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Mais qui sont les zadistes

Extraits de Libération du 21 décembre 2014 (http://www.liberation.fr/societe/2014/12/21/j-ai-pris-un-conge-sans-solde-et-j-ai-rejoint-la-zad_1168216).

1 – MIL a 30 ans. Il est ouvrier viticole dans la Drôme. Il vient deux jours par semaine, pendant ses congés, sur la ZAD. Il apporte du matos. Il ne se sent pas assez militant pour tout plaquer.
2 – MERLIN a 32 ans. Il est du coin. Il a fait Notre-Dame des Landes, Decines, Sivens où il occupait l’un des derniers arbres à être tombés. Il a acquis un mode de vie de partage des connaissances qui prouve que l’on peut vivre autrement. Il compte bien se poser et créer un truc qui associera viticulture, maraîchage et arboriculture … plus tard.
3 – CAMILLE a 22 ans. Le Bac, un BTS puis un début de licence en management qu’il a abandonné. Il a passé un Bac Pro horticulture. Découvre le milieu libertaire dans la Sarthe et n’a aucune envie de vendre sa force de travail. Reste trois mois à Sivens. Et pense à son terme à son projet de vie, par exemple dans une ferme communautaire.
4 – TROY a 22 ans. Il est infirmier et a pris un congé sans solde pour être présent à Roybon. Il a peur que la France finisse par être recouverte de lotissements et de centres commerciaux. Ici, il y a des gens qui parviennent à faire des choses ensemble, à discuter. Pour changer le monde, il ne faut pas se limiter à ce que la société nous dit de faire.
5 – PIERRETTE a 22 ans. Elle a un BTS en gestion et protection de la nature, dans la Drôme. Elle a trouvé sur la ZAD la vie en collectivité, l’entraide, le soutien à une lutte. Elle a appris à construire des cabanes, à grimper dans les arbres, à faire des fours en terre cuite, à se protéger, par exemple avec du citron contre les lacrymogènes, à communiquer, à filmer ….
6 – MARIE-JOSEPHE a 70 ans. Elle vient tous les jours sur la ZAD parce qu’ici, c’est le cœur de la vie. Elle se dit que tout n’est pas foutu et que tout reste possible. A savoir, défendre la terre, l’eau, la nature qui nous donne la vie…

Extraits du Nouvel Obs du 19 décembre 2014 (http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20141219.OBS8380/carte-le-tour-de-france-des-zad-et-des-lieux-de-crispation.html).

7 – RICHY a 42 ans. « Vadrouilleur », il est d’origine lyonnaise et veut vivre dans une société gratuite, autogérée et collective.
8 – JEAN-CLAUDE a 66 ans. Il est retraité et vit à quelques 30 km de là. Evitant de parler de décroissance, il rêve de la sobriété heureuse et pense que l’on peut faire autre chose que de tels grands projets, des chambres d’hôtes par exemple.
9 – NINA a 20 ans. Elle vit comme saisonnière. Son rêve est de produire son miel, son lait, son fromage de chèvre et, pour le reste de ses besoins, y accéder par un fonctionnement de troc local.
10 – VINCENT a 27 ans. Après avoir abandonné ses études de géographe à Grenoble, il s’est réorienté vers une formation agricole et travaille dans une exploitation collective spécialisée dans les légumes bio à Saint-Antoine.

Merci à ces deux médias que sont « Libé » et « Le Nouvel Obs » pour avoir réalisé ce travail d’interview de quelques militants qui occupent la MaquiZad de Roybon. Au fait, le nom de MaquiZad ne vous fait penser à rien de particulier ? Et pourtant, c’est bien une journaliste du « Monde » qui a cru intelligent de situer les Chambarans « au pied du Vercors » ! Le réflexe subliminal étant bien provoqué, il n’y avait plus qu’à l’exploiter: ici; on fait de la résistance !
Une dizaine d’interview, c’est peu et c’est beaucoup, si on les rapporte au nombre d’occupants de la Maison Forestière de la Marquise (avec un R) qui ne doivent pas dépasser la vingtaine, dans le froid, le brouillard et la boue.

Deux constatations s’imposent immédiatement: ils sont jeunes, en fin d’études ou ayant abandonné leurs études. Ils n’ont pas d’emploi stable et n’en cherche absolument pas. Ils sont quasiment tous orientés vers un retour à la terre et aux travaux agricoles, Retour au travers duquel ils se déclarent en accord avec leur militantisme en faveur de la décroissance (ou de la « sobriété heureuse »). Ceux qui ne sont pas les plus jeunes sont des retraités qui sont restés baba-cool.

Pour mieux comprendre ce qu’ils « apprennent » lors de ces périodes combattantes, voici le calendrier des ZADteliers prévus en cette fin décembre.
Dimanche 21 décembre, à 14 heures, Educ’citoyenne suivie de la Fête du solstice d’hiver.
Lundi 22, à 14 heures: conserves.
Mardi 23, à 14 heures: permaculture (art de cultiver la terre pour qu’elle reste fertile indéfiniment).
Samedi 27, à 14 heures; réunion d’info sur Center Parcs, thème hydrologie.
Dimanche 28, à 10 heures; atelier sublimer les souches de la forêt. A 14 heures atelier premiers secours.
Lundi 29, après-midi; cueillette et cuisine des plantes sauvages de nos régions. A 17 heures, session feu et en soirée bal folk.
Mardi 30, à 14 heures, pâtisserie.
Ne nous moquons pas ! Même s’il ne doit pas y avoir beaucoup de plantes sauvages à cueillir pour les cuisiner un 29 décembre dans les bois de Chambarans (ha, peut-être au Bois de Gargamelle !)

Chemin du Center Parc (C) Camille Bordenet

Ce comportement et ce discours rejoignent bien l’analyse que [nous avons faite (Pour-quelques-arpents-de-bois-et-de-champs-bons-à-rien) de leur idéologie: ce sont des décroissants. Quant à leur discours, il dénonce en permanence la société de commerce, de profit, la collusion des élus avec cette société et l’appel à une démocratie directe à laquelle ils participeraient à l’évidence.

A ce point de notre analyse, une grande inquiétude nous saisit. Ce ne sont pas des notions nouvelles, Nous avons déjà parlé de la Génération Y (Génération-Y-génération-quoi-génération-sacrifiée-…), ou Génération Millénium. Cette génération de ceux qui sont nés entre le début des années 80 et le début des années 2000, qui ont donc entre 15 et 35 ans, ne veut pas devenir adulte (http://bigbrowser.blog.lemonde.fr/2014/12/27/la-jeunesse-actuelle-a-t-elle-envie-de-devenir-adulte/). Elle ne veut ni mariage, ni enfants, ni salaire, ni maison !
Avec un taux de chômage de 25 % chez les 15-24 ans et de 47 % chez ceux d’entre eux qui n’ont que le brevet ou aucun diplôme, il est possible de comprendre que la situation qui leur est faite puise entraîner un tel comportement.

Et si les zadistes n’étaient que la frange avancée et radicale de cette jeunesse désillusionnée ?