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Ecologie

Moins d’hommes sur terre, ou moins d’humanité ?

C’est en juin dernier qu’une troupe de scientifiques a publié un article dans Nature (http://www.nature.com/nature/journal/v486/n7401/full/nature11018.html) selon lequel les déséquilibres environnementaux entraineraient une perte de la biodiversité telle qu’en 2100 nous assisterions à un « effondrement » des écosystèmes.
A vrai dire, la prédiction n’est pas nouvelle. L' »effondrement » dont ils parlent est pronostiqué depuis 1968 par le « Rapport du Club de Rome », plus exactement le « Rapport Meadows » (MIT).
Ce n’est donc pas le contenu de cette thèse qui interpelle. Ce sont surtout les réactions et les commentaires qu’elle a suscités.

Tout au long de l’été, les réactions n’ont pas manqué face à la prise de position des chercheurs. Le blog Eco(lo) (http://ecologie.blog.lemonde.fr/2012/07/27/la-fin-de-la-planete-en-2100/) d’Audrey Garric, Biosphère, France 2 à propos des couples qui ne veulent pas faire d’enfants, …
Caroline Fourest, le 29 juin, a pris argument de la Conférence Rio +20 et de l’absence du droit à se reproduire pour les femmes dans les orientations de ce Forum pour formuler un vigoureux plaidoyer en faveur de la régulation mondiale de la population. Dans un post intitulé « Croissez et polluez » (http://carolinefourest.wordpress.com/2012/07/05/croissez-et-polluez/), après avoir stigmatisé l’attitude de l’Eglise et, plus paradoxalement, celle de l’Egypte, elle en conclut que « l’absence de choix de procréation pour les femmes entraîne un monde toujours plus peuplé, plus pollué, plus inégalitaire et plus injuste ».

Deux types de réactions. La race humaine est trop importante en nombre, ce qui est la cause de la désastreuse évolution de la planète. A cela deux remèdes: soit réduire drastiquement la population mondiale par une régulation volontaire (et volontariste) des naissances, soit faire en sorte que l’humanité disparaisse pour de bon !

Réduire les naissances ? Nous sommes aujourd’hui plus de 7 milliards d’humains sur cette terre. Serons-nous 9 milliards en 2050 ? Ou davantage ? La croissance est essentiellement due à l’évolution démographique des pays pauvres, ceux qui ont déjà des difficultés alimentaires. Les pays occidentaux entrent globalement dans une phase de baisse démographique. En Europe, c’est le cas de l’Allemagne, de l’Italie ..
A l’inverse, en Afrique, au Burkina, Burundi, Congo (les 2), Guinée, Liberia, Mali, Niger, Ouganda … les populations devraient tripler d’ici à 2050.
La réponse à la surpopulation mondiale (s’il y a surpopulation !) n’est pas occidentale et les couples qui refusent de faire des enfants n’apportent aucune solution au problème. Leur attitude est strictement individuelle, elle n’est même pas messianique.
Et si limitation des naissances il doit y avoir, ce ne peut être qu’en Afrique, en Asie (Inde). La Chine, pour sa part, a fait l’effort substantiel de la politique de l’enfant unique. Elle va chèrement le payer par un vieillissement de sa population. Actuellement des assouplissements ont été introduits, d’autres le seront.
D’après l’ONU, si l’on veut parvenir au chiffre de 9 milliards d’hommes dans 40 ans, il faut faire davantage que se limiter au strict renouvellement des populations. Il faudrait réduire le taux de fécondité à un niveau inférieur au seuil de remplacement, avant d’y revenir dans un siècle !
Parler de ceci en Europe, en Occident, à l’ONU, c’est s’engager sur des chemins douloureux. Des chemins marqués par des croyances, des cultures, parfois même la simple volonté de faire assez d’enfants pour en garder quelques uns tant le taux de mortalité infantile est élevé. Des chemins marqués par des idéologies, des religions (http://www.libertepolitique.com/L-information/Decryptage/Rio-20-victoire-du-Saint-Siege-contre-l-imperialisme-reproductif). on peut le regretter, mais c’est un fait qu’il existe dans certaines régions une forte opposition au contrôle des naissances. Il existe également de mauvaises expériences, faites de stérilisations forcées, d’avortements imposés. Il existe enfin un rejet du discours « colonialiste » venu d’Occident: ce sont les « blancs » qui demandent aux peuples en développement de faire moins d’enfants. En termes brutaux: « de quoi se mêlent-ils ? »

Résoudre nos problèmes d’énergie, de développement, d’écologie, de maintien des écosystèmes par une réduction de la population mondiale est une idée simpliste. Au niveau de vie des africains, la terre peut abriter bien davantage que 9 milliards d’individus ! Le vrai problème, c’est que sur les 7 milliards actuels, il en est 1 milliard qui vit dans les pays riches et qui a un impact supérieur à celui des 6 autres milliards réunis !
Plutôt que de ne pas faire d’enfant, il serait plus juste de réduire sa consommation énergétique, réduire son impact sur l’environnement ET aider les pays du sud à croître plus harmonieusement.
En Afrique, ne pas se satisfaire du seul planning familial, mais inciter à la création de nouvelles règles de vie. Christian Troubé (reporter spécialisé dans les questions Nord-Sud) le résume ainsi: « En soi, la décroissance démographique ne produit pas mécaniquement de la croissance économique. Elle doit se nourrir d’écoles, d’hôpitaux, d’emplois et de parité entre les hommes et les femmes ».

(C)PRB


Le second réflexe face aux prévisions du collectif des chercheurs qui anticipent l’effondrement des écosystèmes pour 2100 est celui d’une haine envers l’humanité. Il y avait déjà le célèbre « l’humanité va disparaître: bon débarras » d’Yves Paccalet. Il y a maintenant des gens qui « envisagent' », qui « souhaitent » cette disparition, accusant l’homme d’être responsable des dysfonctionnements de la planète: « La seule chose que je souhaite personnellement, c’est que l’humanité disparaisse rapidement » (lu dans un blog).
Quelle est la finalité de tels propos ? Quelle peut en être la justification « philosophique » ? Quel but est poursuivi en voulant placer la planète sous un statut de Parc Naturel dans lequel les espèces, hors l’homme, évolueraient selon leurs « libres » déterminismes ? Quel chaos en perspective ! Quel en est l’intérêt puisque personne ne sera là pour le voir ?
L’homme ne fait-il partie intégrante de la planète ? Et de tous les bio-systèmes ? Certes, il est le seul animal a avoir conquis l’ensemble de la terre (et un peu davantage !), le seul à utiliser (abusivement) ses ressources vivantes et ses ressources fossiles, le seul à dominer toutes les autres espèces. Mais l’homme est aussi l’humain, celui qui est seul à disposer de l’intelligence « au carré », à la « puissance 2 »: il sait qu’il sait ! Grâce et à cause de cette intelligence, il est actuellement le seul espoir de la planète.
Ce n’est sans doute pas pour demain, ni pour après-demain, l’humanité traversera bien des crises, mais son intelligence l’aidera à les surmonter, à les transcender .. ou à survivre.

Alors que les Dieux Noirs qui veulent « disparaître » le fassent. Mais qu’ils le fassent sans bruit. Et, en attendant, qu’ils se taisent.


En savoir davantage: Population Reference Bureau (http://www.prb.org/Publications/Datasheets/2012/world-population-data-sheet.aspx)

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Ecologie

L’Apocalypse selon Pascal Bruckner

Le 5 novembre, Le Monde avait consacré deux pleines pages à la dénonciation d’un supposé complot des industriels du DDT accusant les écologistes d’être à l’origine de la recrudescence du paludisme en Afrique parce que ce produit y était interdit. Ces deux pages faisaient référence au fait que Pascal Bruckner reprenait cette thèse dans son livre « Le fanatisme de l’Apocalypse: sauver la terre, punir l’homme ». Pour en trouver mention, il a fallu chercher. Jusqu’à la page 177/275, et dans un minuscule passage de …cinq lignes. Le livre précité ne saurait donc se résumer à cette polémique.

Cet essai reprend quasiment toutes les idées qui ont été exprimées ici dans ce blog au sujet des écologistes radicaux (et non pas des écologistes en général !). On y retrouve les commentaires de Latouche sur la décroissance dans les pays du Sud (Décroissance), le droit au développement (Le-droit-au-développement-vu-du-Nord-et-vu-du-Sud), la limitation des naissances, la relocalisation (Avant-Copenhague-les-écolos-(certains)-s-énervent-…), la critique, voire l’interdiction de la voiture individuelle(Niqab-automobile-et-société-social-écologiste), la relocalisation (Le-monde-de-Conrad-Schmidt), les raccourcis « démocratiques » de Dominique Bourg(Démocratie-écologique-ou-dictature-écologique), ou le discours de Michel Rocard (Les-messies-de-l-apocalypse), converti sur le tard à l’écologie radicale.
On y retrouve toutes les personnalités de ce mouvement, toutes citées à un moment ou à un autre dans les plis de ce blog: Yves Paccalet et son « L’humanité disparaîtra; bon débarras ! », Serge Latouche, Yves Cochet, Hervé Kempf, Al Gore, Dominique Bourg et Kerry Whiteside, Jean-Pierre Dupuy, Michel Rocard, Pierre Rabhi, d’autres encore, largement regroupés autour des thèses des philosophes Hans Jonas et Ivan Illich. C’est dire que ce petit livre aurait pu rencontrer notre adhésion, voire notre enthousiasme. Et pourtant, ce n’est pas le cas.

(DR)

Ce n’est pas le cas, parce que la démonstration n’est pas crédible, entachée d’ironie acerbe et de critiques parfois « limites » et contradictoires. Notre conviction est faite qu’il existe un courant écologique qui prône une décroissance de nos sociétés, au motif de la finitude de notre planète et de ses ressources. Nous avons aussi démontré que ce courant ne se caractérisait pas par son sens inné de la démocratie; les propositions élitistes de Dominique Bourg en sont un exemple frappant. Nous avons également posé la question lancinante du développement des pays émergents, et plus singulièrement celui de l’Afrique. A ce jour, les propositions vont du « détachement » de ces pays de l’ensemble mondial afin qu’ils ne suivent pas la même courbe de développement (Latouche) à l’acceptation pure et simple d’une situation de déni de justice; « l’Afrique peut enseigner à l’Occident comment s’accommoder de la frugalité » (Kempf), en passant par la mise en place de programmes autoritaires de limitation des naissances. Ce courant existe bel et bien: il est anti-humaniste, il est anti-démocratique, il est sectaire parce que défendant une pseudo religion de la terre-mère, il est égoïste parce qu’essentiellement occidental, il est malthusianiste parce que voulant imposer une limitation arbitraire des naissances dans les pays en développement, bref, il est dangereux. Il n’est pas, à lui seul, l’écologie. Le dénoncer est nécessaire. Mais le dénoncer n’est pas dénoncer l’écologie.

Alors à quoi sert-il d’enjoliver son propos avec des accusations d’antisémitisme à l’attention de José Bové ? A quoi sert-il d’accuser les radicaux de l’écologie d’être des pétainistes, alors qu’ils sont les premiers à dénoncer tous les écolos-sceptiques comme étant des « fascistes gris » ?, à quoi sert-il d’ironiser sur les tenants de l’amour des animaux et de la chute des séparations entre espèces ? Il y a bien assez à dire dès à présent, dans le cadre d’un débat démocratique et de société, pour ne pas encombrer le discours de scories et de commentaires agressifs quand ils se veulent humoristiques.
L’histoire des tenants de l’Apocalypse moderne reste à écrire.

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Développement solidaire

De retour du cœur de l’Afrique

C’est au cœur de l’Afrique, parce que c’est au Tchad et que le Tchad est au centre de ce continent. C’est au cœur de l’Afrique parce que c’est au centre du Tchad, dans la province du Guéra, dans la ville de Mongo. Et c’est au cœur de l’Afrique parce que nous vivons ici la vie africaine dans son sens le plus traditionnel du terme.

Depuis N’Djamena, il nous faut parcourir plusieurs centaines de kilomètres, tout d’abord d’une bonne route à deux voies (et à péage !), ensuite d’une piste rouge. Cette piste est en voie de transformation pour devenir une route goudronnée et rejoindre l’est du pays. Une partie du marché a été allouée à la Société Egyptienne Arab Contractors, l’autre partie est concédée aux Chinois. Lesquels chinois sont également présents dans l’exploitation d’une grande raffinerie aux portes de la capitale.

Tchad – Troupeaux sur la piste

Ce long trajet se parcourt dans une immense plaine d’altitude comprise entre 300 et 450 mètres. Il faut atteindre Ngoura pour découvrir les premiers reliefs sous forme d’immenses tas de roches dorées, énormes et pansues, un peu comme si un titan avait ramassé tous les cailloux de la plaine pour en faire des tas et permettre l’agriculture. En fait d’agriculture, elle est rare, parfois des champs de sorgho, mais l’élevage s’y montre intensif. La plaine est parcourue quotidiennement par des milliers et des milliers de têtes de bétail, des bœufs, des zébus, des troupeaux de veaux, des moutons, des chèvres, des chameaux … Tout ce peuple, guidé par quelques hommes parfois à cheval, traverse le pays et se dirige vers la capitale et vers le Nigeria, commerce de la viande oblige. Lorsque se présente un marigot, une mare d’eau subsistant après la saison des pluies, les animaux se regroupent pour s’abreuver. La végétation est celle d’une savane avec des arbustes courts, épineux ou gras. Abtouyour est un spectaculaire piton rocheux, lisse comme le plat de la main et, paraît-il, impossible à escalader. Une source y naitrait au sommet occupé par des oiseaux de proie et recouvert de fiente blanche discernable d’en bas. Ce rocher a un caractère sacré dans la région.

Tchad-Abtouyour

Les villages sont nombreux, parfois au bord de la piste, parfois un peu à l’écart. A quelques kilomètres de Bokoro, il en est un très beau, parfaitement circulaire, constitué de cases totalement végétales, murs et toits. Parfois, sur le bord de la route, des hommes coupent de longues tiges de graminées séchées qu’ils utiliseront pour la réfection de leur toit. Sur cette même route, quelques très jeunes filles tendent une banderole en travers, faite de foulards colorés mis bout à bout. Elles cherchent à arrêter les automobiles pour solliciter un peu d’argent à l’occasion du mariage de l’ainée qui doit avoir 15 ou 16 ans.

Enfin, Mongo, la dixième ville du pays, environ 30000 habitants. Nous y arrivons de nuit, la ville est plongée dans l’obscurité, seuls de rares lampadaires éclairent les abords de bâtiments publics, l’hôpital, la gendarmerie, … Mongo dispose d’un lycée et d’un établissement universitaire, un Institut Polytechnique, depuis une dizaine d’années. Un nouveau marché attend son inauguration, le recours aux panneaux photovoltaïques pour l’éclairage est généreux. L’hôpital, quant à lui, respire la misère et la pauvreté. Les lits, en nombre insuffisant, sont obsolètes et rouillés, le laboratoire n’a plus d’appareil automatique pour faire de l’hématologie, les incinérateurs à déchets ne sont plus opérationnels. A la gendarmerie elle-même les choses ne sont pas mieux, de nombreux véhicules 4 X 4 attendent des réparations improbables en étant posés sur des caisses ou des cailloux de façon à ne pas laisser cuire les pneus au soleil.

Tchad-Mongo-Le nouveau marché

Mongo vit du commerce, Mongo vit de l’artisanat (pas celui des touristes !), Mongo vit de l’élevage. En ce moment Mongo récolte son mil et le bat de façon traditionnelle. C’est également le temps de l’arrachage des cacahuètes dont les ruminants mangent les fanes avec plaisir. Mongo n’a pratiquement pas d’électricité, sauf appel aux groupes électrogènes. L’essence et le gasoil s’y vendent à la bouteille ou au jerrycan sur le bord de la route, tout simplement parce qu’aucune source d’électricité ne peut alimenter des pompes. Le coût de la vie est élevé à Mongo, car les ONG y sont nombreuses, entre autres le PAM. Et actuellement la Croix-Rouge …

Le choléra rode autour de Mongo, de Bitkine et des villages avoisinants, comme il rode dans tout le Tchad, au Mali, au Cameroun, au Nigéria, au Niger ou ailleurs en Afrique Centrale et de l’Ouest. L’épidémie, au Tchad, marque le pas en ce moment, mais un rien peut la réveiller. Le choléra est une maladie de la pauvreté, une maladie due à l’absence d’eau propre et comestible, une maladie due à l’absence de latrines et de traitement des eaux usées, une maladie due à l’absence d’hygiène. Et c’est pour établir un Centre de Traitement du Choléra que la Croix-Rouge Tchadienne, la Croix-Rouge Française, la Croix-Rouge Canadienne se sont installées à Mongo. Cette maladie, et surtout les causes de son développement, résument mieux que n’importe quel discours le retard incommensurable de l’Afrique par rapport au reste du monde. Si le discours au droit à l’eau à un sens, celui de la gratuité de l’eau que l’on entend parfois n’en a aucun. Voici un petit village, Sarah Arab, et son puits de fabrication belge installé depuis quelques temps déjà. Il distribue une eau assez claire, mais qui contrôle régulièrement la qualité de cette eau ? Et qui finance ce contrôle ? Le débit de ce puits paraît hésitant, il se peut que des clapets ou des joints aient perdu leur étanchéité. Qui assurera la révision de cette pompe ? Et qui le financera ? Apporter de l’eau à un village, c’est une énorme responsabilité. Cela s’accompagne toujours de l’incitation à ne plus utiliser l’eau du marigot voisin. Encore faut-il pouvoir garantir la potabilité de l’eau que l’on préconise. Il n’est pas interdit de considérer que l’eau peut être gratuite, comme un don du ciel, mais il n’est pas possible d’envisager la gratuité du service de l’eau.
Le choléra s’attrape et se transmet de façon dramatiquement banale. Ici, c’est une mare qui est contaminée, et pourtant, seul point d’eau, longtemps les femmes y ont poursuivi leurs prélèvements pour la cuisine ou sont venues y laver leur linge, à coté des animaux qui s’hydrataient. Ici, c’est un homme qui en est décédé. La famille s’est retrouvée pour le lavage rituel de son corps avant inhumation et a été contaminée. Là, c’est une femme qui est morte; les voisines sont venues pour présenter leurs condoléances et se lamenter. Elles sont reparties contaminées.

Tchad-Sarah Arab-Femme au puits

C’est le même chauffeur qui a fait le trajet aller et le trajet retour et cela a permis quelques échanges. « Hadj », puisqu’il a fait le pèlerinage de La Mecque, il raconte avoir épousé sa seconde femme alors qu’elle n’avait pas quatorze ans. Elle lui a donné neuf enfants, dont trois sont décédés en bas âge. Rien ne prouve que les six autres atteindront l’âge adulte. Le taux de natalité est de 41 pour mille (13 pour mille en France), mais le taux de mortalité est de 16 pour mille (9 pour mille en France). L’espérance de vie, au Tchad, ne dépasse pas cinquante ans. Alors, il faut bien faire des enfants pour assurer sa descendance et entourer les anciens quand ils ne pourront plus travailler.

Comme ceux qui affirment froidement que l’électricité en Afrique n’est pas un droit, il en est qui rêvent d’une décroissance en Occident et d’un maintien de l’Afrique dans son état actuel. Elle serait le symbole d’une vie simple, frugale, économe en énergie, faite de partage et de solidarité … Actuellement, ce que l’on découvre est bien davantage le symbole du sous-développement, de la misère, de la pauvreté, de la maladie, de la souffrance, de la vie écourtée …

Pour en savoir davantage:

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Primaires, croissance et petites voitures

Nous voici au bout de la dernière ligne droite et dans quelques heures sera connu le nom de celle ou de celui qui défendra les couleurs de la gauche socialiste aux prochaines présidentielles.
Nous n’allons pas gâcher notre plaisir. Ces primaires ont été une excellente occasion de parler de « politique » dans notre pays, ce qui n’est pas si fréquent que ça. Habituellement, on y parle bien davantage de scandales, de coups bas ou de valises de billets, ce qui n’est pas vraiment de la « politique ».
Ces primaires porteront également, si les électeurs se déplacent massivement, le renouveau, venu de l’extérieur, du parti socialiste, un parti où les éléphants et les militants devront faire preuve de modestie et d’ouverture, l’exact contraire d’un parti sénatorial.

A vrai dire, ces primaires ont été tellement passionnantes que la droite rêve d’en faire autant, ne serait-ce que pour retrouver quelques micros et quelques caméras. Fillon nous dit qu’il n’en est pas question avant 2012 puisque le président sortant est candidat. Cela n’est pas exact. Le président sortant n’est pas candidat et ne le sera, peut-être, qu’en février. Et il y a dans cette déclaration un manque certain de courage. Imaginons des primaires à droite. Soit Sarkozy est désigné comme le candidat et, en ce cas, il est suffisamment légitimé pour qu’il n’y ait aucune ambigüité à le voir solliciter un second mandat. Ses challengers n’auraient que la possibilité honorable de se retirer. Soit il n’est pas désigné et cela signifie a) que ses troupes se divisent et partent en débandade, b) qu’un(e) autre que lui fait mieux l’affaire, c) que les électeurs ne voteraient pas davantage pour lui. Dans ce cas, il est sans doute plus profitable de le savoir en février que d’attendre une sanction en mai.

Candidats aux Primaires de la gauche (DR)

Revenons à nos primaires et aux candidats socialistes. Bien évidemment, il leur a manqué du temps nécessaire pour aborder l’agriculture, la politique étrangère, … tous sujets qui se sont résumés à des phrases choc ou des expressions iconiques.
Il est cependant trois secteurs de l’actualité qui ont été totalement ignorés, et ceci par tous les candidats.

Il s’agit tout d’abord de l’Europe et de la nécessaire évolution vers davantage de fédéralisme. Seul Baylet a ici rappelé ses convictions. Il s’agit ensuite de la coopération avec les pays en développement (la citation à deux reprises du discours de Dakar par Martine Aubry ne tient pas lieu de politique !), du dialogue nord-sud, de la place de la France en Méditerranée, dans le Maghreb, au Proche-Orient et ailleurs dans le monde. Alors que les « printemps arabes » ne débouchent toujours pas sur davantage de liberté, d’indépendance et d’initiative, alors que les élections à venir sont lourdes de risques quant à la confiscation des espoirs, personne n’en a parlé. Tout comme personne n’a simplement posé la question du « Que fait-on en Afghanistan ? ». Pour des candidats à la présidentielle qui savent que la politique étrangère relève d’un pré-carré régalien, il y a là un singulier décalage. Ils sont restés bien franco-français !

L’autre secteur ignoré est celui du choix de développement pour notre pays et, au-delà, pour l’Europe et le reste du monde. Croissance ou décroissance ? La question ne se pose même pas ! Le salut est dans la croissance ! Quant à savoir quel type de croissance, cela n’interpelle aucun candidat potentiel. Si l’on envisage, peut-être, à l’horizon 2050, une possible raréfaction du pétrole, alors Ségolène Royal a une réponse toute trouvée: la voiture électrique dont SA région s’est faite la championne. Singulière pauvreté de raisonnement.

Tout d’abord, parce que le pétrole ne sert pas uniquement à fabriquer l’essence et le gazole de nos véhicules, le fioul lourd de nos bateaux ou le kérosène de nos avions. Certes, cela représente 60% du pétrole pompé. Mais les 40% restant servent à fabriquer les plastiques omniprésents, les matériaux de construction (isolation) et une vaste catégorie de produits chimiques (médicaments, engrais, alcools, huiles, cires, solvants, détergents, bitume, …). Dans ces 40% on trouve encore le pétrole utilisé pour faire tourner les industries majeures (acier, verre, …), les centrales électriques, le chauffage industriel, collectif et domestique, …

Alors, remplacer tous nos véhicules à moteur thermique par des véhicules électriques implique toujours une énorme consommation de pétrole: pour fabriquer ces nouveaux véhicules, qu’ils soient en acier ou en plastique, pour fabriquer les batteries, pour fabriquer l’énergie de ces batteries, …
Certes, au cœur des villes, à l’échelle des micro-transports, la solution de la voiture électrique est à prendre en considération. Mais dans l’ensemble de la société ? Combien de voitures dans le monde ? Un milliard, un milliard trois cent millions selon le compteur de Carfree (http://antivoitures.free.fr/). Dont 60 millions de plus rien qu’en 2011.
Il faut savoir que ce gros milliard de véhicules est essentiellement distribué en Occident: 815 véhicules pour 1000 habitants aux USA, 690 en Italie, 610 en Espagne, 600 en France et au Japon, 570 en Grande-Bretagne, 550 en Allemagne, 245 en Russie, mais seulement 150 au Brésil, 42 en Chine et 18 en Inde.

Les constructeurs redoutent la crise qui fait baisser leurs ventes … en Occident. Mais ils rêvent tous des ventes qui augmentent dans les pays en développement. Prenons l’exemple des BRIC: ces augmentations sont de 6% en Chine, 7,5% au Brésil, 15% en Inde, 56% en Russie, rien que pour l’année qui vient de s’écouler entre août 2010 et août 2011.

Faisons le même rêve que les constructeurs. La société de croissance poursuit son développement dans ces nouveaux pays avec les mêmes critères que ceux qui prévalent actuellement en Occident. Soyons réalistes et retenons le modèle français, soit 600 véhicules pour 1000 habitants (6 véhicules pour 10 personnes, parents, enfants et grand-parents compris !)

Le Brésil (194 millions d’habitants) dispose déjà de 150 véhicules pour 1000 habitants. Il lui faut en acquérir 600-150 = 450, soit 87 millions de véhicules (à population constante).

La Russie (142 millions d’habitants). C’est 50 millions de véhicules qu’elle doit acquérir pour passer de 245 à 600 véhicules pour 1000 habitants.

L’Inde (1 155 millions d’habitants). Même s’ils sont du type de la Nano Tata (Tata-Nano), ce sont … 672 millions de véhicules qui sont nécessaires pour atteindre le même taux de pénétration du véhicule individuel.

Enfin la Chine. Avec son milliard 330 millions d’habitants et son taux de 42 véhicules pour mille habitants, il lui faut s’équiper de … 838 millions de véhicules.

Soit, à population constante et pour ces seuls 4 pays des BRIC une mise en circulation sur  »x » années de 1 milliard 650 millions de véhicules, davantage que ce qu’il y a actuellement sur la planète.

Ce n’est plus un rêve, c’est un cauchemar. Alors, on entend dire « Il ne faut pas que ces pays choisissent ce mode de développement et de croissance ! ». Qui leur dit ça ? Qui leur en donne l’exemple ? Qui leur montre un contre-exemple ?Qui leur parle de transports collectifs ?Qui leur propose de rééquilibrer logement et travail ? (sans compter qu’il y a là des réponses à nos questions sur les banlieues !).

Oui, même passionnantes, ces primaires nous laissent sur notre faim et d’autres débats doivent encore avoir lieu. Notre conviction quant à la décroissance est bien connue, cela n’interdit pas de s’intéresser à ce qu’en dit le « candidat de la décroissance », Clément Wittmann (http://www.clementwittmann2012.fr/) !! Une façon de rééquilibrer les manques du discours socialiste …