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Cinéma Les Méliès

Les Méliès, cinéma de Saint-Marcellin; un bel octogénaire (1)

I – Le cinéma à Saint-Marcellin au début du siècle dernier

Voici bientôt près d’un an, Nina Crouzet m’a adressé un mail par lequel elle recherchait des informations relatives à l’histoire du cinéma de Saint-Marcellin, actuellement désigné sous le nom des « Méliès ». Cette demande s’inscrivait dans le cadre d’études consacrées au cinéma, dans le but de rédiger un dossier sur l’histoire d’une salle de son choix.

Si Nina a choisi la salle des Méliès, ce n’est pas tout à fait « innocent ». Son père, son grand-père, son grand-oncle ont eu à connaître étroitement ce lieu et ce bâtiment : elle était donc bien placée pour disposer des premiers éléments.

Pour ma part, j’ai répondu très favorablement à ses sollicitations parce que je m’intéresse à l’histoire de Saint-Marcellin au cours du XXème siècle et que le bâtiment qui héberge ce cinéma présente un intérêt architectural évident pour la ville.

Afin de susciter un dossier le plus exhaustif possible, j’ai pris l’initiative de mobiliser l’association patrimoniale « Groupe Rempart » dont je fais partie (ceux de ses membres qui le souhaitaient !) afin de mettre en œuvre une réflexion collaborative sur l’histoire de ce cinéma. Ce texte est la somme de toutes ces collaborations, illustrées par de nouvelles recherches d’archives, le tout ordonné de façon à faire ressortir toutes les facettes de la vie de cette salle.

La première fois où il a été question de projection d’images à Saint-Marcellin, c’est probablement le 14 mars 1902, en séance du Conseil Municipal. Ce jour-là, Victor Matraire, déjà maire de la ville depuis dix ans, « informe son Conseil qu’à l’occasion des conférences populaires organisées au Théâtre Municipal, il est nécessaire pour intéresser le public qu’elles soient suivies de projections. Il a, en cette circonstance, fait l’acquisition d’un puissant appareil de projections, dont le prix est de cent cinquante francs. Il demande au Conseil l’autorisation d’en acquitter le montant auprès de la maison Radiguet et Massiot, 44 rue du Château d’Eau, à Paris. »

« Le Conseil Municipal,

Considérant que cette dépense a son utilité,

Considérant que les démarches seront faites auprès de l’autorité supérieure dans le but d’obtenir une subvention du Gouvernement,

Autorise M le Maire à mandater à MM Radiguet et Massiot la somme de cent cinquante francs pour fourniture d’un appareil à projections lumineuses et ses accessoires, dit que cette somme sera prise sur le crédit de F 1200 inscrit au budget primitif de 1902, article 120, sous le titre « <Dépenses imprévues », prie le Préfet de bien vouloir approuver la présente délibération et le paiement comme ci-dessus. »(1)

L’appareil de projections dont il est question ne pouvait permettre que de projeter des images fixes à l’unité (comme des diapositives) ou en petites bandes de quelques images. En effet, ce n’est qu’en 1903 (l’année suivante !) que la Société Radiguet et Massiot mettra dans son catalogue des appareils désignés sous le vocable de « cinématographie », lesquels disposeront d’un « débiteur-rembobineur » et permettront la projection de bobines de plus de 35 mètres, voire de 300 à 500 mètres. Il s’agit du procédé inventé par les Frères Lumière, en 1895, d’après le « kinétoscope » de Thomas Edison.

Projecteur d’images Radiguet et Massiot (DR)

Rapidement, le cinéma se développe et les lieux de projection se multiplient. Le support des films est constitué d’une pellicule en nitrate de cellulose, un produit dangereux car extrêmement inflammable, au point qu’il est désigné par le vocable de « film-flamme ». De ce fait, la projection est limitée à une durée de 40 minutes, grâce à l’utilisation de deux projecteurs jumeaux, soit 2 X 20 minutes.

En date du 25 mars 1930, le Conseil Municipal, présidé par Georges Dorly, maire, désigne, sur demande du Préfet, une commission de contrôle des salles de Saint-Marcellin. C’est ainsi que cette commission se déplace, le 1er avril 1931 (il lui aura fallu un an !) auprès du « Cinématographe installé dans la Salle des Fêtes », du « Cinématographe installé par l’Amicale Laïque dans les dépendances de l’Ecole Supérieure Boulevard Riondel » (devenu Bd du Champ de Mars) et du « Cinématographe installé dans les dépendances du presbytère ». A ces trois opérateurs, les observations faites portent essentiellement sur le renforcement de la séparation entre cabine de projection et salle destinée au public. La cabine de projection doit être recouverte de métal isolant du feu et munie exclusivement d’un orifice permettant le passage du faisceau optique vers les spectateurs, cet orifice étant équipé d’un obturateur. Cabine de projection et salle du public doivent disposer d’extincteurs et de grenades extinctrices.(2)

Ce n’est qu’en 1951 que le film nitrate sera définitivement interdit et remplacé par une pellicule d’acétate de cellulose.(JB)

Les communes voisines ne sont pas en reste. La Société d’Education Populaire de Saint-Antoine, dont le secrétaire est le vicaire Pierre Gallard, déclare l’ouverture de sa salle de cinéma dans les locaux du patronage paroissial à la date du 23 novembre 1930. (Archives Départementales Isère)(JB)

  • 1 – Archives Municipales – Recueil des délibérations
  • 2 – Archives Départementales

Pour davantage d’infos quant à la naissance des matériels de projection, voir : cinematographes.free.fr

Contributeurs

  • – Archives Municipales
  • – Pierre Ballouhey (PB)
  • – Marina Bertrand (MB)
  • – Michel Bompard (MB2)
  • – Jean Briselet (JB)
  • – Pierre Chambard (PC)
  • – Daniel Coindre (DC)
  • – Nina Crouzet (NC)
  • – Nadia et Jean-Pascal Crouzet (NJPC)
  • – Marc Ellenberger (ME)
  • – Denise Hebert (DH)
  • – Dominique Mitéran (DM)
  • – Philippe Pineau (PP)
  • – Benoit Thierry (BT)

Synthèse, mise en forme et rédaction : Jean Briselet, membre de « Groupe Rempart » – Reproduction interdite, sauf accord avec l’auteur.