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La CGT, Dunkerque et Total

Les périodes pré-électorales sont propices à ce genre d’affaires et de conclusions désastreuses. Après quelques jours de blocage des raffineries, et sous la forte pression du gouvernement, la CGT vient d’obtenir l’engagement de Total de ne fermer aucune raffinerie française pendant cinq ans, à l’exception de celle de Dunkerque qui sera soit rouverte, soit transformée en une autre activité industrielle. Sur ce dernier point, il n’y a aucune différence par rapport aux précédentes déclarations de Total qui déclarait cesser les activités de la raffinerie sans licenciement.

Objectivement, cette grève n’avait même pas pour motif le maintien des emplois, mais le maintien strict d’une activité industrielle existante. Et c’est là qu’il y a problème.

« A défaut de changements majeurs de son modèle économique, la France s’oriente au cours de la prochaine décennie vers une croissance bloquée en dessous de 1 % par an, un chômage permanent, une spirale de déficits de la balance commerciale et des comptes publics, avec une impasse structurelle de 5 % du PIB. Les remèdes sont connus. Du côté du marché du travail, la priorité doit aller au soutien de l’emploi, à l’accompagnement personnalisé des chômeurs, à l’intégration des immigrés, à la formation initiale et continue, enfin et surtout, à la flexibilité. Mais la clé demeure le rétablissement de la compétitivité qui passe par le développement prioritaire du secteur marchand, notamment de l’industrie, par un effort de productivité dans le secteur public, enfin par la refondation de la nation* ».

Cela demande des efforts intellectuels, certes, mais la défense de l’emploi ne doit pas (plus) signifier la défense de l’emploi existant. Il serait temps de sensibiliser les salariés à la nécessaire évolution de leur carrière, et de les y aider par l’accompagnement et la formation adéquats. Il y avait, au cours des années 1990-2000 une meilleure prise en compte de la flexibilité que celle que nous constatons actuellement.

Dans cette affaire Total, que voyons-nous ?

Dans cinq ans, quelle sera le besoin en carburants en France ? Alors que les constructeurs sont dans l’obligation de réduire toujours davantage la consommation de leurs véhicules ? Alors que le véhicule électrique et/ou le véhicule à hydrogène auront (espérons-le) pris de l’ampleur ? Alors que les consommateurs auront poursuivi le changement de leurs habitudes, avec plus de covoiturage, moins d’automobiles en centre ville, plus de déplacements doux ? Alors que la consommation baissera pour de simples raisons économiques liées au coût du carburant qui ne manquera pas de remonter, car dans cinq ans nous serons au “Peak Oil” ?

La CGT qui n’a rien compris aujourd’hui, se trompe et trompe les salariés. Dans le cas présent de Dunkerque s’il faut des emplois industriels, ce n’est plus prioritairement dans la raffinerie, mais probablement dans les énergies renouvelables. Il en est de même pour les autres raffineries du groupe et dans cinq ans, il sera trop tard pour le reconnaître.

Grève à la raffinerie de Donges (C)Ouest France Reuters

Pour sa part, Europe Ecologie a fait encore mieux: elle appelle le Groupe Total à la fois « à maintenir l’emploi dans ses raffineries » et à « assurer la reconversion de ses activités et de ses salariés » notant par ailleurs une « absence totale de stratégie industrielle de long terme, dans un monde où le pétrole se raréfie ». Il ne serait pas inutile de clarifier le discours, mais il faudra, là aussi, attendre des lendemains post-électoraux.

*Citation extraite de “Après le déluge. La grande crise de la mondialisation”, de Nicolas Baverez (2009)

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Copenhague ne peut pas être un échec

Dire ceci, ce n’est pas affirmer que l’échec n’est pas envisageable. C’est bien au contraire affirmer que, quel que soit le résultat de ce forum, Copenhague est d’ores et déjà un succès.

Balayons l’idée selon laquelle l’élévation de température moyenne à venir dans le monde serait fonction de la réussite ou non du Forum. Rien n’est plus faux et rien n’est plus orgueilleux. Copenhague est une réussite parce que les quelques presque 7 milliards d’individus qui constituent l’humanité y ont été quasiment représentés. Aucune idée universelle n’a été à l’origine d’une telle adhésion depuis la création de la Société des Nations, puis de l’ONU, à l’issue de la dernière guerre mondiale. Ni le Forum Social, ni les rencontres de l’OMC, sur des registres différents, n’ont eu la capacité de rassembler des hommes de tous les continents, de toutes les cultures, de toutes les orientations politiques. Même si l’ambition est légitime, il n’appartient pas à l’homme de décider des dates historiques. Si Copenhague devait prendre place dans le Mémorial de l’humanité, seule l’Histoire en décidera. Copenhague est une réussite parce que tous les peuples du monde ont pu s’y exprimer, s’y affronter, parfois durement, mais en toute liberté. N’en déplaise à certains, la démocratie y a été présente. Il est certes à la mode de contester la légitimité des gouvernants, mais elle est cependant, généralement, plus grande que celles de certains délégués autoproclamés.

De Copenhague, il restera nécessairement quelque chose. De façon banale, on dira que rien ne sera plus comme avant. Il y aura désormais un “avant-Copenhague” et un “après-Copenhague”. Jean-Marc Jancovici et Alain Grandjean ont dit en début d’année qu’il restait “trois ans pour sauver le monde »(Trois-ans-pour-sauver-le-monde). Désormais, il en reste deux, et Copenhague doit marquer le début d’un travail de fond, appuyé sur des propositions réalistes, concrètes, pratiques et non sur des utopies dangereuses (Avant-Copenhague-les-écolos-(certains)-s-énervent-…) .

Un exemple de réflexion: la nécessaire relocalisation ne doit pas donner naissance à un “localisme” condamnable. Il ne sert à rien de prétendre défendre une agriculture mondiale si en Europe seuls les français et les italiens devaient être autorisés à consommer leur riz de Camargue ou du Pô. Il ne sert à rien de ne se vêtir que de tee-shirts fabriqués en France si, ce faisant, on interdit aux industriels égyptiens ou maliens (deux pays chers à mon cœur) de transformer LEUR coton.

(C)Fotolia

Parmi les innombrables propositions concrètes, en voici deux.

1°) En cette période de fête, la lecture des dépliants de Leclerc, Carrefour, Lidl, Intermarché, Leader Price, Aldi, Dia ou Netto (la liste n’est pas exhaustive) est édifiante. Le saumon vient de Norvège ou Ecosse, la lotte de Chine, la langoustine d’Ecosse ou d’Angleterre, les noix de St Jacques du Pérou, Chili, Australie, USA, Vietnam, Argentine, Iles Féroé ou Uruguay, les gambas de Malaisie ou du Bengladesh, les crevettes d’Inde, Philippines, Equateur, Colombie, Honduras, Vénézuela ou Brésil, l’agneau de Nouvelle-Zélande ou d’Australie, l’autruche d’Afrique du Sud, le sanglier d’Australie, la biche de Nouvelle-Zélande, les haricots verts du Kénya, les champignons de Hollande ou de Pologne, les ananas du Costa-Rica ou de Côte d’Ivoire, les oranges et les clémentines d’Espagne, les litchi de Madagascar, les bananes des Antilles ou de l’Equateur, les courgettes du Maroc, les avocats du Chili ou d’Israël, les tomates du Maroc ou du Chili, les mangues du Brésil et le raisin d’Espagne. Quant au café, au thé ou au … whisky … Une vraie liste à la Prévert et un vrai Atlas Mondial !!

Pourquoi les associations de consommateurs, “Que Choisir”, “60 Millions”, etc.. ne se mobiliseraient-elles pas collectivement pour dresser la liste de ce qui est écologiquement consommable pas uniquement en termes de transport mais aussi en termes de développement des pays du sud et de ce qui est écologiquement condamnable parce que relevant avant tout de l’aspect néfaste de la mondialisation, comme les fraises à Noël ou l’agneau d’Australie. A critères précis et argumentés, choix précis et appel au boycott par les consommateurs. A terme, rien n’interdit d’imaginer que la grande distribution puisse suivre, tout est affaire de commerce et elle distribue déjà les produits “équitables”.

2°) Les villes prétendent jouer un rôle dans le nouveau monde. Il en est un tout trouvé; celui du trafic automobile. La voiture est stigmatisée comme appendice personnel et symbole de l’individualisme de nos sociétés. La critique est probablement juste, mais est totalement non-productive dans la pratique. Ce que chaque individu attend de sa voiture, au-delà de la représentation extérieure, c’est de pouvoir aller où il veut et quand il veut. Aucun système de transport collectif ne peut répondre à cette demande … sauf en agglomération. Mais pour cela, il convient d’interdire les villes aux voitures et de créer un réseau de véhicules économes en énergie (électriques ?), sortes de taxis collectifs à montée-descente rapide, permettant la dépose des bagages et colis, et surtout circulant en permanence et sans attente partout où la demande s’exprime. La notion de réseau n’est pas fortuite: le système doit s’inspirer étroitement de ce qui se passe avec l’information dans le contexte de l’Internet ou du téléphone mobile: chacun, à chaque instant, peut envoyer ou recevoir une info dans n’importe quelle direction. Un tel système n’a pas besoin d’horaires, ni d’itinéraires pré-établis, il se régulera de lui-même en fonction de la demande, tout comme la circulation de nos e-mails !

Le choix est hardi. Il impose une réorientation totale des budgets des agglomérations. Là également, il n’est pas interdit de penser que les constructeurs se mettront à favoriser la conception de “cabs” électrique, à plancher bas et porte-bagages intégré, au lieu de dupliquer leurs 4 X 4 !

( »Je rends hommage à GB, mon frère informaticien, spécialiste des réseaux, pour cette idée qu’il défend avec conviction. »)

Quel que soit son résultat, Copenhague n’est pas un échec, car le forum sera nécessairement suivi d’une intense réflexion et d’une mise en pratique d’une nouvelle société: les pays en développement y veilleront, les associations responsables s’y attèleront, le monde occidental y sera contraint … et Copenhague sera suivi d’autres conférences.

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Un nouveau 4 X 4 Renault

En plein forum de Copenhague, Renault annonce qu’il va produire un nouveau 4×4, par le biais de sa filiale roumaine Dacia. Comme cette rubrique n’a pas pour vocation de faire de la pub pour les automobiles, on se contentera de préciser que ce véhicule, le Duster, produira de 140 à 150 g/km de CO².

Ce niveau est supérieur à ce que l’Europe considère d’ores et déjà comme une “norme” à atteindre pour chaque véhicule de chaque constructeur: moins de 140 g/km. Et cette”norme” n’est pas exagérément contraignante, loin s’en faut.

Donc Renault n’a rien compris. Pour sa défense, il déclare que ce véhicule qui sera vendu à un prix record de 14000 € environ, n’est pas destiné au marché européen. Par européen, il doit falloir comprendre Europe de l’Ouest, parce qu’étant fabriqué en Roumanie, il paraît bien difficile de ne pas l’y vendre. Renault nous précise qu’il est destiné à des pays où ce type de véhicules est quasi indispensable (au moins pour les classes moyennes !); la Russie, le Brésil, le Maghreb, la Turquie, (tiens, elle aussi veut faire partie de l’Europe …), le Moyen-Orient, l’Ukraine…

Il est pourtant regrettable qu’un constructeur comme Renault ne se mette pas en pointe pour créer le vrai véhicule tous chemins, dont ont probablement besoin ces pays, qui soit enfin économe en carburant et pauvre en rejets. Non, on va au plus simple, au plus profitable, en reprenant des plateformes et des bases moteurs déjà existantes afin de créer un pollueur de plus. Les pays en développement ont besoin de se développer, certes, mais il est impératif qu’ils le fassent en prenant en compte des paramètres énergétiques et environnementaux draconiens. Il est certainement du rôle des grands industriels de les aider dans ces choix. Ce n’est pas ce que fait Renault !

(C)Dacia Renault Duster

Quant à ne pas vendre ce véhicule en Europe de l’Ouest, on dit: “Chiche ?”. N’est-ce pas déjà le discours que Renault tenait lors du lancement de la Dacia: « c’est pas un véhicule pour la France ! »

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Où l’on reparle du prix du pétrole …

Le baril de pétrole a atteint 72 $ à New York ce vendredi 12 juin. J’ai piqué le graphique ci-joint aux Echos (http://bourse.lesechos.fr/bourse/matieres/details_matieres.jsp?Code=XWTI&Place=RMSE-TR&Codif=TSB&Secteur=ENERGIE) que je remercie (droits réservés).

(C) Les Echos

Le presse nous informe qu’il s’agit là du prix du baril en octobre 2008, alors qu’il était en pleine dégringolade. Elle ne nous dit pas que ce prix était également celui du baril à mi-2006, puis à mi-2007.

Et les commentateurs économiques recommencent à se livrer à toute une farandole de spéculations: situation au Nigeria, reprise économique aux Etats-Unis ( ou dégradation moins forte que prévue), saison des migrations routières dans ce même pays alors que l’essence n’y est pas chère et que les 4 X 4 remisés à l’automne sont ressortis, reprise des importations et de la consommation chinoise, et bien entendu parce que dans les salles de marché les traders se remettent à spéculer sur l’or noir.

Comme on ne peut spéculer qu’en faveur d’un produit dont on a de bonnes raisons d’espérer une augmentation de coût, ces commentateurs économiques ont inventé un nouveau truc: les pétroliers font de la rétention ! Tous les ports du monde sont encombrés de bateaux pleins jusqu’à la gueule en attendant que les prix remontent ! Et savez-vous combien de barils représenterait ce “stockage” ? 100 millions de barils (pour info un baril c’est presque 159 litres !).

Vous allez dire qu’effectivement, ce n’est pas négligeable. Mais savez-vous quelle est la consommation quotidienne de la planète entière en matière de pétrole ? Actuellement 84,2 millions de barils par JOUR.

Ce qui revient à dire que les pétroliers spéculeraient sur la consommation mondiale en pétrole de …. 28 heures de la vie du monde !!! Une journée et quatre heures !!

C’est exactement comme si, moi, on m’accusait de spéculer sur le prix des denrées alimentaires parce que j’ai stocké dans mes placards un pack de bière, deux kilos de pâtes et six litres de lait !!

Non, la vraie raison relève de façon têtue des règles de l’offre et de la demande.

A 33 $ le baril, comme en décembre, il est économiquement impossible d’extraire du pétrole en eau profonde (coût d’exploitation 50 $), en eaux très profondes (55 $), dans l’océan arctique (70 $), dans les sables bitumeux (>60 $) et donc le pic de production du pétrole se rapproche trop vite.

A 70 $ le baril, ce type d’extraction peut être envisagé. De plus, les pays du Moyen Orient, le Vénézuela, la Russie, l’Algérie, d’autres encore sont satisfaits car la limitation volontaire de leur production porte ses fruits et leur permet d’empocher des dividendes dont ils ont grand besoin.

Donc 70 $ pour aujourd’hui. Et demain ?

Et bien demain, vers fin 2010, ce sera 90, 95, 100 $ et davantage quand la crise sera finie et que le monde, à nouveau, se rendra compte qu’il n’y a pas de pétrole pour tout le monde. Fait important, il y a au moins un analyste qui est convaincu de cette prévision: Goldman Sachs.

PS: les précédents commentaires sur ce sujet sont déjà anciens, mais il n’est pas interdit de les relire (OPEP-et-prix-du-pétrole) …