prendre part au gigantesque pique-nique que notre société étale quotidiennement sur les écrans et les magazines. Cette jeunesse connectée à Internet ne transformera pas en chemin ces révolutions vers la démocratie réelle. Tout d’abord, parce que la connexion à Internet est une vaste illusion. Sur quelques 84 millions d’habitants qu’abrite l’Egypte, combien disposent d’un outil permettant d’envoyer des SMS, de Twitter, d’échanger sur les réseaux sociaux, même si pratiquement 8 égyptiens sur 10 disposent d’un mobile ? Combien ont le moyens de se payer un abonnement, alors qu’ils sont chômeurs ? Cette illusion est entretenue par 2-3 blogueurs qui ont réussi à se faire leur pub auprès d’organes de presse européens ou US: ils iront jusqu’à publier des livres. Qui les lira en Egypte ???
« Croire que Facebook a fait naître les révolutions, c’est croire que les nuages font naître le vent ». (Extrait du Magazine Là-Bas)

Depuis le début de la révolution égyptienne, les forces libérales ont accumulé les erreurs. Elles ont été incapables de s’entendre sur une plateforme constituante. Elles ont été incapables de s’entendre sur des candidats aux législatives et sur un candidat unique à la Présidentielle. Elles ont systématiquement traduit chaque évènement par un appel à la manifestation ou un appel au boycott des élections.
Elles sont allées jusqu’à dénoncer le rôle économique de l’armée, en appelant au boycott des produits qu’elle fabrique. Catastrophique erreur, car si l’armée produit des appareils ménagers, des engrais, de l’eau minérale et tant d’autres choses encore, c’est tout d’abord afin de faire vivre son million d’hommes sous le drapeau, leur femme et leurs enfants. Réussir un pareil boycott, c’est agresser l’armée dans ses besoins vitaux.
Au-delà de l’affirmation toute gratuite de l’existence d’un empire économique dans les mains des Forces Armées, personne jusqu’à présent n’a été capable d’en faire la démonstration. Il s’agit d’un empire bien fragile quand on sait que l’armée est … la première cliente de ce qu’elle fabrique !

Et prenons garde à ne pas détruire l’armée, car c’est entre ses mains que se trouve la régulation du marché de deux marchandises subventionnées: la farine et le pain (aïch baladi).

Le résultat de toutes ces erreurs ne s’est fait pas attendre: les « révolutionnaires » sont coupés de la population, ce ne sont pas les manifs de la Place Tahrir qui doivent faire illusion. Il y a beaucoup d’anarchisme dans leur comportement. L’économie est dévastée, contrairement à ce qu’une réaction « capitalistique » aurait pu laisser espérer.

Y a t’il un espoir ? Très certainement, oui !!! Mais il ne viendra pas des leaders actuels, mais de quelques hommes politiques, cultivés, au fait des affrontements humains et de l’histoire. Ce seront ceux qui réussiront à construire une véritable opposition démocratique.
Il y faudra sans doute quelques années, mais le pays en vaut la peine …

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Mali

Jeter ATT avec l’eau du bain

Jusqu’à quelle mesure un journaliste peut-il faire primer ses positions personnelles par rapport à son rôle de chroniqueur, de commentateur, de passeur des évènements ? La question se pose à la suite d’un article de Jean-Philippe Rémy, dans « Le Monde » du 10 avril. Il y a certes déjà quelques jours, mais l’évènement était assez gros pour qu’on attende une suite. Or, depuis,il n’est point de suite. Jean-Philippe Rémy ne parle plus du Mali. Il a, semble t-il, été remplacé par Isabelle Mandraud. Et dans la dernière édition du « Monde », il en revient à son thème habituel: l’opposition au président tchadien Idriss Déby.

Amadou Toumani Touré (DR)

Qu’a t-il donc écrit le 10 avril ? Après avoir donné la parole à un énième représentant de l’ICG (International Crisis Group) qui a estimé que « les coups de force sont toujours possibles dans la région, notamment parce que la constitution d’une démocratie électorale ne garantit pas une consolidation de l’Etat » (tout ceci en italique = citation), Jean-Philippe Rémy a poursuivi ainsi à titre personnel (en caractères normaux): « La « démocratie consensuelle » dont s’enorgueillissait le Mali était bâtie sur du sable. De nombreux responsables appelaient de leurs vœux ce coup d’Etat pour mettre fin aux années Amadou Toumani Touré et à son régime de prébendes« .

Remercions ce journaliste pour nous informer de la fragilité de la démocratie malienne ! Mais pourquoi a t-il attendu les évènements de mars pour nous en informer alors qu’il est en place en Afrique depuis des années ? Certes, il est devenu à la mode, après tout renversement de pouvoir, de se ranger du coté des nouveaux maîtres afin de pouvoir poursuivre ses activités !
Et comment qualifier cette approbation du coup d’Etat, afin de mettre fin à la corruption, alors même que nous sommes à un gros mois d’élections présidentielles, normalement programmées, et pour lesquelles nombre de candidats se sont présentés: une bonne –dizaine– vingtaine ?

Mais, au fond, Amani Toumani Touré mérite t-il un tel traitement ? Certes, il a mal débuté sa carrière d’homme d’Etat en s’emparant du Mali par un coup de force le 26 mars 1991, il y a 21 ans, presque jour pour jour, dans le but de mettre un terme au régime dictatorial de Moussa Traoré. Mais il a renoncé, dès 1992, à ce pouvoir en le remettant à la société civile et, s’il est revenu au pouvoir en 2002, c’est de manière élégante et totalement démocratique, même si d’aucuns considèrent comme fragile la démocratie électorale !

Depuis, qu’à t-il fait ? Consolider cette fameuse démocratie pour faire du Mali un modèle pour l’Afrique.
On peut citer l’Espace d’Interpellation Démocratique (Espace-d-Interpellation-Démocratique), cette structure-forum qui permet (certes de façon sans doute un peu formelle) aux grands courants de pensée politique et aux mouvements sociaux de s’exprimer.
On peut citer l’attitude acharnée d’ATT pour défendre ses Maliens de l’extérieur, représentés par un Ministère, et pour les droits desquels il a refusé de signer les accords de gestion des migrations proposés par la France, là ou d’autres pays africains et/ou arabes ont signé.
On peut citer encore les vraies discussions autour du statut de la famille (donc de la femme). Certes, il est loisible de regretter qu’il ne soit pas aussi progressiste que souhaitable, mais il est le fruit d’un large consensus démocratique obtenu par une méthode que les occidentaux ne devraient pas négliger !
On peut citer toujours le classement du Mali en termes de liberté de la presse (symbole de démocratie, Monsieur Rémy ??). En 2011, aux dires de Reporters Sans Frontières (http://fr.rsf.org/press-freedom-index-2011-2012,1043.html), le Mali est au 25° rang mondial, tandis que la France émarge au .. 38° rang.
On peut citer enfin la ferme décision d’ATT de ne pas trafiquer la constitution malienne afin de pouvoir se représenter. D’ailleurs cette volonté, affirmée à maintes reprises et jamais contestée, est quelque peu contradictoire avec l’affirmation récente que le régime d’ATT était totalement corrompu.
Alors, bien entendu, on peut parler du classement du Mali en matière de corruption, dressé par Corruption Transparency (http://www.transparence-france.org/ewb_pages/div/Indice_de_Perception_de_la_Corruption_2011.php). Le pays se situe au 118° rang mondial, alors que la France est au 25° rang.
On peut parler aussi de l’Indice de Gouvernance Mondiale (http://www.world-governance.org/IMG/pdf_IGM_version_courte_FR_web-2.pdf), un classement dans lequel la Norvège ouvre la liste, la France y est 15° et la Mali 127°, certes en recul depuis 2008. Dans le classement particulier des pays africains, le Mali est au 18° rang, au-dessus de la moyenne africaine, ce qui en fait un pays presqu’honorable.

ATT a été un démocrate (La-fin-de-Khadafi-et-la-fin-d-ATT), sans doute beaucoup trop enclin à la discussion, aux palabres, sans que ce mot ne soit en rien insultant ou irrespectueux. Il a ainsi cru que ses amitiés pourraient contenir les tensions au nord, il a peut-être laissé aussi quelques membres de son entourage se servir plus que de raison, … Mais Amadou Toumani Touré ne mérite pas des jugements à l’emporte-pièce, tout comme il n’a pas mérité cette sortie peu glorieuse par la porte de derrière. Une fois la situation redevenue « normale » au Mali, on peut espérer que cet homme puisse s’exprimer et dire à son peuple combien il lui a été fidèle.

PS: Slate Afrique publie des articles TRES utiles à propos de la situation malienne. Entre autres (http://www.slateafrique.com/85759/nord-mali-faut-il-remettre-la-faute-sur-les-occidentaux-qui-ont-fait-partir-kadhafi) …

Et puis, Maliblog (http://mali50.wordpress.com/). C’est réfléchi, c’est à lire …

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Mali

La fin de Khadafi et la fin d’ATT

Ce n’est pas un titre de gloire, mais le 30 octobre 2011, ici-même (Sauver-Benghazi-pour-mieux-punir-Syrte-…), nous annoncions ce qui allait, ce qui devait se passer dans cette vaste zone qui va de la Libye au Mali. Et nous parlions de désastre. De plusieurs désastres, car les motivations de la guerre menée en Libye, et les conditions dans lesquelles elle s’est réalisée, ne pouvaient pas déboucher sur autre chose.

Mais auparavant, faisons commentaire d’une info dont Mediapart s’est fait le porteur et qui s’avère être un véritable « flop ».
Le 12 mars, Mediapart publie un article selon lequel le financement de la campagne 2007 de Sarkozy aurait été financé, à hauteur de 50 millions d’euros, par Khadafi, son fils Saïf Al Islam, avec Brice Hortefeux pour intermédiaire. Ces informations, tapées en caractères sibyllins sur un vulgaire bout de papier, dateraient d’octobre 2005. Curieusement, aucun organe de presse ne développe cette information. Tous, en France, mais aussi en Belgique ou en Suisse, reprenne le contenu de l’article de Mediapart, mais quasi personne ne fait le moindre commentaire. A deux exceptions près. Celle du Réseau Voltaire, Thierry Meyssan, sur laquelle on ne s’étendra pas, sauf en ce qui concerne une bizarre accusation: si la campagne de Sarkozy a été financée par Khadafi, il en aurait été de même pour la campagne de …. Ségolène Royal. L’autre exception est celle de Marianne dont Philippe Bilger (http://www.marianne2.fr/Kadhafi-et-si-BHL-avait-servi-a-brouiller-les-pistes-du-financement-de-la-campagne-2007_a216408.html), dans son blog, souligne que bien des choses restent incompréhensibles alors qu’il laisse entendre qu’il doute de la sincérité de ce « mémo » présenté par Mediapart.

Coup de tonnerre, quatre jours plus tard, Mediapart déclare que Jean-Charles Brisard, son « indicateur », retirait tout ce qu’il avait pu dire au motif qu’il avait « été associé malgré lui à de soi-disant révélations ». Et là, curieusement, personne ne cite ce démenti, strictement personne.
Pourtant, il est loisible de se poser un certain nombre de questions.

  • Le 16 mars 2011, Saïf Al Islam, particulièrement remonté, accordait une interview à Euronews et déclarait que son père avait financé la campagne de Sarkozy.  » Nous avons les preuves, tous les détails, les comptes bancaires, les documents et les opérations de transfert ». Le 12 mars 2012, dans Mediapart, Jean-Charles Brisard déclare qu’il a un dossier, des notes, des documents de transfert. Curieux hommes que ces « mafiosi » qui gardent une trace réglementaire de tout ce qu’ils trafiquent !! Et pourquoi Khadafi n’a t-il jamais mis à exécution ses menaces de publication des fameux comptes bancaires ?
  • Une autre question vise à comprendre pourquoi Sarkozy aurait décidé de trahir aussi brutalement son donateur. Dire que c’est pour effacer les preuves de ce financement relève du « cinéma ».
  • Nicolas Sarkozy avait-il vraiment besoin de 50 millions ? Alors qu’il semble, à ce que l’on raconte, que la famille Bettancourt était à même de lui en donner à guichet ouvert ?
  • Et enfin, pourquoi ce prétendu bout de papier écrit en 2006 arriverait aujourd’hui, et seulement aujourd’hui, dans la rédaction de Mediapart ?
    Le problème, c’est que l’Internet laisse derrière lui une longue traîne. Lorsque « Rue89 » a déclaré que Camatte était un agent secret, à le suite probable d’une mauvaise interprétation d’un commentaire de fonctionnaire, cela n’a jamais été démenti et cela traîne encore dans de nombreux sites africains. Gageons qu’il en sera de même pour le financement de la campagne 2007 de Sarkozy …

    Cet imbroglio qui a présidé à la décision de faire la guerre en Libye et d’y supprimer Khadafi est donc à l’origine de plusieurs désastres.
    Le premier désastre potentiel était celui d’un risque de transfert de conflit d’une terre à l’autre. C’est chose faîte puisque les touaregs du MNLA, lourdement armés, ont quitté la Libye et sont rentrés au Mali pour y réclamer l’indépendance de l’Azawad (L-Azawad-et-le-Mali). Ils y mènent une guerre violente, dure, cruelle et rien ne les arrête. Les populations civiles fuient vers le Niger ou vers la Mauritanie (plusieurs centaines de milliers) et viennent gonfler d’autres populations déjà en situation de souffrance alimentaire.
    Le second désastre potentiel était celui d’une partition de la Libye. C’est chose faîte, ou presque, puisque la Cyrénaïque réclame son autonomie, avant de réclamer son indépendance. Celui également d’une partition du Mali puisqu’au-delà de la revendication d’indépendance de l’Azawad (curieusement limité aux frontières officielles du Mali), un groupe salafiste revendique maintenant (http://www.slateafrique.com/84371/de-nouvelles-fissures-dans-la-rebellion-touaregue-au-mali) son autonomie et veut étendre la loi islamique à l’ensemble du Mali.
    Ici, comme en Libye, le troisième désastre potentiel était bien de laisser le champ libre à tous les agitateurs religieux qui se multiplient au cœur de cette vaste zone quasi désertique: salafistes, AQMI, … Là aussi, c’est chose faite.

    Comme un désastre ne vient jamais seul, l’armée régulière malienne (une partie ?) vient de renverser ATT. Si elle a quelques griefs solides à exprimer au Président de la République du Mali, et notamment celui d’être abandonnée au fond du Nord, sans appui logistique (il a fallu qu’un hélicoptère de l’armée américaine largue des vivres !), et régulièrement massacrée par les combattants touaregs, cela ne l’autorisait en aucune sorte à prendre le pouvoir. D’autant plus, s’il s’agit de déclarer que l’on va organiser des élections, alors même que celles-ci devaient se tenir dans un mois !! Curieuse et inquiétante conception de la démocratie.
ATT (C)Reuters/Pool New

ATT est un démocrate. Dans le contexte africain, il dénote avec sa ferme volonté de ne pas faire de nouveau mandat, (il en a fait deux) et de céder la place. ATT a joué un rôle capital à l’égard de la part importante de ses compatriotes exilée en Europe, en France particulièrement: les Maliens de l’extérieur. Il s’est opposé à plusieurs reprises et avec fermeté à la signature d’accords de gestion concertée des flux migratoires avec la France, accords dont Besson, puis Hortefeux, s’étaient fait les champions. ATT s’est enfermé dans un refus de faire la guerre à AQMI dans le nord du pays, une guerre qu’il disait ne pas être la sienne, ni celle du Mali. C’est pour cela qu’il a été considéré comme le maillon faible de la lutte contre le terrorisme. Et quand les touaregs sont rentrés au pays pour affronter le pouvoir central, avec la complicité réelle ou tacite (malgré leurs dénégations) des islamistes, il n’a pas vu que la dimension du conflit et le rapport de forces n’étaient plus les mêmes. Le point de vue de Slate ici (http://www.slateafrique.com/84473/le%20bilan-conteste-de-amadou-toumani-toure).

Ce désastre-là ne fait que commencer. Les populations du nord, comme du sud, n’ont pas fini d’en souffrir, les libertés de choix et de convictions d’en pâtir, et la région toute entière (Mali, Niger, Sénégal, Burkina) d’en être durablement déséquilibrée.