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Ecologie

Les Suisses et le retour au pays d’Heidi

La Suisse est un pays dont la démocratie se vit sans complexes ! On se souvient de l' »initiative » contre les mosquées et leurs minarets lancée par l’UDC où celle portant sur l’expulsion des étrangers condamnés. D’aucuns avaient pu juger que le succès de ces initiative était prémonitoire d’un climat et d’une ambiance qui ne manqueraient pas de se développer en Europe, Europe occidentale à minima. La même UDC a lancé une nouvelle « initiative » voici quelques mois, contre « l’immigration en masse ». Et voici qu’une nouvelle « initiative » est proposée par ECOPOP (http://www.ecopop.ch/joomla15/index.php?option=com_content&view=article&id=337&Itemid=17&lang=fr). Une « initiative » est l’aboutissement d’une démarche pétitionnaire de demande de référendum. Cette dernière porte sur la limitation de la population de la Suisse dans le but de préserver de façon durable les ressources naturelles. Ecopop revendique que la « croissance dramatique de la population mondiale soit réduite par un soutien au planning familial et que l’immigration nette en Suisse soit limitée ».
Sur le premier point, 10% des moyens que la Suisse consacre à la coopération internationale devront être consacrés à la planification familiale, ceci dans les pays jugés les plus surpeuplés, en Afrique ou en Asie.
Sur le second point, la part de l’accroissement de la population résidente en Suisse de façon permanente, et attribuable au solde migratoire ne devra pas excéder 0,2% par an, chiffre moyen calculé sur une période de trois ans.
Cette initiative référendaire fait déjà l’objet d’un vaste débat en Suisse, quand bien même elle est restée largement inaperçue depuis plusieurs mois. Le dépôt des signatures a réveillé les commentaires. Tout d’abord, cette démarche est lancée par une vieille association écolo (1970), certes globalement de droite mais rassemblant quelques personnalités de l’ultra-gauche. Elle surprend par sa radicalité, pourtant inscrite dans les gènes de l’association. Les Verts authentiques de Suisse se divisent et se déchirent à son propos, les uns la soutenant, les autres l’exécrant. L’objectif déclaré est celui de la conservation des ressources naturelles et du maintien de la qualité de la vie pour les Suisses d’aujourd’hui et ceux de demain. Aux facteurs classiques de consommation individuelle et de choix technologiques (énergies fossiles, nucléaires ou alternatives), Ecopop ajoute le nombre d’individus qu’elle estime trop élevé en Suisse.
Le but poursuivi n’est donc pas tant la protection de la nature, comme certains l’affirment trop vite, mais de préserver les ressources pour l’avenir. Les militants d’Ecopop veulent lutter contre la « bétonisation », soulager les services de transport, protéger le paysage culturel …
L’autre sujet de discussion porte, comme on peut s’y attendre, sur l’immigration puisque le taux de renouvellement de la population suisse d’origine endogène n’est que de 1,5, très loin du taux de 2,1 nécessaire au maintien des populations à niveau constant. L’augmentation de la population provient de l’immigration et des enfants des immigrants.

Mais qui sont les immigrants ? D’où viennent-ils ? Combien sont-ils ?
La Suisse comporte près de 8 millions d’habitants (7954700 au dernier chiffrage à fin 2011!), avec un accroissement de 84500 personnes par rapport à 2010,soit une croissance de 1,1 % comparable à celle de 2007 ou 2009.
A fin août 2012, la population d’origine étrangère et résidant en Suisse était de 1804551 personnes (admirez la précision des chiffres !), soit 22,7 % de la population totale.
Parmi eux, 1176587 personnes (soit 65 %) étaient en provenance de l’Union Européenne (27 Etats membres) et de l’Association Européenne de Libre Echange (AELE; Islande, Norvège, Liechtenstein). Ces immigrés en provenance de l’UE/AELE ont augmenté de 4,2 % par rapport à l’année précédente, soit + 46949 personnes.

Les autres immigrés, donc en provenance de pays autres que ceux de l’UE/AELE, et qui représentaient 35 % du total des immigrés, étaient au nombre de 627964 personnes, en augmentation de 1 %, soit + 6301 personnes.

Les immigrants résidents se ventilent ainsi: italiens (16,2 %), allemands (15,6 %), portugais (13 %), français (5,6 %), kosovars, macédoniens, turcs (quelques 3,9 % pour chacun).
Il est à noter que les asiatiques au sens large de toute l’Asie, ne représentent que 5 % des migrants, les africains, Maghreb compris, 3,5 % et l’Amérique du Sud + Centrale 2,7 %.
Les immigrés de la Suisse ne sont donc pas les immigrés d’autres pays d’Europe et le débat Nord-Sud ne saurait y avoir une prégnance aussi importante qu’en France, par exemple. Notons cependant au passage que la Suisse naturalise de 37000 à 47000 personnes d’origine étrangère par an, depuis dix ans !
Alors si une telle « initiative » se traduit par un référendum, et que celui-ci est approuvé par une majorité, que se passera-t-il ?
La population suisse s’accroît de +80000 personnes par an. Réduire ce nombre à 15000 par an entraverait de façon dramatique la capacité de développement économique du pays, ainsi que les moyens des services tels les hôpitaux ou le système scolaire. En effet, les migrants essentiellement européens sont des migrants hautement qualifiés, en bonne santé, qui assurent la viabilité de tout le système social suisse marqué par un vieillissement de la population autochtone. Sans parler des impôts !
Vouloir réduire la population, à des fins écologiques, en agissant sur les migrations est absurde. Les migrants rejetés iront ailleurs et consommeront ailleurs. Qu’on le dise franchement; il ne s’agit ici que de défendre égoïstement SON environnement. Les militants de la limitation de l’immigration invoquent l’exemple français où la « grande banlieue est synonyme d’acculturation, de pauvreté et de violence ». Qu’ils se rassurent: la majorité de leurs migrants ne vivent pas en grande banlieue !
Mais là où l’initiative Ecopop devient franchement xénophobe, c’est là où elle prétend imposer à la Suisse de consacrer ses fonds à la limitation des naissances dans les pays pauvres.

On rejoint les tendances de fond de l’écologie radicale, celles de la décroissance, de la relocalisation, du refus des échanges (avion, tourisme, migrations …). A n’en pas douter, les deux « initiatives » (UDC contre l’immigration de masse et Ecopop Halte à la surpopulation), quand elles seront soumises à votation, seront des pièces maîtresses du débat sur la croissance et la démographie. La Suisse va t-elle rehausser ses montagnes de quelques rangs de moellons et se replier encore davantage sur elle-même pour revenir au pays d’Heidi ?
La Suisse va t-elle encore nous donner un signal précurseur de ce qui va se passer en Europe ?

(DR)Save the Planet


Toutes les statistiques suisses en matière d’immigration sont ici (http://www.bfm.admin.ch/bfm/fr/home.html).
Un site pour une réflexion approfondie ici (http://www.alliancesud.ch/fr/documentation/projets/la-jeunesse-debat/ecopop).

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Photographie

Ma photo de la semaine 48: tireur d’épine (bis)

La photo du chapiteau roman (Ma-photo-de-la-semaine-47:-tireur-d-épine) de l’église de Grandson m’a intrigué. Quelle pouvait bien être la signification de cet homme qui se retire une épine du pied ? D’autant plus qu’il me souvenait qu’une statuette sur le même thème, datée du 1er siècle avant JC, existe au musée du Capitole à Rome.

Le tireur d’épine-Musée Capitolini-Rome

Allant fouiller Internet, j’y ai lu que les exégètes de l’art roman interprètent cette scène comme illustrant la nécessité de retirer le mal qui est en soi pour atteindre aux vertus chrétiennes. Mais alors, comment interprètent-ils cette version féminine et “délurée” que l’on trouve sur la chapelle romane de Foussais, en Vendée ?

Tireuse d’épine à Foussais (DR)
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Livres et lectures

Kairo Jacobi, juste avant l’oubli

C’est un roman, “Kayro Jacobi, juste avant l’oubli“, écrit par Paula Jacques (http://fr.wikipedia.org/wiki/Paula_Jacques) (Mercure de France, 2010). D’inspiration largement autobiographique parce que l’auteure est née en Egypte et qu’elle en a été chassée, enfant, avec ses parents. Elle est alors allée vivre, seule, en Israël quelques années avant de venir en Europe.

Cet essai relate l’histoire d’un réalisateur juif qui fait des films à succès, des films emplis de jeunes gens amoureux, de familles qui se déchirent, de puissants qui se trompent les uns les autres, bref le cinéma conquérant d’Hollywood sur Nil, celui dont j’ai pu parler ici (Alexandrie-Un-cinéma-coquin). Ce créateur populaire se trouve confronté à la montée de l’islamisme, à la prise du pouvoir par les Frères Musulmans et Mohamed Naguib, enfin au renversement de celui-ci par Nasser et à la nationalisation du Canal de Suez. Les juifs doivent partir, les juifs sont accusés de conspirer contre le pays et de s’enrichir sur le dos du peuple. Un intellectuel minable, dogmatique et parvenu, transformé en fonctionnaire zélé, se fait de Kayro son ennemi numéro un. Et, qu’il le veuille ou non, l’ »assassine » en quelque sorte, tant il le traque, le prive de ses biens et de ses œuvres et le pousse à l’erreur (la banale erreur ou faute humaine) qui le précipitera dans le Nil avec sa voiture, où il mourra.

Ce beau roman, absolument pas nostalgique, mais triste devant le gâchis de l’histoire, nous interroge sur l’Egypte et son avenir, au travers d’un pan de son vécu.Une histoire qui se poursuit encore actuellement: les récentes élections législatives ont servi à repousser les Frères Musulmans, sans doute au prix de quelques années encore de stagnation pour le peuple.

(C)Paula Jacques-Mercure de France

Les juifs sont aujourd’hui totalement inexistant en Egypte, combien sont-ils ? Une dizaine ? Deux dizaines ? Des vieux accrochés à ce qu’ils considèrent comme leur terre puisque la première communauté juive en Egypte date de six siècles avant JC.

Régulièrement des affrontements ont lieu au Caire, à Alexandrie, à Assouan ou à Minia avec une autre communauté; celle des Coptes qui, eux, peuvent prétendre être les vrais descendants des égyptiens du temps des pharaons. La crise économique aidant, les difficultés du pouvoir en place, la nécessité de “donner des gages” à des foules en colère, tout cela obligera-t’il, tôt ou tard, les Coptes à partir à leur tour ?

En ce siècle de difficultés économiques, écologiques, sociales, culturelles, le repli sur soi et la fermeture de sa porte sont devenus des valeurs sûres. Et rien ne sert de critiquer l’Egypte ou même la Suisse qui, comme prévu (Renvoi-des-étrangers), a voté pour le renvoi des étrangers accusés d’un crime ou d’une tromperie à l’égard des services sociaux, sorte de double peine contraire aux conventions européennes. Comme le reste de l’Europe, la Suisse devient xénophobe.

Les écologistes radicaux de chez nous, ceux qui se sont réunis à Cancon (http://blog.cancon2010.org/post/2010/11/Programme-provisoire) par exemple, ne sont pas plus ouverts, eux qui « récusent » (dans un même sac)  »les migrants (http://biosphere.ouvaton.org/index.php?option=com_content&view=article&id=344:migrations&catid=53:m&Itemid=73) à la recherche d’emploi ou les touristes à la recherche de sensations, car le droit de se déplacer selon son désir individuel empiète sur les capacités de la Biosphère ». A Cancon, ils se sont réunis pour protester contre les lignes ferroviaires à grande vitesse et pour faire des ateliers de gastronomie régionale.

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Ma photo de la semaine 47: tireur d’épine

Il s’agit d’un chapiteau roman (dernier quart du XII° siècle) de l’église de Grandson (CH) aujourd’hui consacrée au culte protestant.

Tireur d’épine, église de Grandson