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Discussion dans un parfum d’essence

Quelques excuses pour une aussi longue absence: tout d’abord, cette période électorale n’a pas franchement été très inspiratrice dans la mesure où les sujets favoris de ce blog sont justement ceux qui n’ont pas été (ou si peu) abordés par les candidats.
Ensuite, le mois de mai est le mois de l’Europe (qui le sait ??) et nous nous sommes plutôt engagés en faveur d’une action concertée (http://blog.quadrivium-europa.eu/) avec divers Comités de Jumelage et surtout des liens avec des citoyens d’Allemagne, d’Italie, de Roumanie ..

Voilà c’est fait, un nouveau gouvernement est en place dont on peut attendre à tout le moins un plus grand respect de la République. Pour le reste, on verra à l’usage car, de toutes façons, l’exercice sera TRES difficile.
Ce soir, les premières décisions à caractère symbolique sont tombées. Il en est une, cependant, qui reste en sursis. C’est celle qui concerne le blocage du prix des carburants. La raison en est bien simple: depuis quelques dizaines de jours le prix des carburants est à la baisse et on ne bloque pas des prix lorsqu’ils sont à la baisse !

(DR)

Cela n’empêche cependant pas de réfléchir à cette proposition électorale. Electorale ou électoraliste ? Plus directement, le blocage des prix des carburants n’est-il pas une triple erreur: fiscale, politique et écologique ?

Une erreur fiscale.

Michel Sapin, nouveau ministre du travail, est allé, ces derniers jours, jusqu’à parler de la TVA perçue par l’Etat sur les carburants dont le coût est trop élevé comme d’une « TVA indue » qu’il faut restituer au consommateur. La notion de taxe indument perçue est, à l’évidence, avant tout morale. Mais la morale est-elle une bonne conseillère en matière fiscale ? Si la réglementation fiscale prévoit une taxation en pourcentage de la valeur, cela doit s’appliquer quelles que soient les variations de cette valeur. La règle ne peut être modifiée de façon arbitraire pour telle ou telle marchandise et pas pour une autre: gaz, huile d’olive ou abonnement téléphonique !
Si la morale doit prévaloir en matière fiscale, alors il vaudrait peut-être mieux s’attarder sur les taxes amoralement perçues (sans morale) sur les jeux de hasard, l’alcool et le tabac. Si cela n’est pas fait, c’est qu’elles rapportent trop à l’Etat, davantage sans doute que les dégâts que causent les produits en question. Alors pourquoi deux poids et deux mesures quand il s’agit de l’essence ?
Enfin, bloquer le prix des carburants revient à mettre en œuvre une injustice fiscale, car on ne peut à la fois prétendre aider les classes moyennes dans leurs déplacements et financer le carburant des 4 X 4 et autres véhicules de luxe !

Une erreur politique.

Bien évidemment, tout un chacun s’est fait la remarque: le prix de l’essence monte, on décide de le bloquer pendant trois mois. Que fait-on à l’issue des trois mois si, pendant ce temps-là, le prix « officieux » a continuer d’augmenter ? On prolonge le blocage ? On cherche une autre formule ? Si c’est pour en arriver là, autant chercher l’autre formule tout de suite !
Une bonne réponse à un problème ne se trouve que si le problème en question a été correctement posé. Lors de la campagne, François Hollande a déclaré que le surcoût du carburant pouvait atteindre 200 € par mois ! Quelle que soit la période prise en compte, ce surcoût est … impossible.
Prenons l’exemple du SP98, dont le prix moyen était de 1,55 € en novembre 2011. Le prix moyen constaté fin avril 2012 était de 1,71 €. Soit un surcoût de 0,16 €. Sur cette base de surcoût, 200 € représenteraient 1250 litres de carburant par mois !! Pour un véhicule consommant 9 litres au 100 km en parcours urbain, cela fait un kilométrage mensuel de … 13900 km. Et, pour un couple, près de 7000 km chacun. Impossible ! Impensable !
Des références: France Inflation (http://france-inflation.com/graph_carburants.php) ou Zagaz (http://www.zagaz.com/stats.php).

Pourquoi faire appel à des raisonnements erronés et à des calculs faux pour subventionner les carburants ? Et d’ailleurs, que doit-on subventionner ? Un besoin ou « une » réponse à ce besoin ? L’Egypte subventionne la farine et le pain, depuis des années. Il s’agit pour elle de permettre l’alimentation de ceux qui n’ont pas de ressources. En fait, ce qui est aidé, c’est le besoin de se nourrir et il n’existe pas d’alternative à ce besoin: si l’on n’a pas les moyens de se nourrir, il ne reste que le pain subventionné. Et soyons rassuré quant à la justice fiscale: les riches n’achètent pas l »’aïch baladi » (le pain populaire) !
Par contre, le besoin de se déplacer doit pouvoir trouver d’autres réponses, toutes aussi satisfaisantes, que la seule utilisation individuelle du pétrole et des carburants !! Cela nous amène à la troisième erreur.

Une erreur écologique.

Il fut un temps où les écologistes rêvaient d’un litre d’essence à 10 €. En raison de la raréfaction du pétrole (pic pétrolier), ils y voyaient un solide argument pour que la consommation de carburant soit drastiquement réduite et que des solutions de remplacement pour les déplacements quotidiens soient imaginées. Ce raisonnement faisait partie de la « pédagogie des catastrophes » chère aux écologistes. Mais il n’y a plus d’écologistes ! Leur score aux Présidentielles ne mérite même pas que l’on s’y attarde. Les leaders politiques ne pensent qu’à négocier des places au Parlement ou des portefeuilles dans les ministères. Les autres se sont tus ou répètent un catéchisme sans plus y croire.

Pourtant, et sans atteindre 10 €, un litre d’essence à 2 € aurait beaucoup d’avantages. Il permettrait, par simple effet mécanique, de limiter la circulation en distance parcourue et en vitesse. Or moins de vitesse + moins de kilomètres = moins de morts !

Il permettrait à chaque usager actuel de se poser vraiment la question des économies et donc d’utiliser les transports en commun, d’utiliser des moyens de transport alternatifs, de co-voiturer. Personne ne pourra s’exclure de cette réflexion et de ses solutions, car il n’est pas une seule personne, même la plus isolée à la campagne, qui n’ait pas un bout de chemin commun avec une autre personne lorsqu’elle va faire ses achats ou lorsqu’elle part au travail !
Comment faire ? Vivre, se déplacer et travailler en réseau ! Ou utiliser les réseaux pour vivre, se déplacer et travailler !
Et mettre en commun les horaires, les véhicules, les parkings …
Quel(le) ministre est prêt(e) à engager le débat sur cette nécessaire évolution des mentalités ?

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2012, des vœux, des résolutions

C’est une tradition, y compris sur ce blog où chaque nouvelle année a été saluée comme il se doit. 2012 ne devra pas faire exception, d’autant qu’il y a fort à parier que ce sera une année exceptionnelle, probablement pas une année triste !
Oh, ce n’est pas la « fin du monde », annoncée par quelques milliers d’hallucinés, qui nous préoccupe, mais bien peut-être la fin d’un monde.

Mais commençons nos résolutions par un petit retour en arrière. Le début de l’année dernière avait donné matière à aborder le sujet de Facebook et des réseaux sociaux. A l’occasion, l’engagement avait été pris de ne pas renoncer à ces échanges. Ils sont toujours chronophages, souvent totalement ridicules, vains ou insignifiants. Mais ils sont intéressants parce qu’ils reflètent tant de vies élémentaires, tout comme il existe des particules élémentaires et que ce sont elles qui constituent LA vie. Ces échanges sont bons également parce qu’ils permettent en toute simplicité, en toute facilité, de s’adresser à un « ami », à une « amie » d’Egypte, du Niger, du Mali, d’Europe, de Turquie, de n’importe où dans le monde pour lui demander un avis sur tel évènement, lui souhaiter bonne chance face à tel autre, ou compatir à sa peine ou sa douleur en présence d’une tragédie. On poursuivra donc nos échanges sur les réseaux sociaux. On les étendra même (pour répondre à des demandes) à Linkedin et à Viadeo. Ces deux-là ne savent pas trop ce qu’est un retraité, ils ne cherchent qu’à s’adresser à des actifs, mais tant pis, on fera avec !

Autre retour en arrière, mais moins loin; fin avril 2011 lorsqu’à été prise la décision de quitter la plateforme de blogs du « Monde » (Pourquoi-quitter-la-plateforme-de-blogs-du-« Monde »). Rien à regretter de ce coté-là, bien au contraire ! Pour deux raisons.
La première est qu’il était, et qu’il reste encore, bien difficile de vivre en quotidienneté avec le Monde.fr. Certes, il gagne des lecteurs, grand bien lui fasse ! Mais il perd en réflexion, en profondeur, en analyse. L’immédiateté et la spontanéité des commentaires qui s’alignent après chaque article témoignent de ce vide analytique. Il suffit que le sujet soit quelque peu scabreux, ou qu’il mette en cause une personnalité pas toujours de droite d’ailleurs, ou qu’il traite des climatosceptiques, ou qu’il se rattache à une superficialité « people », pour qu’il y ait foule dans les commentaires. A l’inverse, si l’article concerne l’avenir de tel ou tel pays africain ou les négociations du Cycle de Doha, alors-là, personne … Contentons-nous de la lecture quotidienne du journal papier.

Ceci pour l’ambiance. Et pour la seconde raison, il se confirme que la visibilité des blogs du Monde est loin d’être idéale. La preuve en est que ce blog a été transféré sur la plateforme de Gandi à partir du 1er mai 2011. Alors qu’en quatre ans d’existence sur lemonde.fr, il n’avait su recevoir que 42300 visites uniques, il a déjà largement doublé ce rythme sur Gandi. Et, curieusement, le post le plus lu est celui qui concerne … le départ de la plateforme du monde.fr !

Alors 2012 ? Oui, ce ne sera pas une année triste, compte tenu de tout ce qui s’est passé en 2011.
Et tout d’abord l’Europe qui s’agite avec frénésie dans ses douleurs financières et qui voit monter les tendances isolationnistes, protectionnistes, xénophobes les plus dangereuses. Là encore, gare à l’anti-sarkozysme primaire qui ne fait du bien qu’à l’extrême-droite. Seule la confrontation « idées contre idées », et demain « programme contre programme », permettra une avancée démocratique. A l’inverse, tout ce qui a trait au comportement, aux bassesses des uns et des autres, aux démonstrations douteuses, aux rumeurs fantaisistes et non validées, tout cela ne profite qu’à ceux qui prétendent faussement pouvoir nettoyer les écuries d’Augias et mettre en place un ordre nouveau.
En Europe ? Défendre contre vents et marées le droit à l’expression politique des peuples qui la composent. Aucune « urgence » ne justifie que soient imposées des mesures draconiennes à des populations sans qu’elles aient pu exprimer leur point de vue. Si les méthodes autoritaires des dirigeants européens sont mises en œuvre, c’est bien parce que ceux-ci (les dirigeants) ont peur des réactions de rejet de leurs peuples. Et s’ils ont peur, c’est bien parce que le débat démocratique est totalement inexistant et que toute consultation ne se traduira que par un rejet radical.
Et pourtant, il faudra bien changer de méthode. Les décisions autoritaires ne conduisent pas vers un épanouissement de l’Europe, d’une Europe dont nous avons impérativement besoin. Sans l’Europe, il n’est aucune garantie d’un maintien de la paix au cours des années, des décennies à venir. Sans l’Europe, que serait encore aujourd’hui la situation dans les Balkans, où en serions-nous des affrontements entre Serbes, Croates, Monténégrins, Albanais ..? Sans l’Europe, où en serions-nous aujourd’hui du douloureux problème des Roms et des autres peuples nomades et comment Hongrie et Roumanie se débattraient-elles pour le résoudre ? Et encore, sans l’Europe, où en serions-nous aujourd’hui du conflit gréco-turc ou turco-grec à propos de Chypre ? Trois exemples seulement du bien-fondé de l’idée européenne.

Ensuite, le développement et surtout quel développement. Dans son dernier bulletin de 2011 (28/12), Herve Kempf a publié dans Le Monde une réflexion à propos de la Chine. Il y souligne (la belle évidence !) que le développement et la croissance de cette partie du Monde entraînent de plus en plus de dégâts sur l’ensemble de la planète. Pour répondre aux besoins de l’industrie chinoise, et aux besoins de ses populations, la Chine utilise l’espace écologique de l’Amérique Latine, de l’Afrique, de l’Indonésie. Et d’en conclure que les écologistes attendent avec soulagement le ralentissement de l’économie chinoise, son « effondrement », dirait Paul Krugman. Faut-il seulement y croire ? Un milliard quatre cents millions d’habitants, une classe moyenne qui grandit et qui se montre avide de consommer, une politique qui tend à faire de la monnaie chinoise une monnaie internationale, un protectionnisme grandissant aux frontières … ralentissement ou pas, les atouts sont là pour une croissance longue.
Pour illustrer cette croissance, HK cite le fait que la Chine a probablement acheté 10 millions d’automobiles en 2010. Ce chiffre est insignifiant et faux: 14 millions ! (http://www.energie7.com/NET/fr/document/2/bloc_home/elemdroite/la_chine_en_bref/la_chine_en_bref_selectionnee/le_marche_automobile_en_chine__un_veritable_eldorado/index.htm) en valeur absolue, tant l’équipement en automobiles peut espérer une croissance faramineuse. En Europe et aux Etats-Unis, il y a de 500 à 600 voitures pour mille habitants. En Chine, il n’y en a pas …30. Les constructeurs réunis parient sur un passage de 20 millions de véhicules en 2002, à 200 millions de véhicules en 2020, ce qui fera plus que doubler le parc actuel.
Est-il donc normal de reprocher à la Chine de vouloir « reproduire le comportement de l’Occident » ? Est-ce une attitude politique constructive que d' »espérer son effondrement » ? Au nom de quelle sauvegarde environnementale aurions-nous le droit d’interdire à la Chine de s’équiper en automobiles ? N’aurions-nous pas avantage à participer à ce challenge en mettant en avant de nouveaux concepts ? Par exemple ceux de la voiture électrique, du transport en commun électrique, du petit véhicule collectif électrique ?
Ce n’est pourtant pas ce que font nos constructeurs, lesquels attendent de généreuses subventions pour développer des véhicules existants: DS ou Pulse, ou de nouveaux petits véhicules individuels et low-cost.
En 2012, il faudra bien reparler d’une alternative à notre croissance impossible à soutenir dans sa nature actuelle. Et faire des propositions réalistes … le débat électoral y parviendra t-il ?

Vœux 2012

Enfin l’Afrique. Laissée sur le bas-coté du développement par une Europe exploiteuse, la voilà qui succombe aux charmes des accords bilatéraux avec la Chine et qui sacrifie ses terres et ses biens. Ce n’est pas à nous de donner des leçons, là aussi, mais rien n’interdit d’aider, d’expliquer, de comprendre, d’aimer les femmes et les hommes de ce continent. Le nord (Maghreb et Proche-Orient africain) a levé beaucoup d’espérances au cours de l’année passée. Elles ne seront probablement pas toutes satisfaites, car la révolution ne se fait pas (ne se fait plus ?) en un jour. Seule, la presse sacrifie au romantisme à longueur de colonnes (texte et photos) et, en réalité, s’aveugle et aveugle son lecteur sur les vrais enjeux. La Démocratie ne nait pas spontanément et, quand elle naît, l’accouchement est souvent difficile. En 1788, les Grenoblois des classes moyennes, lors de la « Journée des Tuiles », s’offusquaient des impôts trop élevés, s’indignaient des dépenses somptuaires de la Cour et réclamaient des aides économiques. Ce n’est pas parce que cela a débouché sur une révolution et un changement de régime que la recette est infaillible !
Ce blog s’est (très souvent) exprimé à ce sujet; il continuera en ce sens avec lucidité et confiance.

A toutes, à tous, bonne année 2012, que ce soit une année de beaucoup de paix, de justice et d’équité, de bonheur et d’échanges.

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Primaires, croissance et petites voitures

Nous voici au bout de la dernière ligne droite et dans quelques heures sera connu le nom de celle ou de celui qui défendra les couleurs de la gauche socialiste aux prochaines présidentielles.
Nous n’allons pas gâcher notre plaisir. Ces primaires ont été une excellente occasion de parler de « politique » dans notre pays, ce qui n’est pas si fréquent que ça. Habituellement, on y parle bien davantage de scandales, de coups bas ou de valises de billets, ce qui n’est pas vraiment de la « politique ».
Ces primaires porteront également, si les électeurs se déplacent massivement, le renouveau, venu de l’extérieur, du parti socialiste, un parti où les éléphants et les militants devront faire preuve de modestie et d’ouverture, l’exact contraire d’un parti sénatorial.

A vrai dire, ces primaires ont été tellement passionnantes que la droite rêve d’en faire autant, ne serait-ce que pour retrouver quelques micros et quelques caméras. Fillon nous dit qu’il n’en est pas question avant 2012 puisque le président sortant est candidat. Cela n’est pas exact. Le président sortant n’est pas candidat et ne le sera, peut-être, qu’en février. Et il y a dans cette déclaration un manque certain de courage. Imaginons des primaires à droite. Soit Sarkozy est désigné comme le candidat et, en ce cas, il est suffisamment légitimé pour qu’il n’y ait aucune ambigüité à le voir solliciter un second mandat. Ses challengers n’auraient que la possibilité honorable de se retirer. Soit il n’est pas désigné et cela signifie a) que ses troupes se divisent et partent en débandade, b) qu’un(e) autre que lui fait mieux l’affaire, c) que les électeurs ne voteraient pas davantage pour lui. Dans ce cas, il est sans doute plus profitable de le savoir en février que d’attendre une sanction en mai.

Candidats aux Primaires de la gauche (DR)

Revenons à nos primaires et aux candidats socialistes. Bien évidemment, il leur a manqué du temps nécessaire pour aborder l’agriculture, la politique étrangère, … tous sujets qui se sont résumés à des phrases choc ou des expressions iconiques.
Il est cependant trois secteurs de l’actualité qui ont été totalement ignorés, et ceci par tous les candidats.

Il s’agit tout d’abord de l’Europe et de la nécessaire évolution vers davantage de fédéralisme. Seul Baylet a ici rappelé ses convictions. Il s’agit ensuite de la coopération avec les pays en développement (la citation à deux reprises du discours de Dakar par Martine Aubry ne tient pas lieu de politique !), du dialogue nord-sud, de la place de la France en Méditerranée, dans le Maghreb, au Proche-Orient et ailleurs dans le monde. Alors que les « printemps arabes » ne débouchent toujours pas sur davantage de liberté, d’indépendance et d’initiative, alors que les élections à venir sont lourdes de risques quant à la confiscation des espoirs, personne n’en a parlé. Tout comme personne n’a simplement posé la question du « Que fait-on en Afghanistan ? ». Pour des candidats à la présidentielle qui savent que la politique étrangère relève d’un pré-carré régalien, il y a là un singulier décalage. Ils sont restés bien franco-français !

L’autre secteur ignoré est celui du choix de développement pour notre pays et, au-delà, pour l’Europe et le reste du monde. Croissance ou décroissance ? La question ne se pose même pas ! Le salut est dans la croissance ! Quant à savoir quel type de croissance, cela n’interpelle aucun candidat potentiel. Si l’on envisage, peut-être, à l’horizon 2050, une possible raréfaction du pétrole, alors Ségolène Royal a une réponse toute trouvée: la voiture électrique dont SA région s’est faite la championne. Singulière pauvreté de raisonnement.

Tout d’abord, parce que le pétrole ne sert pas uniquement à fabriquer l’essence et le gazole de nos véhicules, le fioul lourd de nos bateaux ou le kérosène de nos avions. Certes, cela représente 60% du pétrole pompé. Mais les 40% restant servent à fabriquer les plastiques omniprésents, les matériaux de construction (isolation) et une vaste catégorie de produits chimiques (médicaments, engrais, alcools, huiles, cires, solvants, détergents, bitume, …). Dans ces 40% on trouve encore le pétrole utilisé pour faire tourner les industries majeures (acier, verre, …), les centrales électriques, le chauffage industriel, collectif et domestique, …

Alors, remplacer tous nos véhicules à moteur thermique par des véhicules électriques implique toujours une énorme consommation de pétrole: pour fabriquer ces nouveaux véhicules, qu’ils soient en acier ou en plastique, pour fabriquer les batteries, pour fabriquer l’énergie de ces batteries, …
Certes, au cœur des villes, à l’échelle des micro-transports, la solution de la voiture électrique est à prendre en considération. Mais dans l’ensemble de la société ? Combien de voitures dans le monde ? Un milliard, un milliard trois cent millions selon le compteur de Carfree (http://antivoitures.free.fr/). Dont 60 millions de plus rien qu’en 2011.
Il faut savoir que ce gros milliard de véhicules est essentiellement distribué en Occident: 815 véhicules pour 1000 habitants aux USA, 690 en Italie, 610 en Espagne, 600 en France et au Japon, 570 en Grande-Bretagne, 550 en Allemagne, 245 en Russie, mais seulement 150 au Brésil, 42 en Chine et 18 en Inde.

Les constructeurs redoutent la crise qui fait baisser leurs ventes … en Occident. Mais ils rêvent tous des ventes qui augmentent dans les pays en développement. Prenons l’exemple des BRIC: ces augmentations sont de 6% en Chine, 7,5% au Brésil, 15% en Inde, 56% en Russie, rien que pour l’année qui vient de s’écouler entre août 2010 et août 2011.

Faisons le même rêve que les constructeurs. La société de croissance poursuit son développement dans ces nouveaux pays avec les mêmes critères que ceux qui prévalent actuellement en Occident. Soyons réalistes et retenons le modèle français, soit 600 véhicules pour 1000 habitants (6 véhicules pour 10 personnes, parents, enfants et grand-parents compris !)

Le Brésil (194 millions d’habitants) dispose déjà de 150 véhicules pour 1000 habitants. Il lui faut en acquérir 600-150 = 450, soit 87 millions de véhicules (à population constante).

La Russie (142 millions d’habitants). C’est 50 millions de véhicules qu’elle doit acquérir pour passer de 245 à 600 véhicules pour 1000 habitants.

L’Inde (1 155 millions d’habitants). Même s’ils sont du type de la Nano Tata (Tata-Nano), ce sont … 672 millions de véhicules qui sont nécessaires pour atteindre le même taux de pénétration du véhicule individuel.

Enfin la Chine. Avec son milliard 330 millions d’habitants et son taux de 42 véhicules pour mille habitants, il lui faut s’équiper de … 838 millions de véhicules.

Soit, à population constante et pour ces seuls 4 pays des BRIC une mise en circulation sur  »x » années de 1 milliard 650 millions de véhicules, davantage que ce qu’il y a actuellement sur la planète.

Ce n’est plus un rêve, c’est un cauchemar. Alors, on entend dire « Il ne faut pas que ces pays choisissent ce mode de développement et de croissance ! ». Qui leur dit ça ? Qui leur en donne l’exemple ? Qui leur montre un contre-exemple ?Qui leur parle de transports collectifs ?Qui leur propose de rééquilibrer logement et travail ? (sans compter qu’il y a là des réponses à nos questions sur les banlieues !).

Oui, même passionnantes, ces primaires nous laissent sur notre faim et d’autres débats doivent encore avoir lieu. Notre conviction quant à la décroissance est bien connue, cela n’interdit pas de s’intéresser à ce qu’en dit le « candidat de la décroissance », Clément Wittmann (http://www.clementwittmann2012.fr/) !! Une façon de rééquilibrer les manques du discours socialiste …

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Mon ancienne voiture

Renault m’a fait récemment parvenir une publicité, illustrée d’une crème anti-âge, me précisant qu’il y a plus efficace pour rajeunir mon ancienne voiture. Bravo à Renault qui suit parfaitement ses clients et sait leur rappeler que leur voiture vieillit, quand bien même la mienne n’a pas encore 5 ans !!

La méthode de rajeunissement proposée est ni plus ni moins celle de l’achat d’un nouveau véhicule. La prime à la casse laisse des traces. Selon le Ministère de l’Industrie, au 14 décembre 2010 ce sont 563434 véhicules qui ont été retirés du circuit en 2010 pour être conduits à la ferraille. Tous véhicules âgés, mais pas tous véhicules hors d’usage. Aucune réflexion n’a été entreprise pour savoir si certains n’auraient pas pu être recyclés auprès de jeunes, ou auprès d’associations, après expertise bien entendu. Mais tous ont été détruits au motif de la lutte contre la production de CO2.

Cet objectif au moins a t-il été atteint ? Pas si sur !

TerraEco (http://www.terra-economica.info/La-prime-a-la-casse-est-elle,8571.html) s’est livré à un petit calcul rapide et sommaire qui prouve le contraire.

En 2009, la moyenne CO2 par kilomètre parcouru sur le parc automobile français tous âges confondus était de 176 g/km.

Après le retrait des véhicules concernés par la prime à la casse et leur remplacement, cette moyenne est tombée à 169 g/km en 2010. Soit sur la base de 12798 km parcourus en moyenne par chacun des 37,5 millions de véhicules français (UN pour DEUX habitants), la production de CO2 a été abaissée de 3,3 millions de tonnes en un an.

Or, dans le même temps, chaque voiture détruite a été remplacée par un véhicule neuf fabriqué sur l’une ou l’autre des chaînes de montage. TerraEco prend l’exemple d’une Laguna dont la fabrication est responsable de l’émission de 4,7 tonnes de CO2, un chiffre assez comparable quel que soit le type de véhicule. Ainsi donc les 563434 véhicules “échangés” dans le cadre de cette opération ont entraîné la production de 2,65 millions de tonnes de CO2.

Au total le bénéfice de l’opération n’est que de … 650 000 tonnes. Encore faut-il remarquer que ces calculs ne prennent pas en considération les coûts liés à la destruction des véhicules retirés de la circulation. Le bénéfice écologique de l’opération est donc quasi nul.

Certains vont se rassurer en disant que le nouveau véhicule va produire moins de CO2 pendant les quelques années de son existence et, donc, qu’à la longue, la balance sera moins négative. Oui, certainement, même si le gain restera à la marge.

Quant au bénéfice écologique personnel, prenons un automobiliste lambda qui a fait l’acquisition d’un nouveau véhicule qui produit 169 g au lieu de 176 g/km de CO2. Au cours d’une année (12798 km !), il économisera 90 000 grammes de CO2 ! Pour compenser les 4,7 tonnes liées à l’achat de son nouveau véhicule, il devra rouler avec son nouveau véhicule pendant … 52 ans. TerraEco a pris l’exemple d’une Twingo plus économe et le temps de conduite nécessaire n’est que de … 28 années.

Moralité: il y a encore beaucoup à faire pour réduire l’impact écologique de la voiture. Et ce ne sont pas les opérations de prime à la casse ou de prime de rajeunissement qui peuvent y contribuer. Ces opérations n’ont qu’un seul objectif; celui de maintenir en vie tout un secteur économique majeur dans notre pays comme dans tous les pays industrialisés. Ce secteur ne concernent pas seulement les fabricants d’automobiles ou d’accessoires, mais aussi le circuit des concessionnaires, des garages, des carrossiers, des additifs, des carburants, de la publicité, des routes, autoroutes et rond-points, et j’en oublie certainement.

2012 verra probablement apparaître les premières voitures électriques de qualité et de compétences (autonomie) suffisantes pour en faire de vrais véhicules. Connaît-on aujourd’hui le coût écologique de fabrication d’un tel véhicule et de ses batteries ? Connaît-on le cout écologique de la recharge de celles-ci et de son traitement en fin de vie ?

Renault (encore lui) fait de la Zoé (http://news.autoplus.fr/news/1437514/Genève-2011-présentation-stand-Renault-ZOE-PREVIEW) un vrai cheval de bataille. Mais toute la stratégie en reste encore et toujours à la voiture individuelle toujours et partout. Chaque année, le coût unitaire d’un ticket de train augmente, alors qu’il devrait diminuer, seule solution pour transférer des usagers vers ce moyen de transport collectif. Les parcs de stationnement à l’entrée des villes devraient être obligatoires et reliés au centre de la cité par un réseau dense et permanent de véhicules de transport en commun, sortes de taxis électriques gratuits. Il ne s’agit pas de supprimer la voiture individuelle, mais de ne lui laisser le champ libre que dans un domaine restreint dont la ville sera nécessairement exclue. Et pour cela, il faut faire évoluer (formation, conversion) tous les secteurs économiques précédemment cités. Une lourde charge …

Zoé Renault (DR)

Tout un changement de mentalité et de comportement.