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Mais où est passée la gauche anti-guerre ?

« Please don’t sink the country in a spiral of violence JUST BEFORE the Legislative Elections…Please let the people express their will even if it is distorted…Democracy is not an instant remedy, it needs time to mature…ENOUGH with the hysteria… Stop the violence because, in an armed conflict, the Jihadi Islamists (the likes of Zomor and his killer squads) will prevail…And then what? The Army AGAIN ???!!! »

Tel est le texte qu’une amie égyptienne nous fait parvenir. Un texte qui, non satisfait d’exprimer une grande lassitude, fait part d’une grande peur: celle de l’anarchie.

En ce qui concerne la situation en Egypte, mais aussi en Tunisie, au Mali maintenant, demain en Syrie à n’en pas douter, tous les médias et toutes les organisations politiques, depuis la gauche (hors PC et FG) jusqu’à la droite instruisent le procès de l’islamisme.

En Egypte, les Frères Musulmans, régulièrement élus, se voient contester en permanence leur légitimité. Ils sont accusés d’avoir volé la révolution, d’incapacité à gérer l’économie du pays, de soumission à la fraction activiste des islamistes, de manipulation de la justice, d’élaboration bâclée et imposée de force d’une Constitution conservatrice, d’organisation du viol en tant qu’arme politique, etc, etc … on en passe et des meilleurs.
Arrêtons nous un instant sur cette question du viol au sujet duquel Le Monde (par exemple, mais il n’est pas le seul, avec Claire Talon et maintenant Hélène Sallon) nous ressort régulièrement une explication en faveur d’une manipulation du pouvoir. Cette idée, elle est celle des « révolutionnaires » qui cherchent toutes les idées aptes à mobiliser leurs troupes, tout comme celle qui a fait long feu appelant à boycotter les activités civiles des Forces Armées. Or, c’est méconnaître totalement ce fléau qui, depuis des décennies, se développe dans la société égyptienne dès que l’impunité est assurée par la foule et la promiscuité: métro, tramway (dans les wagons mixtes), places publiques, manifestations, fêtes populaires comme Sham el Nessim (ce sera le 6 mai) et Place Tahrir ! D’ailleurs, « Le Monde » lui-même en administre la preuve dans un article de son « Académie » signé par Yitong Shen !

En Tunisie, la légitimité d’Ennahda, pourtant régulièrement appelé au pouvoir, est contestée parce que le Gouvernement est incapable d’assurer un décollage économique, parce qu’il est soumis aux fractions activistes des islamistes et parce qu’il traîne à rédiger et mettre en œuvre une nouvelle Constitution !
Dans ce pays, l’assassinat récent de l’opposant Chokri Belaïd soulève l’indignation à juste titre. Cela donne-t-il le droit à Manuel Valls de dénoncer ainsi, en distribuant les analyses et les sanctions qui vont avec, »un fascisme islamique qui monte un peu partout » et en affirmant qu' »il garde espoir dans le rendez-vous électoral pour que les forces démocrates et laïques, celles qui portent les valeurs de la révolution, demain, l’emportent ».

En fait, tout est dit (re-dit) là-dedans.

  • Globalement, toute expression de l’Islam relève du fascisme.
  • La preuve en est que les islamistes (régulièrement élus et portés au pouvoir) ne sont pas légitimes et qu’ils ne portent pas les valeurs de la révolution.
  • Et que doivent être préparés au plus vite le retrait de ces imposteurs et la réalisation d’un nouveau RV électoral.
  • Sur lequel il faudra bien veiller afin qu’il assure la victoire des forces démocrates et laïques qui doivent l’emporter. (Laïque, en Islam, ça veut pas dire grand-chose, sécularisé oui …).

    Au Mali, dont on a déjà beaucoup parlé, les choses sont encore plus simples. Il y a des « terroristes islamistes » qu’il convient impérativement de « détruire » ! Et s’appuyant sur l' »appel » d’un Président non légitime (cette fois-ci pour de bon !), la France, ses forces politiques, ses médias, son peuple à 75% ont choisi d’aller faire la guerre. Sans anticiper beaucoup de choses, au point que les Maliens poursuivent leurs divisions en refusant que les Casques Bleus prennent le relais des forces françaises, en agitant le spectre d’un affrontement entre Africains noirs et MNLA, en désignant le capitaine putschiste à la tête d’un comité de réforme de l’armée ! Et par qui, on vous le demande ? Par le Président intérimaire qui ne doit sa place qu’à la « bienveillance » du capitaine putschiste, le même Président intérimaire auquel la France a vaillamment répondu « Présent ! ».

    La France est devenue un pays va-t-en-guerre, singulièrement sur sa gauche. La gauche française est qualifiée par certains de gauche anti – anti-guerre. Mais où sont passés les anti-guerre d’antan ? Où sont passés les opposants à l’ingérence dans les « affaires » des autres pays ?
    Le seul droit d’ingérence que s’était attribué l’Occident et, avec lui, la gauche française, concernait l’humanitaire. Ce temps-là est bien loin, désormais la gauche française s’autorise le droit d’ingérence politique et militaire. Elle s’autorise la croisade anti-islamique avec l’appui de ses médias et de 75% de son peuple.
    Des preuves ? Il fut un temps où le « Mouvement de la Paix » savait réagir avec promptitude et énergie aux atteintes aux droits des peuples, en faveur de la paix et de la négociation. Le « Mouvement de la Paix » a publié le 13 janvier 2013, soit 48 heures après le début de l’intervention au Mali, un communiqué condamnant « l’état de guerre ». Depuis, plus rien, pas une pétition, pas un mot, pas de nouveau communiqué …
    Il y a également une pétition pour la paix (http://www.petitions24.net/stop_guerre_au_mali_-_des_choix_pour_la_paix), très peu remarquée, à coté d’autres pétitions soutenues par des partisans de la remise en ordre du Nord-Mali. Peut-on dire que son succès est très mitigé ?

    Gageons que dans les semaines, les mois à venir, le retour de bâton sera douloureux et que l’incompréhension et l’hostilité ne feront que grandir entre les deux rives de la Méditerranée et entre l’Europe et le Sud-Sahel.
    Car enfin, la situation qui prévaut dans tous ces pays n’est pas celle d’un affrontement simpliste entre le bien et le mal, entre le tout noir et le tout blanc, entre le révolutionnaire et le conservateur, entre l’islamiste et le laïque.
    D’un coté, il n’y a pas les « islamistes », mais DES islamistes travaillés par des tensions énormes entretenues par certaines puissances, allant d’islamistes modérés favorables à la sécularisation et au développement libéral de la société jusqu’à des partisans acharnés de l’ordre et de la charia.
    En face d’eux, il n’y a pas les « révolutionnaires », mais des forces travaillées, elles aussi, par de puissants courants allant jusqu’à l’anarchisme.
    Et d’abord, quelle révolution ? Y a t-il eu, parmi les militants du « Printemps », des théoriciens d’un nouveau gouvernement arabe ? Non, et le mot « révolution » est repris aussi bien par le Mouvement du 6 avril que par les Frères Musulmans.
Affiche révolutionnaire d’Egypte (DR)

Car le « Printemps arabe » est avant tout une « révolution consumériste ». Le mot n’est pas péjoratif. Il signifie que la révolution n’est pas « sociale » avant tout (revendication de la place des travailleurs dans la production, de la garantie de revenus, de l’accession à de nouveaux droits ou de la reconnaissance de droits maltraités, …), mais « libérale ».
Il s’agit de revendiquer un emploi pour les milliers de chômeurs formés par le système éducatif, un niveau de revenus pour accéder à la liberté de consommation telle qu’étalée par l’Occident, la liberté de circulation dans et hors le pays et la liberté d’expression. Evidemment que ces revendications peuvent déboucher sur des revendications plus sociales ! Evidemment qu’il s’agit là de droits fondamentaux ! Mais, malheureusement, personne n’a été capable de passer au-dessus des divisions, des combinaisons, des actions ponctuelles et partielles. Alors, la situation devient ingérable, en raison surtout de la montée en puissance des anarchistes, ces « Black Blocks » pour lesquels le pouvoir actuel doit disparaître et « peu importe par qui il sera remplacé ». Le prochain pouvoir sait déjà qu’il est condamné avant même d’être désigné.
L’anarchisme a pris une telle importance dans le débat que des leaders comme Mohamed el Baradei ont cessé d’appeler à la cohésion nationale et au dialogue: personne ne les entend, car personne ne les écoute.

A propos de l’Egypte, comme à propos de la Tunisie, comme à propos du Mali, la question qui se pose aujourd’hui est celle-ci: qu’est-ce qui peut réveiller la gauche française et la sortir de son engourdissement guerrier et de ses analyses impérialistes ?

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L’Europe et le Mali: prix Nobel et Discours de Dakar

A y bien regarder, il est peu de journées dans une vie qui comportent des évènements aussi symboliquement significatifs. Ce 12 octobre 2012 restera l’une de ces journées.

D’abord l’Europe avec la décision du Comité Nobel d’attribuer le Prix Nobel de la Paix à l’Union Européenne. Bien évidemment, ce n’est pas la situation actuelle de l’Europe qui est ainsi honorée. La crise financière est plus profonde que jamais, les peuples du sud en souffrent de façon dramatique, les peuples du nord se referment derrière leur égoïsme (n’ayons pas peur des mots), les grecs (certains !) accueillent Angela Merkel avec des drapeaux et des slogans nazis, les atteintes à la démocratie et à la libre expression des citoyens sont nombreuses (ce fut le cas en Hongrie et en Roumanie), la conviction européenne se délite de partout, les nationalismes, les régionalismes, les particularismes se multiplient d’ouest en est, … Non, certainement, ce n’est pas cette Europe-là qui mérite un Prix Nobel.

Mais avant tout cela, l’Europe c’est aussi et surtout une magnifique idée qui brasse les cultures, qui permet non seulement à un anglais de rencontrer des italiens ou des grecs, mais aussi à des roumains de recevoir des français sans que se pose le moindre problème de papiers d’identité, de passages de frontières, de déclaration de biens ou de marchandises. Même si ce n’est pas le cas de tout les pays, « zone euro » oblige, il n’est pratiquement plus besoin de changer de devises, l’euro est reconnu et accepté partout.

L’Europe c’est également la source et le but d’un formidable brassage de jeunes: Comenius, Erasmus, Office Franco-Allemand pour la jeunesse, EACEA (Agence Européenne pour la Culture, l’Education et l’Audiovisuel), … permettent au moins de 30 ans d’échanger, voyager, étudier presque là où bon leur semble.

Enfin, l’Europe, née sur les cendres et les décombres de la dernière guerre, est le meilleur outil de paix qui se puisse créer. Il suffit de reprendre un par un les conflits qui perdurent où qui se créent actuellement en Europe, d’imaginer que l’Europe n’existe pas ou plus, et chacun comprendra que cette structure de débat et de rencontre constitue le meilleur moyen de dégonfler les conflits à défaut de les désamorcer.

Ce Prix Nobel, que 27 enfants européens feraient bien d’aller chercher, à défaut des « Pères » fondateurs », doit être un encouragement à poursuivre la lutte pour plus d’Europe, pour une plus grande intégration, pour la naissance d’une démocratie européenne et la désignation de tous ses représentants par l’élection. Alors, quand Mélenchon et Le Pen s’élèvent, dans les mêmes termes, contre cette attribution dont ils affirment qu’en récompensant « la guerre économique et sociale tous azimuts entre les peuples, qui ne peut conduire qu’à la guerre tout court », le comité Nobel s’est « discrédité à jamais », ils ont grandement tort. Angela Merkel, également, a cru pouvoir affirmer que l’Euro était ainsi récompensé: il n’en est rien !

Seuls une idée, un rêve, un chantier, un futur ont été honorés. A nous d’en poursuivre la construction sans désemparer.


A plusieurs milliers de kilomètres, François Hollande a prononcé un discours (http://fr.scribd.com/doc/109835017/Le-discours-de-Francois-Hollande-devant-l-Assemblee-nationale-du-Senegal-a-Dakar-le-12-octobre-2012) médiatiquement annoncé depuis de longs jours et dont on a voulu nous faire croire que ce n’était pas le discours destiné à « effacer » celui de Sarkozy en 2007 (Le-discours-de-Dakar-le-discours-de-Benghazi), mais l’affirmation de la volonté de mettre en place de toutes nouvelles relations avec l’Afrique. Qu’en est-il exactement ?

Après une courte introduction faisant référence à une histoire douloureuse, citant en quelques lignes l’esclavage qu’il lie à la lutte actuelle contre ceux qui exploitent les misères des jeunes, des réfugiés, des migrants, François Hollande précise que la vraie raison de sa présence au Sénégal est la démocratie dont le pays qui le reçoit est un exemple, preuve en est donnée par l’importante présence des femmes dans l’Assemblée.
Cette démocratie implique que « nous devons tout nous dire, sans ingérence, mais avec exigence ».
« L’Afrique est portée par une dynamique démographique sans précédent ». Il y aura près de 2 milliards d’hommes qui vivront au sud du Sahara en 2050. « L’Afrique est la jeunesse du monde » et une terre d’avenir pour l’économie mondiale. « Votre défi, c’est de renforcer la place de votre continent dans la mondialisation, de lui donner une finalité plus humaine ». Dans cet avenir, nous sommes votre premier allié. Et notre devoir est de vous accompagner dans des secteurs comme l’agroalimentaire, les télécoms, les services financiers.
Suivent alors quelques principes d’application de cet accompagnement: la transparence, la bonne gouvernance, l’égalité.
Nous sommes à mi-discours.

François Hollande et Macky Sall, à Dakar le 12/10/2012 (C)Seyllou/AFP


François Hollande aborde alors la question du combat identique auquel France et Afrique sont confrontées, « celui de la dérive identitaire, celui du terrorisme ». Et de citer le cas du Mali, où « c’est votre sécurité qui est en jeu, c’est aussi la notre et celle de l’Europe », avant de se livrer à une analyse critique des causes de la crise malienne:

  • pratiques mafieuses des groupes terroristes,
  • erreurs lors de la fin d’intervention en Libye, notamment le manque de contrôle des armes,
  • trafic de drogue ayant corrompu l’économie malienne,
  • insuffisance du développement économique et social du Sahel,
  • absence de mise en œuvre des accords passés.
    François Hollande termine cet aspect de son discours par un rappel des modalités de soutien de la France dans le cadre d’une intervention conduite par les Africains.
    La conclusion est une affirmation que « le temps de la Françafrique est révolu », il y a désormais un partenariat basé sur la clarté, le respect et la franchise, la solidarité par le développement, les financements innovants, la consolidation de la zone franc et des relations commerciales plus équitables.

    Ceux qui auraient rêvé d’un discours reflétant une position plus novatrice, plus courageuse, plus révolutionnaire, en seront pour leurs frais: c’est exactement la même idéologie qu’il y a cinq ans qui soutient ce discours. Certes, le ton « donneur de leçons » de Sarkozy n’y est pas. Certes, le mépris et l’attitude hautaine et néo-colonialiste n’y sont pas. Mais quelle différence fondamentale (en insistant bien sur le mot  »fondamentale ») voyez-vous entre ces deux phrases ?
  • « le drame de l’Afrique, c’est que l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire » (Sarkozy).
  • « votre défi, c’est de renforcer la place de l’Afrique dans la mondialisation, de lui donner une finalité plus humaine » (Hollande).

    Hollande renouvelle les mêmes souhaits (exigences) quant à la collaboration de la France et de ses entreprise au développement africain. Hollande réaffirme les liens indispensables entre l’Afrique et l’Europe, elle aussi menacée par les dérives terroristes du continent noir. Toute la différence réside dans le ton du discours, plus humain, plus généreux.

    Alors, il n’est pas étonnant que la fin soit une approbation des préparatifs de guerre au Nord-Mali, en justifiant ceux-ci (les préparatifs) par les fautes commises par ATT (insuffisance de développement et absence de mise en œuvre des accords). Seule certitude: la fin du conflit sera mieux gérée et les armes n’iront pas tomber dans des mains sales !

    Pour notre part, nous croyons toujours que la négociation, les pourparlers, les « palabres » valent mieux que la guerre qui laissera un cortège de désolations, de misères … Le récent retournement de position des Touaregs, né de la négociation, vient à point prouver qu’il n’est pas trop tard. Désormais, ils ne parlent plus d’indépendance arrachée, mais d’autodétermination.
    Des centaines de jeunes maliens se pressent aux « frontières » de la zone occupée par les islamistes, pour y constituer des milices afin d’intervenir aux cotés de l’armée. Bien encadrés et protégés, ne pourraient-ils pas former une « armée » d’intervention pacifique, un peu comme des « casques bleus » du Sahel ? Car enfin, combien sont-ils ces djihadistes fanatiques ? Quelques milliers ! Et c’est pour ces 2 ou 3000 fous que l’on va faire la guerre ? Et que la France va soutenir cette guerre ? Ou bien, est-ce pour autre chose ?
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Egypte, Tunisie, le retour du « religieux »

Le Caire, Egypte. Encore une fois des coptes meurent sous les coups et sous les balles de fanatiques et, cette fois-ci, de l’armée. Au départ, une nouvelle fois, une église incendiée, sans doute suspectée d’abriter une fictive femme musulmane convertie de force au christianisme. S’ensuivent l’absence de protection de cette partie de la population, ses protestations dans le vide, l’exaspération, et enfin la riposte des hommes les plus fanatisés.

Tunis. Encore une fois, une chaîne de télévision est attaquée et incendiée parce qu’elle a diffusé un film. Il s’agit cette fois de Persepolis (film de Marjane Satrapi, d’une très grande qualité) auquel il est reproché de présenter une image de Dieu (ou d’une représentation des pensées d’un enfant qui voit Dieu !), ce qui est considéré comme un blasphème par les islamistes radicaux. Mais quelques semaines auparavant, il s’agissait de s’opposer à un film traitant de la laïcité.

L’image de Dieu dans le film Persépolis de Marjane Strapi (C)

Plus nous approcherons des élections, pour une assemblée constituante en Tunisie le 23 octobre, pour l’assemblée et le sénat en Egypte le 28 novembre, plus ce genre d’affrontements va se produire. Ce n’est pas une simple hypothèse; il s’agit d’une certitude.
Parce que le « religieux » relève du blocage majeur de ces sociétés, celui sur lequel peuvent agir avec toutes les chances de réussite tous les manipulateurs et tous les provocateurs. Certes, il en est d’autres, comme la place des femmes ou la reconnaissance des différentes communautés, par exemple. Mais ce blocage-là permet de désigner sans coup férir les boucs émissaires de la société en crise: ceux qui ne croient pas comme il faut, ceux qui blasphèment, …

Encore une fois, les analystes et commentateurs qui ont vu, dans les évènements de Tunis ou de la Place Tahrir, des signes encourageants d’évolution dans ce domaine se sont lourdement trompés. Ils ont vu l’aspiration du peuple à vivre en paix, comme tous les peuples veulent vivre en paix. Mais ils n’ont pas vu le début d’un renoncement à des positions intenables en démocratie. Et ils n’ont pas vu les seules forces organisées, celles des Frères Musulmans et/ou des salafistes, ou celles d’Ennahda, se taire, garder le silence et se glisser dans tous les interstices de ces sociétés démantibulées.
Une amie écrit ce soir: « O Dieu Tout-Puissant dans les Cieux, s’il Vous plait, protégez l’Egypte et son peuple, musulmans et chrétiens… Faites que les regrets ne prennent pas la place de la fierté que nous ressentions tous en janvier et février. Laissez votre Soleil briller sur l’Egypte la Bien-Gardée ».

Oui, certes, sans doute faut-il prier le Dieu des musulmans et le Dieu des chrétiens (le même !), mais que faisons-nous des athées, des libre-penseurs, de tous ceux pour qui Dieu n’est pas une évidence ?

Dans son Rapport Stratégique Annuel, l’IISS ([Institut International d’Etudes Stratégiques (http://www.iiss.org/publications/strategic-survey/) estime que: « les transitions qui ont eu lieu jusqu’à présent restent à moitié achevées, et la promesse de résultats démocratiques reste liée aux risques que font peser les sectes, des institutions militaires ou d’autres groupes qui pourraient détourner le processus ».

Aucune révolution ne se parachève du jour au lendemain. Il en est même qui sombrent totalement sous la contre-révolution. Mais dans le cas présent, il ne s’agira d’une démarche révolutionnaire qu’à partir du jour où le peuple aura décidé de lever définitivement ce blocage de la religion. Celle-ci n’est qu’affaire individuelle, elle n’est pas affaire d’état. Celle-ci relève d’une croyance personnelle et, aussi respectable soit-elle, elle ne peut légitimer ou servir de base à une action sociale, politique et collective.

Point de vue d’un laïc français ? NON, ce sont les bases de la Constitution turque !